L’Éthiopie accuse l’Érythrée de préparatifs militaires inquiétants pour la Corne de l’Afrique


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Drapeaux de l'Ethiopie et de l'Erythrée
Drapeaux de l'Ethiopie et de l'Erythrée

Les relations entre l’Éthiopie et l’Érythrée, déjà marquées par des décennies de méfiance mutuelle, connaissent un nouveau regain de tensions. Addis-Abeba exprime des inquiétudes croissantes concernant ce qu’elle perçoit comme des mouvements militaires suspects le long de la frontière commune, ravivant les craintes d’une escalade dans cette région stratégique de la Corne de l’Afrique.

En Ethiopie, des sources proches du  gouvernement, plusieurs indicateurs suggèrent une mobilisation inhabituelle du côté érythréen. Des observateurs locaux rapportent des déplacements de matériel militaire et un renforcement des positions défensives dans les zones frontalières, particulièrement dans les régions de Badme et Zalambessa, théâtres de violents affrontements lors de la guerre de 1998-2000.

L’Éthiopie s’inquiète particulièrement de la réactivation de certaines bases militaires érythréennes qui étaient restées en sommeil depuis la signature de l’accord de paix de 2018. Cette reprise d’activité, couplée à des exercices militaires de grande envergure menés par Asmara ces derniers mois, alimente les suspicions d’Addis-Abeba quant aux intentions belliqueuses de son voisin.

Un contexte régional complexe

Ces accusations interviennent dans un contexte particulièrement délicat pour l’Éthiopie. Le pays fait face à des défis internes multiples, notamment la reconstruction post-conflit dans la région du Tigré et la gestion de tensions ethniques persistantes dans plusieurs régions. Cette situation de fragilité relative pourrait, selon certains analystes, être perçue par l’Érythrée comme une opportunité de renégocier certains aspects du statu quo frontalier.

La question de l’accès à la mer reste également un point de friction latent. L’Éthiopie, pays enclavé depuis l’indépendance de l’Érythrée en 1993, cherche activement à diversifier ses options d’accès maritime, ce qui pourrait être interprété par Asmara comme une remise en cause des équilibres régionaux établis.

Des alliances changeantes qui compliquent la donne

L’évolution des alliances régionales ajoute une couche de complexité supplémentaire. L’Érythrée a récemment renforcé ses liens avec certains acteurs régionaux et internationaux, modifiant potentiellement les rapports de force dans la région.

Les récents développements au Soudan voisin, où le conflit interne continue de faire rage, créent également un environnement propice aux tensions transfrontalières. Les deux pays s’accusent mutuellement d’instrumentaliser la crise soudanaise à leur avantage, exacerbant ainsi les suspicions réciproques.

L’ombre persistante du passé

Malgré l’accord de paix historique de 2018 qui avait valu le prix Nobel de la paix au Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, les blessures du passé restent vives. La guerre frontalière de 1998-2000, qui a fait plus de 70 000 morts, a laissé des cicatrices profondes dans les deux sociétés. La question de la démarcation définitive de la frontière reste irrésolue, créant un terrain fertile pour les malentendus et les tensions.

Les communautés frontalières, premières victimes potentielles d’une escalade, vivent dans l’anxiété constante d’un retour aux hostilités. Les échanges commerciaux transfrontaliers, qui avaient repris timidement après 2018, connaissent à nouveau un ralentissement face à la montée des tensions.

Face à ces développements préoccupants, la communauté internationale appelle à la retenue et au dialogue. L’Union africaine et les Nations Unies suivent de près la situation, conscientes que toute escalade pourrait avoir des répercussions désastreuses sur l’ensemble de la région déjà fragile.

Masque Africamaat
Spécialiste de l'actualité d'Afrique Centrale, mais pas uniquement ! Et ne dédaigne pas travailler sur la culture et l'histoire de temps en temps.
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