Élections en Guinée-Bissau : Embaló en position de force face à un scrutin sous tension


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Umaro Sissoco Embalo, Président de la Guinée-Bissau
Umaro Sissoco Embalo, Président de la Guinée-Bissau

La Guinée-Bissau s’apprête à voter dans un climat lourd, où les tensions politiques n’ont jamais semblé aussi vives depuis des années. Avec l’exclusion de l’opposition historique, le scrutin apparaît profondément déséquilibré, ce qui renforce la position déjà avantageuse du président sortant Umaro Sissoco Embaló. Les électeurs espèrent malgré tout un vote capable de stabiliser un pays miné par les crises et les coups de force.

Les Bissau-Guinéens se rendent aux urnes ce dimanche 23 novembre pour élire leur président et leurs députés. Malgré un bilan mitigé et une instabilité politique chronique, le président sortant, Umaro Sissoco Embaló, fait figure de grand favori pour remporter un second mandat consécutif, un exploit inédit dans le pays depuis 1994.

Une course présidentielle déséquilibrée

Environ 860 000 électeurs sont appelés à choisir leur prochain dirigeant parmi 12 candidats. Cependant, la dynamique de la course a été profondément affectée par l’exclusion du principal opposant, Domingos Simões Pereira, et de son parti, le PAIGC (Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert).

La Cour suprême a rejeté la candidature de M. Pereira, ainsi que celle de la coalition autour du PAIGC pour les législatives, pour dépôt jugé tardif. L’opposition dénonce une « manipulation » et remet en question la légitimité d’Embaló, estimant que son mandat a expiré en février dernier. Cette exclusion place le président sortant en « position de force » pour remporter la victoire, d’autant qu’il a pu mener sa campagne sans les restrictions imposées à ses adversaires. Face à lui se présentent notamment l’ancien président José Mario Vaz (2014-2020) et l’opposant Fernando Dias.

Instabilité et coups de force : le bilan d’un premier mandat agité

Le premier quinquennat d’Umaro Sissoco Embaló a été jalonné de turbulences, malgré une croissance économique notable avoisinant les 5 %. Depuis son investiture, le pays a connu plusieurs tentatives de coups d’État et de « subversion », la dernière en date ayant été déjouée par l’armée fin octobre, juste avant l’ouverture de la campagne.

De plus, le mandat a été marqué par la dissolution du Parlement en décembre 2023, alors qu’il était dominé par l’opposition, permettant à Embaló de gouverner par ordonnances. Ces actions, ainsi que le report des élections, soulignent l’instabilité persistante qui ronge ce pays d’Afrique de l’Ouest.

Le défi : rompre avec la crise politique et la pauvreté

Pour la population, l’enjeu principal de cette élection est la stabilité. La Guinée-Bissau, avec ses 2,2 millions d’habitants, est l’un des pays les plus pauvres au monde, avec près de 40 % de sa population vivant sous le seuil de pauvreté.

Elle est également connue comme une plaque tournante du trafic de drogue entre l’Amérique latine et l’Europe, une activité florissante alimentée par la longue instabilité politique. Les citoyens réclament du prochain président des améliorations concrètes en matière de santé, d’éducation, d’infrastructures, d’emplois et de lutte contre la corruption.

Malgré le calme apparent de la campagne, l’Institut d’études de sécurité (ISS) et d’autres experts redoutent que l’exclusion du PAIGC ne soit un facteur de déstabilisation, pouvant entraîner, comme en 2019, des « allégations d’irrégularités » post-scrutin. En Guinée-Bissau, les problèmes politiques ont en effet souvent tendance à éclater après les élections.

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