
L’affaire des radiations au sommet de l’armée malienne prend une nouvelle tournure judiciaire. Neuf officiers et sous-officiers écartés en octobre ont saisi la Cour suprême pour contester les décrets pris à leur encontre. Accusés de conspiration par les autorités de transition, ils dénoncent une décision arbitraire et entachée de vices de procédure.
Les plaignants réclament l’annulation des radiations et leur réintégration au sein des forces armées.
Une contestation basée sur l’« excès de pouvoir »
La requête a été déposée le 12 décembre devant la Cour suprême du Mali. Les plaignants, parmi lesquels figurent le lieutenant-colonel Amadou Keita et le lieutenant-colonel Saybou Keita, affirment être victimes de « détournement de pouvoir » et d’« excès de pouvoir » de la part de l’exécutif militaire. Les décrets de radiation avaient été signés par le président de transition, le général Assimi Goïta, après leur arrestation en août.
Maître Mountaga Tall, l’un des avocats des militaires, a dénoncé, dans un communiqué, une série de manquements légaux dans la procédure administrative. Il cite notamment « la violation des droits de la défense », le « non-respect des règles et procédures de convocation », et « l’absence de matérialité de faute disciplinaire ». Selon des sources judiciaires, les militaires radiés n’auraient effectivement reçu aucune convocation écrite ni notification formelle de la décision et des voies de recours possibles.
La sanction prononcée pour des motifs « étrangers à la discipline »
Au-delà des vices de procédure, la contestation des neuf hauts-gradés porte sur le fond des accusations. Ils affirment qu’« aucun fait constitutif de la moindre faute n’a été prouvé » à leur encontre, ni sur le plan professionnel, ni sur le plan disciplinaire.
Les officiers dénoncent un « usage abusif du pouvoir disciplinaire » et suggérent que la sanction aurait été prononcée pour des « motifs étrangers à la discipline militaire ».
Cette action en justice survient alors qu’une procédure judiciaire parallèle est en cours. Tous les militaires radiés sont inculpés depuis la mi-novembre pour « tentative de déstabilisation » et « atteinte à la sûreté de l’État », après que leurs visages ont été exhibés à la télévision d’État.
Un contexte de purges au sein de la « grande muette »
Ce recours devant la Cour suprême s’ajoute à une actualité chargée au sein de l’armée malienne. Récemment, le Colonel Alpha Yaya Sangaré a également été radié pour « mesures disciplinaires » après la publication de son livre controversé, Mali : le défi du terrorisme en Afrique, dans lequel il exposait des failles de l’armée.
Le dépôt de ce recours pour excès de pouvoir par Maître Mountaga Tall, qui est aussi le conseil des partis politiques dissous par le régime militaire, témoigne de la persistance des tensions entre le pouvoir de transition et les voix contestataires au Mali.




