Présidentielle 2026 : la Cour constitutionnelle écarte les Démocrates et valide deux duos


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Boni Yayi
Boni Yayi, ancien Président du Bénin

La publication par la Cour constitutionnelle de la liste définitive des candidats à la Présidentielle de 2026 recompose en profondeur le paysage politique béninois. En ne validant que deux duos, l’institution réduit drastiquement la compétition et confirme l’exclusion du principal parti d’opposition, au terme de semaines de controverses juridiques. Cette configuration inédite place désormais le scrutin sous le signe d’un duel entre la mouvance au pouvoir et une opposition modérée.

La scène politique béninoise vient de connaître un tournant décisif. Le jeudi 13 novembre 2025, la Cour constitutionnelle a publié la liste définitive des candidatures recevables pour l’élection présidentielle du 12 avril 2026. À la surprise générale, et dans une forme de confirmation d’un scénario redouté depuis plusieurs semaines, seuls deux duos présidentiels ont franchi l’ensemble des étapes du processus électoral. Cette décision met fin de manière définitive aux espoirs du principal parti d’opposition, Les Démocrates, qui se retrouve écarté du scrutin après une bataille juridique intense.

Deux tickets seulement validés pour le scrutin de 2026

Après avoir examiné les recours et vérifié les dossiers transmis par la Commission électorale nationale autonome, la Cour constitutionnelle a confirmé deux candidatures. La première est celle formée par Romuald Wadagni et Mariam Chabi Talata, choisis pour représenter la mouvance présidentielle. Wadagni, ministre de l’Économie et des Finances et proche collaborateur du Président Patrice Talon, apparaît comme le dauphin naturel du chef de l’État. Il est accompagné de l’actuelle vice-présidente, reconduite comme colistière.

La seconde candidature retenue est celle de Paul Hounkpè et de Judicael Hounwanou, présentés par le parti Forces Cauris pour un Bénin Émergent, une formation désormais classée dans l’opposition dite modérée. Ces deux candidatures avaient déjà été sélectionnées par la CENA, et la Cour constitutionnelle n’a fait que confirmer ce premier filtrage. Leur validation définitive marque une étape importante, puisque seules deux forces politiques restent désormais en lice pour la compétition électorale.

La chute des Démocrates : un parrainage en moins et tout bascule

Le dossier du parti Les Démocrates constituait l’un des principaux enjeux de ce cycle électoral. Leur candidature reposait sur le duo conduit par Me Renaud Agbodjo, mais un détail administratif a finalement fait basculer la situation. Selon le Code électoral, chaque ticket présidentiel doit obtenir 28 parrainages d’élus, alors que la formation d’opposition n’en a présenté que 27 jugés valides.

La controverse s’est focalisée sur le parrainage de Michel François Oloutoyé Sodjinou. Après avoir remis son formulaire au parti, cet élu a demandé son retrait en saisissant la justice. La Cour constitutionnelle a examiné ce revirement en profondeur et a conclu que la remise d’un formulaire ne constitue pas un parrainage formel. Elle a rappelé qu’un élu conserve la liberté de retirer son soutien tant que le dossier de candidature n’a pas été officiellement déposé à la CENA. Comme le retrait est intervenu avant cette étape, il a été jugé valable.

Un paysage politique réduit à deux pôles

La Cour a donc estimé que les Démocrates n’avaient pas atteint le seuil requis et qu’aucune violation de la Constitution ni du Code électoral n’avait été commise. Ce verdict, lourd de conséquences, exclut purement et simplement le principal parti d’opposition du scrutin présidentiel. Avec cette décision, l’élection présidentielle de 2026 se jouera entre deux visions opposées du pays. D’un côté, la continuité, incarnée par Romuald Wadagni, présenté comme l’héritier du bilan économique du Président Talon.

De l’autre, une alternance modérée portée par Paul Hounkpè et la FCBE, désormais seule formation pouvant se prévaloir d’un véritable statut d’opposition dans ce scrutin. Cette réduction du champ politique transforme profondément les dynamiques électorales. La compétition semble plus ouverte pour les soutiens de la mouvance présidentielle, tandis qu’elle apparaît bien plus limitée pour les électeurs souhaitant une rupture franche avec la gouvernance actuelle.

Indignation et résignation chez Les Démocrates

La décision de la Cour a déclenché une forte indignation au sein des Démocrates. Leur conseil juridique, Me Victorin Fadé, a dénoncé ce qu’il décrit comme une dérive préoccupante, estimant que le pluralisme politique est affaibli et que la démocratie béninoise risque d’en pâtir. Pour de nombreux militants, cette exclusion est perçue comme un nouvel épisode dans ce qu’ils considèrent comme un verrouillage progressif du paysage politique. À la sortie de la juridiction, les membres du parti affichaient une profonde déception.

Le candidat écarté, Me Agbodjo, a préféré garder le silence, signe d’une formation politique visiblement éprouvée par ce verdict et sans perspective immédiate de participation au scrutin. À cinq mois du vote, le climat politique s’annonce tendu. La campagne électorale se déroulera sans la principale force d’opposition, ce qui soulève des questions sur la représentativité et la légitimité d’une élection réduite à deux candidatures. La société civile, les observateurs électoraux et plusieurs partenaires internationaux suivront de près les prochaines étapes.

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Très attaché à l’Afrique Centrale que je suis avec une grande attention. L’Afrique Australe ne me laisse pas indifférent et j’y fais d’ailleurs quelques incursions
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