
La tension ne retombe pas au Mali. Alors que les autorités de transition ont récemment suspendu toutes les activités politiques, les cas d’enlèvements de figures de l’opposition se multiplient. Le dernier en date : Abdoul Karim Traoré, jeune responsable du parti Codem, introuvable depuis dimanche.
Son enlèvement présumé par la Sécurité d’État confirme l’escalade autoritaire observée depuis plusieurs semaines.
Une arrestation opaque dans un climat d’intimidation
Abdoul Karim Traoré, surnommé « Exo », vice-président des jeunes de la Codem et membre actif de la coalition d’opposition Jigya Kura, a disparu le 11 mai en fin d’après-midi. Depuis, plus aucun contact. Ses proches affirment ne pas savoir où il se trouve, et aucune autorité judiciaire ne s’est exprimée sur son cas. Selon une source sécuritaire malienne, Traoré serait bien entre les mains de la Sécurité d’État, son arrestation motivée par une vidéo où il dénonçait l’enlèvement d’un autre cadre de son parti, Alhassane Abba, quelques jours plus tôt.
Un enchaînement d’enlèvements ciblés contre l’opposition
La disparition de Traoré n’est pas un cas isolé au Mali. Depuis début mai, plusieurs figures critiques à l’égard de la transition militaire ont été interpellées de manière extrajudiciaire. Alhassane Abba, secrétaire général de la Codem, a été enlevé à son domicile, tout comme El Bachir Thiam du parti Yelema, kidnappé en pleine rue à Kati. Dans tous les cas, des hommes encagoulés, sans mandat légal, agissent dans l’ombre d’un appareil sécuritaire opaque. La police et la gendarmerie, elles, nient toute implication.
Une opposition muselée sous prétexte de « maintien de l’ordre »
La suspension des activités politiques annoncée le 8 mai a été justifiée par les autorités au nom de « l’ordre public ». En réalité, elle coïncide avec une vague de contestation populaire contre la prolongation indéfinie de la transition, la dégradation des conditions de vie, les coupures d’électricité et les taxes téléphoniques. Prévu le 9 mai, un rassemblement d’envergure de l’opposition a été annulé face aux menaces sécuritaires. Une centaine de partis et mouvements avaient pourtant appelé à une mobilisation unitaire.
Des voix s’élèvent pour défendre l’État de droit
Face à cette répression croissante, l’Ordre des avocats du Mali a publié un communiqué alarmant. Il rappelle aux autorités leur devoir de respecter les libertés fondamentales garanties par la Constitution, notamment les droits d’expression, de rassemblement et d’opposition politique. Mais dans ce contexte de peur, nombreux sont les militants qui préfèrent se cacher ou fuir la capitale. Certains opposants comparent désormais le climat actuel à celui de régimes totalitaires.