RDC – Rwanda : Tshisekedi tend la main à Kagame pour sortir de l’impasse dans l’Est du Congo


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Paul Kagamé et Félix Tshisekedi
Paul Kagamé et Félix Tshisekedi

Alors que la région de l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) est secouée par de nouvelles flambées de violence, le Président congolais Félix Tshisekedi a lancé, ce 9 octobre 2025, un appel retentissant à la paix depuis Bruxelles. À l’occasion d’un forum sur les investissements en Afrique, il a exhorté son homologue rwandais Paul Kagame à prendre ses responsabilités pour désamorcer les tensions. Une main tendue stratégique dans un contexte de crise prolongée.

Un appel à « la paix des braves » lancé à Bruxelles

Lors du Forum Europe-Afrique sur l’investissement, tenu à Bruxelles, Félix Tshisekedi a surpris l’assistance en interpellant directement Paul Kagame, également présent, pour qu’il s’engage personnellement dans une dynamique de paix. « Il est temps de tourner la page des conflits. Je tends la main à mon frère, le Président Kagame, pour que nous fassions ensemble la paix des braves », a déclaré Tshisekedi. Il a souligné que les deux dirigeants étaient désormais « les seuls capables » d’interrompre l’escalade des violences qui ravagent l’Est de la RDC.

Cette déclaration intervient alors que les tensions militaires sont à leur comble dans la région du Kivu, où les affrontements entre l’armée congolaise et les rebelles du M23 (AFC/M23) ont repris ces dernières semaines. Depuis plus d’une décennie, le groupe armé AFC/M23 déstabilise la région orientale de la RDC. Kinshasa accuse Kigali de soutenir militairement et logistiquement ces rebelles, ce que le Rwanda continue de démentir officiellement.

Le M23, au cœur du conflit

Dans son discours, le président congolais a exhorté Kagame à « donner l’ordre aux troupes du M23 de cesser l’escalade ». Pour Tshisekedi, ce serait un geste décisif vers une paix durable dans la région. Il a rappelé les millions de victimes des conflits armés dans l’Est du pays, appelant à « mettre fin à cette tragédie humaine ». Paul Kagame, qui s’est exprimé plus tôt dans la journée lors du même forum, a évité de répondre directement aux propos de son homologue. Il a évoqué un climat favorable aux investissements et à la paix, sans mentionner les tensions bilatérales ni le rôle du M23.

Le Rwanda maintient sa position officielle : il existe, selon Kigali, deux processus distincts, un entre la RDC et le M23 dans le cadre du processus de Nairobi, et un autre entre Kinshasa et Kigali, entamé à Washington. La diplomatie rwandaise justifie l’absence de Kagame à une précédente rencontre à Luanda par le refus de Kinshasa d’inclure un dialogue avec le M23, en contradiction avec les termes préalablement discutés.

L’impasse diplomatique s’enlise

Malgré les initiatives menées par des médiateurs africains et internationaux, les négociations semblent au point mort. Le Président angolais Joao Lourenço, facilitateur du processus de Luanda, avait tenté de rapprocher les deux camps. Tshisekedi affirme que l’accord de paix était sur le point d’être signé, mais a été compromis par l’absence inattendue du président rwandais.

La RDC insiste sur la nécessité d’obtenir des garanties sécuritaires avant toute avancée sur d’autres plans, notamment économiques. Le gouvernement congolais a ainsi refusé de signer un cadre de coopération économique négocié à Washington tant que la question sécuritaire ne serait pas résolue. L’Est de la RDC, notamment les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, regorge de ressources naturelles précieuses : coltan, or, cobalt… Un enjeu économique majeur qui attise depuis des décennies les convoitises régionales et alimente les conflits armés.

Une région riche mais meurtrie

Depuis janvier 2025, les rebelles du M23 ont intensifié leurs opérations, allant jusqu’à prendre temporairement le contrôle des villes stratégiques de Goma et Bukavu. Ces prises de territoires ont provoqué de nouvelles vagues de déplacés internes et une crise humanitaire alarmante. Félix Tshisekedi a insisté sur l’importance de lier la paix au développement. Selon lui, aucun investissement durable ne peut être envisagé sans une stabilisation réelle de la région. Il a exprimé son refus de séparer les questions économiques et sécuritaires, malgré la pression de certains partenaires internationaux.

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Très attaché à l’Afrique Centrale que je suis avec une grande attention. L’Afrique Australe ne me laisse pas indifférent et j’y fais d’ailleurs quelques incursions
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