
L’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) a de nouveau été frappé par la violence, ce 4 septembre 2025. Trente-six personnes ont trouvé la mort lors d’une attaque perpétrée par les rebelles des Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe armé affilié à l’État islamique en Afrique centrale. Cette attaque, survenue sur la route Komanda-Luna reliant les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu, a coûté la vie à 33 militaires et 3 civils. Ce qui témoigne de la gravité de l’insécurité qui règne dans cette région depuis des décennies.
Une attaque ciblée et meurtrière
L’assaut des ADF visait un convoi militaire en patrouille. Selon les médias locaux, les rebelles ont tendu une embuscade à l’unité congolaise sur un axe stratégique, souvent utilisé pour les mouvements de troupes et l’approvisionnement. La violence de l’attaque et son organisation témoignent de la capacité opérationnelle de ce groupe, malgré les opérations militaires menées contre lui par l’armée congolaise et ses alliés régionaux.
Les trois civils tués dans cette attaque rappellent aussi que la population locale, bien que souvent prise entre deux feux, est loin d’être épargnée. La peur, les déplacements forcés, les pertes humaines et matérielles deviennent le quotidien de milliers de familles vivant dans cette région frontalière avec l’Ouganda. Les Forces démocratiques alliées sont loin d’être un nouveau venu sur la scène de l’instabilité congolaise.
Les ADF : une menace enracinée dans la région
Formées à la fin des années 1990, les ADF sont issues de la fusion de plusieurs groupes islamistes ougandais, dont l’Armée nationale de libération de l’Ouganda (NALU), l’Armée musulmane de libération de l’Ouganda et le Tablighi Jamaat. À l’origine, leur objectif était de renverser le régime de Yoweri Museveni en Ouganda. Mais au fil du temps, ils se sont enracinés dans l’est de la RDC, profitant de la porosité des frontières, de l’éloignement de l’autorité centrale, et des tensions ethniques et économiques locales.
Depuis 2014, les ADF ont intensifié leurs attaques, visant aussi bien les populations civiles que les forces armées congolaises. En 2019, le groupe a été officiellement rattaché à la mouvance de l’État islamique, sous le label de « Province d’Afrique centrale de l’État islamique » (ISCAP). Cette affiliation a permis aux ADF de bénéficier de financements, d’un soutien logistique et surtout d’une visibilité internationale.
Un lourd bilan humain et un déplacement massif des populations
Le bilan humain des actions des ADF est catastrophique. Depuis leur montée en puissance dans les années 2010, les attaques ont fait des milliers de morts parmi les civils. Les villages sont régulièrement incendiés, les populations déplacées, les femmes violées, les enfants enrôlés de force. Selon l’ONU, plus de 500 000 personnes ont été déplacées rien qu’en Ituri et au Nord-Kivu à cause des exactions des groupes armés, dont les ADF sont parmi les plus actifs.
Ces déplacements massifs exacerbent les tensions locales et rendent la situation humanitaire extrêmement préoccupante. Les ONG et les agences humanitaires se heurtent à des conditions d’accès difficiles, à l’insécurité permanente, et à un manque de financements.
Réponses militaires et limites de l’action de l’État
Face à la menace des ADF, l’armée congolaise (FARDC) a lancé de nombreuses opérations, souvent en collaboration avec les forces armées ougandaises (UPDF), dans le cadre d’accords bilatéraux. Ces offensives ont permis d’obtenir certains succès tactiques, notamment la destruction de camps et la neutralisation de commandants ADF. Toutefois, les résultats sur le terrain restent insuffisants pour enrayer durablement la menace.
Le gouvernement congolais a instauré, depuis mai 2021 un état de siège dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, conférant des pouvoirs exceptionnels aux autorités militaires. Cependant, cette mesure n’a pas permis d’apporter une paix durable, et elle est critiquée pour son inefficacité et les atteintes aux libertés civiles qu’elle engendre.