
Dans une République démocratique du Congo secouée par des décennies de conflit, l’évacuation de centaines de militaires et policiers congolais désarmés depuis Goma vers Kinshasa marque un tournant inattendu. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), en tant qu’intermédiaire neutre, assure la délicate opération, fruit d’un accord inédit entre le gouvernement congolais, les rebelles du M23, la MONUSCO et l’AFC.
Ce transfert soulève à la fois des espoirs de désescalade et des inquiétudes sur la fragilité persistante de l’est du pays.
Une opération humanitaire sous haute tension
Depuis la chute de Goma, capitale du Nord-Kivu, aux mains des rebelles du M23 le 26 janvier dernier, des centaines de soldats congolais ont trouvé refuge sur une base de la MONUSCO. Désarmés et encerclés, ils ont attendu pendant des mois une solution pour quitter cette zone désormais sous contrôle rebelle. Dans ce contexte, le CICR, sollicité par l’ensemble des parties, a lancé une opération d’envergure afin de les évacuer vers Kinshasa. Près de 800 militaires, dont trois généraux, ainsi qu’une centaine de policiers et leurs familles, sont concernés par cette mission. Le trajet, qui dépasse les 1 600 kilomètres, reste secret pour des raisons de sécurité.
Un symbole de neutralité et de dialogue
L’implication du CICR souligne le rôle central que peuvent jouer les acteurs humanitaires dans un conflit aussi complexe que celui de l’est de la RDC. L’organisation agit comme un intermédiaire neutre, capable de faciliter des solutions à des enjeux humanitaires délicats. Sans fixer les termes des accords, elle en assure la mise en œuvre dans le strict respect du droit international humanitaire. Pour les soldats évacués, épuisés par des mois d’attente et d’encerclement, cette opération constitue un véritable soulagement, à la fois physique et moral.
Un contexte explosif à l’est de la RDC
Malgré une évacuation pacifique, la situation sécuritaire reste critique dans l’est du pays. En effet, les combats se poursuivent entre l’armée congolaise, appuyée par des milices locales, et le M23. Plusieurs zones sont touchées, notamment Kaziba, dans le Sud-Kivu. Par ailleurs, le M23, que des experts de l’ONU disent soutenu par le Rwanda, contrôle désormais une grande partie du Nord-Kivu. Le groupe rebelle affiche clairement son ambition de progresser vers la capitale. De plus, le retrait récent des troupes étrangères de la SADC, qui avaient échoué à défendre Goma, renforce les doutes sur la capacité de l’armée congolaise à reprendre le contrôle.
Une crise humanitaire toujours plus grave
Derrière ce transfert militaire se cache une crise humanitaire d’une ampleur tragique. En République démocratique du Congo, plus de sept millions de personnes ont été contraintes de fuir leur foyer. Ce chiffre marque un triste record sur le continent africain. Le conflit, enraciné depuis les années 1990 à la suite du génocide rwandais, a déjà causé plus de six millions de morts. Tous les camps sont accusés de crimes de guerre, de viols et d’exécutions sommaires. Une commission du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies mène actuellement une enquête sur ces atrocités.