
L’Est de la République Démocratique du Congo s’enfonce dans une crise multidimensionnelle où conflits armés, violations massives des droits humains et déplacements forcés se conjuguent sans relâche. Entre l’offensive persistante du M23, les rivalités régionales et l’échec des processus de paix, la région vit au rythme de l’instabilité. Malgré les efforts diplomatiques et les accords de cessez-le-feu, les violences continuent de frapper durement les civils, pris en étau entre les différents belligérants. Une situation alarmante qui appelle une réponse urgente, à la fois politique, sécuritaire et humanitaire.
Depuis plus de deux décennies, l’est de la République Démocratique du Congo reste enlisé dans un cycle de violences armées, où les populations civiles sont les premières victimes d’un conflit aux racines complexes. Récemment, le gouvernement congolais a renouvelé ses accusations à l’encontre du Mouvement du 23 mars (M23), un groupe rebelle accusé de graves atteintes aux droits humains et de recruter de jeunes Congolais contre leur gré pour renforcer ses rangs.
Un conflit sans fin dans l’est du pays
Les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, frontalières du Rwanda et de l’Ouganda, sont depuis longtemps le théâtre d’affrontements entre forces gouvernementales, groupes armés rebelles et milices locales. La recrudescence des activités du M23 depuis 2021 a ravivé les tensions dans cette région déjà marquée par l’instabilité. Ce groupe rebelle, dont la résurgence aurait été facilitée par un appui présumé du Rwanda, accusation que Kigali rejette systématiquement, a rapidement conquis une partie significative du territoire.
Les villes stratégiques de Goma et Bukavu, longtemps considérées comme des bastions de l’autorité congolaise dans l’Est, sont tombées sous le contrôle de la rébellion plus tôt cette année, marquant un tournant important dans l’évolution du conflit. Cette avancée territoriale a fragilisé davantage les institutions locales et mis à mal les efforts de paix.
Une population civile prise au piège
Les civils se retrouvent au cœur de ce conflit, souvent sans protection ni assistance. Le gouvernement congolais a dénoncé une série de violations graves commises par les groupes armés dans les zones sous leur contrôle. Selon les autorités, ces violations comprennent des enlèvements, des exécutions extrajudiciaires, des violences sexuelles, et surtout, la conscription forcée de jeunes garçons et filles dans les rangs des combattants.
Le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, a exprimé sa préoccupation face à la persistance de ces abus. Lors d’une conférence de presse à Kinshasa, il a souligné que les atteintes aux droits fondamentaux ne cessent de s’aggraver, malgré les initiatives de paix entreprises au niveau national et régional. Il a notamment mentionné l’existence d’une administration parallèle imposée par les rebelles dans les territoires qu’ils contrôlent, ce qui complique davantage la tâche du gouvernement central pour restaurer l’autorité de l’État.
Un cessez-le-feu contesté et fragile
Dans une tentative de désescalade, un accord de cessez-le-feu a été signé, en juillet dernier, à Doha, entre le gouvernement congolais et plusieurs factions armées, dont le M23. Intitulée « Déclaration de principes », cette trêve visait à mettre fin aux hostilités et à ouvrir la voie à une résolution politique durable. Pourtant, les combats n’ont pas cessé sur le terrain. Les deux parties s’accusent mutuellement de violer les termes de l’accord. Ce qui jette un doute sur la sincérité des engagements pris à Doha.
Le ministre Shabani a admis que le respect du cessez-le-feu demeure un « défi majeur », notamment en raison du manque de mécanismes de surveillance efficaces et du manque de confiance entre les différents acteurs impliqués. Cette réalité remet en question la viabilité des négociations de paix actuelles, qui peinent à traduire les engagements diplomatiques en changements concrets sur le terrain.
Des accusations partagées entre groupes armés
Si le M23 est régulièrement pointé du doigt par Kinshasa, d’autres groupes armés ne sont pas en reste. Amnesty International, dans un rapport publié récemment, a documenté de nombreuses atrocités commises par diverses factions, y compris les milices pro-gouvernementales comme les Wazalendo. Ces exactions comprennent des violences sexuelles en réunion, des assassinats arbitraires et des enlèvements à grande échelle.
Ce qui rend la situation encore plus difficile à résoudre, car elle montre que les responsabilités sont partagées. Dans ce contexte, les victimes sont souvent abandonnées à leur sort, entre silence, impunité et traumatismes non pris en charge.
Une réponse humanitaire insuffisante
Des millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays, vivant dans des conditions précaires, sans accès à l’eau potable, à l’éducation ni aux soins médicaux de base. Les ONG présentes sur le terrain peinent à répondre à la demande, en raison des risques sécuritaires et du manque de financement.
Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a, à plusieurs reprises, alerté sur la gravité de la situation, appelant à une mobilisation plus forte des acteurs internationaux pour soutenir les populations affectées et faire pression sur les parties en conflit.