
Le 2ème Sommet africain sur le climat (ACS2) s’est ouvert le 8 septembre 2025 à Addis-Abeba, en Éthiopie, dans un contexte marqué par l’urgence climatique mondiale et les inégalités structurelles que subit l’Afrique face aux enjeux environnementaux. Organisé conjointement par la Commission de l’Union africaine (UA) et le gouvernement éthiopien, cet événement de trois jours a réuni chefs d’État, représentants d’organisations internationales, société civile, jeunes leaders, chercheurs, ONG et partenaires de développement.
Le thème du sommet, « Accélérer les Solutions Climatiques Mondiales : Financement pour le Développement Résilient et Vert de l’Afrique », souligne l’ambition du continent : ne plus rester à la marge des décisions mondiales, mais bien s’imposer comme un acteur central des solutions climatiques, tout en revendiquant ses droits historiques et financiers.
Climat, justice et héritage colonial : une même lutte
Dès l’ouverture du sommet, Mahmoud Ali Youssouf, président de la Commission de l’UA, a donné le ton : il ne saurait y avoir de justice climatique sans justice historique. Il a insisté sur la nécessité pour l’Afrique et les Caraïbes d’agir ensemble sur des questions fondamentales : la reconnaissance des crimes coloniaux, les réparations justes, et l’élimination des injustices structurelles qui perpétuent l’appauvrissement des pays du Sud.
Une prise de position forte, appuyée par Carla Barnett, secrétaire générale de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), qui a qualifié le sommet de « retour à la maison », mettant en lumière les liens historiques, culturels et politiques profonds entre les peuples africains et caribéens. Selon elle, les deux régions doivent unir leurs efforts, non seulement pour faire face à la crise climatique, mais aussi pour réformer les systèmes financiers internationaux qui les maintiennent en position de dépendance.
Unité africaine et leadership climatique
À l’heure où les effets du réchauffement climatique se font sentir avec une acuité croissante, sécheresses, inondations, pertes agricoles, déplacements de population, l’Afrique veut reprendre la main sur son destin écologique et économique.
Le sommet vise ainsi à :
- Renforcer l’unité africaine face aux enjeux climatiques mondiaux ;
- Promouvoir les priorités africaines dans les grandes négociations internationales, notamment la COP30 et les réunions du G20 ;
- Mobiliser des financements climatiques équitables, adaptés aux réalités du continent ;
- Lancer des initiatives de transition énergétique, d’adaptation aux changements climatiques et de développement durable.
Le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l’Union africaine, Parfait Onanga-Anyanga, a lui aussi salué une « rencontre historique » et une opportunité unique de coopération sud-sud, notamment dans des domaines comme le commerce, la science, la technologie, le tourisme ou la justice environnementale.
Financement climatique : l’éternel défi
Au cœur du sommet : le financement, pierre angulaire de toute action climatique crédible. Malgré ses faibles émissions globales (moins de 4% des émissions mondiales), l’Afrique est le continent le plus vulnérable aux effets du changement climatique, tout en étant le moins financé pour faire face à cette menace.
Le sommet ambitionne de mobiliser des milliards de dollars d’investissements verts, via des partenariats public-privé, des fonds multilatéraux et des financements innovants. La Déclaration d’Addis-Abeba, attendue à la fin du sommet, devrait formaliser ces engagements financiers et politiques, tout en réaffirmant l’exigence d’équité et de justice climatique dans les négociations internationales.
Coopérations Sud-Sud : une nouvelle dynamique
Un des aspects novateurs du sommet est l’ouverture stratégique vers les Caraïbes, souvent considérées comme une extension culturelle, historique et géopolitique de l’Afrique. Ce rapprochement vise à bâtir un front commun face aux puissances traditionnelles, tout en valorisant des approches décoloniales de la coopération internationale.
Des domaines tels que la santé, le commerce équitable, les transports durables, mais aussi la recherche scientifique et l’innovation technologique ont été identifiés comme prioritaires pour cette nouvelle coopération. Il s’agit non seulement de défendre ensemble leurs intérêts dans les enceintes mondiales, mais aussi de co-construire des solutions adaptées aux réalités locales, au-delà des modèles imposés depuis l’extérieur.
Une voix forte pour la jeunesse et la société civile
Le sommet ne se limite pas aux hautes sphères diplomatiques. Il accorde une place centrale à la jeunesse, les femmes, et la société civile, considérés comme des acteurs clés de la transformation écologique. Des groupes de jeunes leaders ont pris la parole pour dénoncer l’inaction climatique des pays riches et appeler à des politiques courageuses en Afrique, tournées vers l’innovation verte, l’agriculture durable et l’emploi local.
La Semaine du Climat 2025, organisée en amont du sommet, a permis de faire émerger de nombreuses idées concrètes, qui seront intégrées dans les travaux du sommet. Des rapports de référence seront également publiés à cette occasion, dressant un état des lieux des vulnérabilités, mais aussi des potentiels immenses de l’Afrique en matière d’énergies renouvelables, de biodiversité et de résilience climatique.
En route vers la COP30 et au-delà
À quelques mois de la COP30, prévue au Brésil, l’Afrique veut faire entendre sa voix avec fermeté, portée par une position commune et une stratégie offensive. Le 2e Sommet africain sur le climat se présente donc comme une étape clé dans la consolidation d’un leadership africain sur les enjeux climatiques.
L’objectif est clair : ne plus être les oubliés des négociations internationales, mais bien les acteurs de leur propre transition, tout en exigeant réparation, justice et partenariats équitables. La Déclaration d’Addis-Abeba devrait ainsi poser les jalons d’une diplomatie climatique panafricaine, plus solidaire, plus audacieuse, et tournée vers un avenir réellement durable.
L’Afrique se lève pour la justice climatique
Le Sommet africain sur le climat d’Addis-Abeba marque un tournant. Face à la montée des périls climatiques et à l’inaction persistante des grandes puissances, l’Afrique s’organise, s’affirme, et trace sa propre voie. Un chemin fait de coopération, de mémoire historique, de résilience et d’innovation.