Guinée-Bissau : la Cour suprême invalide la candidature de Domingos Simões Pereira à la présidentielle de 2025


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Domingos Simões Pereira
Domingos Simões Pereira

La Présidentielle de 2025 en Guinée-Bissau s’annonce déjà entachée de controverses. À deux mois du scrutin, l’invalidation de la candidature de Domingos Simões Pereira par la Cour suprême marque un tournant inédit et troublant dans l’histoire politique du pays. Alors que le parti historique PAIGC crie à l’injustice, cette décision relance les soupçons d’une instrumentalisation de la justice au profit du pouvoir en place.

En Guinée-Bissau, la course à l’élection présidentielle de novembre 2025 prend un tournant dramatique avec l’invalidation de la candidature de Domingos Simões Pereira, figure centrale de l’opposition et chef du Parti africain pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC). Cette décision de la Cour suprême, rendue publique le mercredi 24 septembre, crée une onde de choc dans le paysage politique national.

Un rejet basé sur des délais « irréguliers »

Selon le communiqué de la Cour suprême, la candidature de Domingos Simões Pereira aurait été déposée hors délais réglementaires, bien que la date limite officielle pour le dépôt soit fixée au jeudi 25 septembre. La Cour affirme ne pas disposer du temps nécessaire pour examiner convenablement le dossier, ni pour notifier d’éventuelles irrégularités procédurales au PAIGC.

Pourtant, selon les représentants du parti, les documents ont été déposés cinq jours avant la date butoir. L’opposant, tout juste rentré d’un exil de neuf mois à l’étranger, pensait avoir respecté les règles. « Cela ne peut pas être une position sérieuse », a-t-il déclaré, évoquant un possible « malentendu » et annonçant que les avocats du parti étudient actuellement les voies de recours.

Une première dans l’histoire du PAIGC

C’est la première fois depuis l’indépendance du pays que le PAIGC, parti historique ayant conduit la lutte pour la libération nationale, se voit écarté d’un scrutin par une décision judiciaire. Cette exclusion soulève de nombreuses questions sur l’indépendance de la justice dans le pays, notamment à un moment où les tensions politiques sont déjà palpables.

Le rejet de cette candidature intervient dans un climat institutionnel tendu. Le mercredi 24 septembre, jour de la décision, coïncidait avec la célébration du 52e anniversaire de l’indépendance de la Guinée-Bissau, un jour férié où les institutions étaient fermées. De ce fait, le PAIGC n’a pas pu déposer immédiatement un recours, et le jeudi étant la date limite de dépôt des candidatures, le parti pourrait se retrouver définitivement exclu du processus électoral.

Un processus électoral sous tension

La décision de la Cour suprême remet en question la transparence et l’équité du processus électoral. Le Président sortant, Umaro Sissoco Embaló, brigue un second mandat. Jusqu’ici, le seul candidat officiellement validé face à lui est Fernando Dias, du Parti pour la rénovation sociale (PRS), un adversaire perçu comme moins charismatique et moins rassembleur que Domingos Simões Pereira.

Avec l’élimination du leader du PAIGC, beaucoup redoutent une élection sans véritable opposition. Pour certains observateurs, cette situation pourrait ouvrir la voie à une réélection presque assurée du Président Embaló, dans un climat d’instabilité politique croissante. Si l’annonce a provoqué une forte indignation dans les cercles militants du PAIGC, cette colère peine à s’exprimer publiquement.

Silence forcé dans les rues

Depuis 2024, toute manifestation est interdite en Guinée-Bissau, limitant fortement les moyens d’action populaires et réduisant les marges de contestation face à des décisions jugées arbitraires. L’opposant Domingos Simões Pereira jouit pourtant d’une base populaire solide et d’un poids politique. Son exclusion pourrait fragiliser davantage la confiance des citoyens envers les institutions et exacerber les divisions politiques.

Pour les soutiens de Pereira, cette décision n’est pas seulement une question de procédure, mais bien le symptôme d’un système de plus en plus verrouillé par le pouvoir en place. Le fait que la justice ait invoqué un manque de temps pour traiter un dossier pourtant déposé avant la date limite laisse planer le doute sur une instrumentalisation de l’appareil judiciaire. En attendant, le Président Embaló poursuit sa campagne, dans une relative tranquillité, face à une opposition affaiblie et une justice critiquée pour son manque de neutralité.

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Une plume qui balance entre le Sénégal et le Mali, deux voisins en Afrique de l’Ouest qui ont des liens économiques étroits
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