
L’exil d’Umaro Sissoco Embaló au Maroc ouvre un nouveau chapitre dans la crise qui secoue la Guinée-Bissau depuis la prise de pouvoir de la junte militaire. En acceptant d’héberger l’ancien Président renversé, Mohammed VI confirme le positionnement du royaume comme acteur des équilibres régionaux et interlocuteur privilégié lors des transitions sensibles. L’arrivée discrète d’Embaló à Rabat illustre l’intensité des tractations diplomatiques en coulisses et fait ressortir les tensions politiques qui traversent aujourd’hui Bissau.
L’ex-Président de Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embaló, évincé à la suite d’un coup d’État militaire, a finalement trouvé un refuge sûr au Maroc, où le roi Mohammed VI a accepté de l’accueillir. Son arrivée à Rabat, mercredi, marque une nouvelle étape dans la crise politique bissau-guinéenne et renforce une fois de plus le rôle du Maroc comme terre d’accueil de dirigeants en exil et acteur clé de la stabilité régionale.
Une arrivée sous haute discrétion après un périple diplomatique
Selon plusieurs sources concordantes, Embaló a quitté Bissau à bord d’un avion spécialement dépêché par le Sénégal, première étape d’un parcours diplomatique compliqué. Après Dakar, l’ancien Président a transité par Brazzaville, en République du Congo, avant de rejoindre Rabat sous protection marocaine. Ce déplacement silencieux mais soigneusement orchestré révèle l’ampleur des négociations menées dans la région après la prise de pouvoir brutale de la junte bissau-guinéenne.
Il confirme également les liens étroits qu’entretient Embaló avec plusieurs chefs d’État africains, dont le roi Mohammed VI, qui lui a ouvert les portes du royaume dans un contexte particulièrement sensible. En acceptant de recevoir l’ancien chef d’État, le souverain marocain envoie un signal politique fort. Le Maroc, engagé dans une diplomatie africaine active depuis plusieurs années, se positionne comme un médiateur capable de protéger, d’apaiser et de favoriser la stabilité dans une région secouée par les putschs à répétition.
Un coup d’État éclair qui a plongé Bissau dans l’incertitude
L’accueil d’Embaló s’inscrit dans la continuité de cette stratégie d’influence. Rabat apparaît comme un espace sécurisé où dirigeants et opposants trouvent une neutralité nécessaire pour traverser les périodes de transition politique. D’après certaines estimations circulant au sein des cercles diplomatiques africains, Embaló pourrait séjourner jusqu’à un an dans la capitale marocaine, durée correspondant à la transition annoncée par les militaires en Guinée-Bissau.
D’autres sources évoquent l’éventualité d’un exil temporaire au Portugal, l’ancienne puissance coloniale de son pays. Mais pour l’heure, c’est bien Rabat qui accueille le dirigeant renversé. Le 26 novembre, un groupe se présentant comme le « Haut commandement militaire pour le rétablissement de l’ordre » a annoncé avoir pris les rênes du pays à la télévision d’État. Le lendemain, le général Horta N’Tam prêtait serment comme président de la transition, officialisant la rupture avec le régime Embaló.
Des élections contestées à l’origine de la chute
La junte n’a pas tardé à former un gouvernement complet : Ilídio Vieira Té, ancien ministre des Finances d’Embaló, a été reconduit mais cette fois en tant que Premier ministre et ministre des Finances. Le 30 novembre, il dévoilait une équipe de transition composée de 22 membres, chargés de gérer un pays plongé dans une rare volatilité politique, même selon les standards bissau-guinéens. Le brasier politique avait commencé à s’allumer quelques jours auparavant, lors des élections législatives et présidentielle du 23 novembre.
Embaló, candidat à sa propre succession, avait revendiqué une victoire nette, 65% des voix, selon son propre camp, avant même la publication des résultats officiels. Son principal rival, l’indépendant Fernando Dias da Costa, avait immédiatement proclamé sa propre victoire. Cette dualité explosive a fourni le prétexte idéal à l’armée pour intervenir et « restaurer l’ordre », selon sa terminologie.





