
Une enquête de la BBC plonge au cœur d’un univers clandestin où se mêlent croyances mystiques, violences extrêmes et dérives criminelles. Le reportage révèle l’existence d’un marché souterrain en Sierra Leone, alimenté par des praticiens occultes qui affirment pouvoir fournir des restes humains à des fins rituelles. Au-delà des faits filmés en caméra cachée, l’affaire soulève des interrogations troublantes sur l’ampleur de ces pratiques et sur les connexions possibles avec des réseaux d’influence en Afrique de l’Ouest.
Un reportage d’investigation de la BBC a mis à nu une réalité glaçante : un réseau de praticiens occultes en Sierra Leone serait impliqué dans des meurtres rituels et un trafic de parties de corps humains. L’enquête, menée sous couverture, révèle des témoignages troublants et des affirmations de liens avec des personnalités politiques influentes en Afrique de l’Ouest, notamment au Sénégal. Ces révélations, bien que partiellement invérifiables, ouvrent un débat inquiétant sur l’existence persistante de crimes rituels dans la région.
Un réseau occulte infiltré
Le cœur de l’enquête repose sur l’infiltration d’un homme présenté dans le reportage sous le nom de « Kanu », un herboriste sierra-léonais qui se décrit lui-même comme un praticien juju, une forme de magie traditionnelle utilisée dans certaines cultures d’Afrique de l’Ouest. Devant les caméras cachées des journalistes, Kanu affirme pouvoir obtenir et fournir des parties de corps humains destinées à des rites supposés apporter richesse, protection ou puissance politique. Il évoque même des tarifs précis : selon lui, un sacrifice humain impliquant un membre ou un crâne pourrait coûter plusieurs dizaines de millions de leones, la monnaie sierra-léonaise.
La vidéo dévoile des séquences particulièrement choquantes : Kanu exhibe un crâne humain ainsi que d’autres restes qu’il affirme avoir préparés pour des clients. Il détaille aussi les conditions de réalisation de ces rituels, décrivant des pratiques qui, selon le reportage, impliqueraient des victimes assassinées spécifiquement pour alimenter ce trafic. L’un des aspects les plus sensibles du reportage concerne les affirmations de Kanu sur l’identité de certains de ses clients. Il assure travailler pour des hommes extrêmement influents, notamment en Afrique de l’Ouest.
Des crimes rituels toujours présents en Sierra Leone
Parmi eux, il cite de « grands politiciens », incluant, selon ses mots, des personnalités sénégalaises de premier plan. Il affirme également être particulièrement sollicité durant les périodes électorales, période qu’il décrit comme « très chargée », son lieu de travail étant alors « rempli de monde ». Kanu prétend aussi se déplacer régulièrement à travers la Sierra Leone pour accomplir diverses demandes de ces clients, insinuant l’existence d’un réseau organisé autour de pratiques occultes. Ses déclarations ne précisent toutefois ni les noms, ni les fonctions de ces individus, rendant leur vérification difficile.
La BBC souligne d’ailleurs explicitement qu’elle n’a pas été en mesure de confirmer ces allégations concernant de hauts responsables politiques, et que ces affirmations reposent uniquement sur les propos de l’individu infiltré. Le reportage s’inscrit dans un contexte où les crimes rituels demeurent un problème persistant en Sierra Leone, notamment dans les zones rurales. Des familles endeuillées témoignent régulièrement de disparitions ou de meurtres dont les circonstances rappellent ces pratiques occultes. Certains cas impliquent des enfants, renforçant l’inquiétude des communautés locales et la pression sur les autorités.
Une problématique qui interroge jusqu’au Sénégal
Si certaines de ces affaires restent non résolues, les organisations locales et internationales soulignent la nécessité d’investigations approfondies et d’une coopération régionale, car les réseaux liés aux pratiques rituelles peuvent s’étendre au-delà des frontières nationales. L’évocation du Sénégal dans cette affaire met à nu l’existence de flux occultes et de trafics transfrontaliers. Bien que rien ne prouve que des responsables sénégalais aient été impliqués, les accusations de Kanu réveillent des débats dans le pays sur la persistance des pratiques mystiques dans certains milieux politiques.
D’un point de vue institutionnel, le Sénégal a pourtant renforcé depuis plusieurs années son arsenal juridique contre la traite des êtres humains, avec des lois et des structures de prévention mises en place pour lutter contre l’exploitation, le trafic et les réseaux criminels. Des analyses régionales montrent également que l’Afrique de l’Ouest reste exposée à des flux financiers illicites issus de trafics divers, migrants, substances, voire exploitation humaine, qui peuvent brouiller la visibilité des autorités et favoriser l’émergence de réseaux clandestins.
Entre mythe, réalité et zones d’ombre
Ce reportage soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses définitives. S’il documente la réalité du trafic de parties de corps humains en Sierra Leone, les déclarations concernant des responsables politiques étrangers demeurent, elles, largement invérifiables. La prudence est donc de mise pour éviter toute conclusion hâtive ou diffamatoire. Il n’en demeure pas moins que les images et les témoignages mis au jour par la BBC révèlent une violence extrême et une exploitation humaine brutale, nourries par des croyances mystiques et parfois par une quête de pouvoir.





