RDC : une attaque meurtrière contre une église en Ituri relance les inquiétudes sur les violences des ADF


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Des rebelles ADF
Des rebelles ADF

Dans la nuit du samedi 26 au dimanche 27 juillet 2025, une attaque d’une extrême violence a été perpétrée dans la localité de Komanda, située à plus de 70 kilomètres au sud de Bunia, en Ituri, dans le nord-est de la République Démocratique du Congo (RDC). Au moins 40 civils ont été tués dans l’enceinte même de l’église catholique de la paroisse Bienheureuse Anuarite, selon un bilan provisoire. L’attaque est attribuée aux rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe affilié à l’État islamique.

Une cérémonie religieuse transformée en bain de sang

Vers 1h00 du matin, alors que des fidèles se rassemblaient pour préparer une « croisade eucharistique », une cérémonie prévue le dimanche, des hommes armés ont fait irruption dans l’église. D’après les témoignages recueillis par des sources locales, les assaillants ont ouvert le feu à bout portant sur les fidèles, tandis que d’autres ont été tués à la machette. Une trentaine de personnes se trouvaient dans l’église au moment de l’assaut.

Christophe Munyanderu, coordonnateur de la Convention pour le respect des droits de l’homme (CRDH), a condamné l’atrocité de l’acte : « Ils ont tiré à bout portant sur les chrétiens ». Jean Katho Toyabo, chef coutumier de Komanda, a pour sa part indiqué que plusieurs jeunes ont été enlevés, et que des habitations ont été incendiées. Au matin, l’horreur était encore visible dans les rues de Komanda, où plusieurs corps gisaient au sol. En signe de deuil et de protestation, toutes les églises de la région sont restées fermées ce dimanche.

Les ADF, une menace persistante dans l’est de la RDC

Les ADF sont un groupe armé d’origine ougandaise, initialement formé pour s’opposer au régime de Yoweri Museveni en Ouganda. Réfugiés dans l’Est de la RDC depuis les années 1990, les ADF ont progressivement perdu leur objectif initial pour devenir une organisation djihadiste affiliée à l’État islamique depuis 2019. Ils sont considérés comme l’un des groupes les plus violents opérant dans la région, en particulier dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu.

Les attaques contre les civils sont devenues leur principale stratégie. Le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme (BCNUDH) a documenté des centaines de massacres attribués aux ADF, souvent perpétrés de nuit, et visant des villages isolés, des écoles, des marchés ou des lieux de culte. Le caractère religieux de l’attaque de Komanda souligne une tendance inquiétante : la radicalisation croissante du groupe et sa volonté de semer la terreur dans les communautés chrétiennes.

Des précédents tragiques dans une région en crise

Depuis le début du mois de juillet 2025, au moins 82 civils ont été tués dans des attaques similaires en Ituri et dans le Nord-Kivu, selon un communiqué récent de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en RDC (Monusco). En janvier 2023, une attaque revendiquée par les ADF contre une église pentecôtiste à Kasindi, dans le Nord-Kivu, avait déjà fait plus de 15 morts et une vingtaine de blessés. En mars 2024, un village entier près de Mambasa avait été réduit en cendres, faisant plus de 60 morts, majoritairement des femmes et des enfants.

Ces massacres récurrents sont la preuve de l’incapacité persistante de l’État congolais à assurer la sécurité de ses citoyens dans les zones rurales de l’est. Malgré l’état de siège décrété en mai 2021 dans l’Ituri et le Nord-Kivu, et la présence de forces conjointes (notamment avec l’armée ougandaise), les ADF continuent de frapper avec une efficacité redoutable.

Réactions et appels à l’action

La Monusco a fermement condamné l’attaque de Komanda, tout comme plusieurs organisations de la société civile congolaise. Néanmoins, la population locale exprime une lassitude face à l’inefficacité des forces armées et de la communauté internationale. « Nous enterrons nos morts chaque semaine, et personne ne vient vraiment à notre secours », déplore un habitant de Komanda.

Des voix s’élèvent également pour demander une refonte complète de la stratégie militaire dans l’est du pays, ainsi qu’une meilleure coordination avec les partenaires régionaux, notamment l’Ouganda, qui est également affecté par la menace des ADF. En attendant, les populations de l’Ituri et du Nord-Kivu vivent dans la peur, à la merci de groupes armés.

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Très attaché à l’Afrique Centrale que je suis avec une grande attention. L’Afrique Australe ne me laisse pas indifférent et j’y fais d’ailleurs quelques incursions
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