La Fondation Hassan II dénonce une vague d’actes hostiles contre les Marocains d’Espagne


Lecture 4 min.
Illustration par IA violence raciste en Espagne
Illustration par IA violence raciste en Espagne

Incendie de mosquée, suspension de programmes éducatifs, restrictions religieuses : l’institution royale marocaine présidée par la princesse Lalla Meryem sort de son silence face à la multiplication des incidents anti-marocains survenus en un mois. Une première réaction officielle qui révèle l’ampleur de la détérioration des relations intercommunautaires entre les deux rives de la Méditerranée.

L’été 2025 est marqué par une escalade inquiétante des tensions intercommunautaires en Espagne. Face à la multiplication des incidents visant les ressortissants marocains, Rabat a rompu le silence par la voix de la Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l’étranger, institution prestigieuse dirigée par la princesse Lalla Meryem.

Une série d’incidents alarmants

Les événements survenus ces dernières semaines révèlent un climat de défiance croissant. L’incendie criminel présumé de la mosquée de Piera, en Catalogne, constitue l’épisode le plus grave de cette séquence troublante. Les autorités catalanes enquêtent sur cet acte qui a profondément choqué les associations musulmanes de la région.

À Torre Pacheco, dans la région de Murcie, des affrontements ont éclaté, alimentés par des discours de haine qui se sont propagés massivement sur les plateformes numériques. Ces incidents ont créé un climat de peur au sein de la diaspora marocaine, particulièrement nombreuse dans cette zone géographique.

Des mesures administratives controversées

Au-delà des violences physiques, c’est également sur le terrain institutionnel que les tensions se cristallisent. La Communauté autonome de Madrid a pris la décision controversée de retirer l’enseignement de l’arabe et de la culture marocaine du programmede ses établissements scolaires. Une possibilité qui touchait jusqu’alors douze régions espagnoles.

Cette décision, vivement critiquée par le délégué du gouvernement madrilène Francisco Martín, illustre les divisions politiques autour de ces questions. L’opposition y voit l’influence grandissante de formations comme Vox sur les politiques du Parti populaire.

La municipalité de Jumilla est devenue le symbole de ces crispations après l’adoption d’une motion restrictive concernant l’usage des équipements sportifs municipaux pour les célébrations musulmanes. Cette décision, qui pourrait faire jurisprudence, inquiète les observateurs quant à l’évolution du modèle de coexistence espagnol.

L’exécutif central n’a pas tardé à réagir, contestant juridiquement cette mesure qu’il juge contraire aux principes constitutionnels de liberté religieuse. L’affaire pourrait donc se retrouver devant le Tribunal constitutionnel.

Une diplomatie sous tension

Ces incidents interviennent dans un contexte déjà tendu entre Madrid et Rabat. Les relations bilatérales se sont refroidies après l’invitation par le Parti populaire d’un représentant du Front Polisario à son congrès estival, geste perçu comme une provocation par les autorités marocaines.

En réaction, le royaume chérifien avait temporairement suspendu le fonctionnement des postes frontières avec les enclaves de Ceuta et Melilla, mesure symbolique mais révélatrice de l’état des relations diplomatiques.

La réponse mesurée de Rabat

Dans sa déclaration, la Fondation Hassan II déonce ces « lamentables excès ». Néanmoins, elle salue la réaction des autorités espagnoles et réaffirme sa confiance dans les valeurs démocratiques de l’Espagne.

Cette posture diplomatique vise manifestement à éviter une escalade tout en marquant clairement la préoccupation du royaume face à la dégradation de la situation de ses ressortissants.

Au-delà de l’aspect bilatéral, ces tensions révèlent des défis plus larges concernant l’intégration des communautés d’origine maghrébine en Europe. Avec plus d’un million de Marocains établis en Espagne, les enjeux dépassent largement le cadre des relations diplomatiques classiques.

La diaspora marocaine, pilier économique important pour les deux pays à travers les transferts de fonds et les investissements, se retrouve prise en étau dans ces tensions politiques grandissantes. C’est pourquoi face à cette situation préoccupante, les appels au dialogue se multiplient. Les leaders associatifs des deux communautés plaident pour un retour au calme et la préservation du modèle de coexistence qui a longtemps caractérisé les relations hispano-marocaines.

Zainab Musa
LIRE LA BIO
Zainab Musa est une journaliste collaborant avec afrik.com, spécialisée dans l'actualité politique, économique et sociale du Maghreb et de l'Afrique de l'Ouest. À travers ses enquêtes approfondies et ses analyses percutantes, elle met en lumière des sujets sensibles tels que la corruption, les tensions géopolitiques, les enjeux environnementaux et les défis de la transition énergétique. Ses articles traitent également des évolutions sociétales et culturelles, notamment à travers des reportages sur les figures influentes du Maroc et de l’Algérie. Son approche rigoureuse et son regard critique font d’elle une voix incontournable du journalisme africain francophone.
Newsletter Suivez Afrik.com sur Google News