
Les pays membres de l’Alliance des États du Sahel, le Burkina Faso, le Mali et le Niger, poursuivent leur dynamique d’intégration en lançant une carte d’identité biométrique commune. Cette initiative vise à faciliter la libre circulation au sein de l’espace confédéral tout en renforçant la sécurité. Elle s’inscrit dans une volonté politique affirmée de coordination régionale. L’AES entend ainsi consolider sa souveraineté et sa coopération face aux défis sécuritaires et diplomatiques.
Les dirigeants du Burkina Faso, du Mali et du Niger, réunis sous la bannière de la Confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont franchi une nouvelle étape dans leur processus d’intégration régionale. À travers une décision commune, ils ont validé la création d’une carte d’identité biométrique partagée, destinée à être utilisée dans l’ensemble de l’espace confédéral. Cette initiative s’inscrit dans un projet d’uniformisation des documents administratifs liés à l’identité et aux déplacements. Après avoir lancé un passeport biométrique commun, les trois pays avancent vers une unification plus poussée de leurs systèmes administratifs et de sécurité.
Une réponse à des enjeux sécuritaires et d’intégration
L’annonce de cette nouvelle carte a été faite par le ministre malien de la Sécurité et de la Protection civile, Daoud Aly Mohammedine, à l’issue d’un Conseil des ministres à Bamako. Il a précisé qu’un décret instaurant et réglementant la carte d’identité biométrique AES avait été adopté, marquant ainsi une volonté politique forte de coordination interétatique. D’après le communiqué officiel, l’objectif principal est de faciliter la circulation des citoyens au sein des pays de l’AES tout en tenant compte des défis sécuritaires de la région.
L’harmonisation des normes techniques des pièces d’identité vise à renforcer la cohérence administrative et à prévenir les usages frauduleux des documents. Les ministres en charge de la sécurité des trois pays s’étaient réunis en novembre 2024 à Bamako pour définir les caractéristiques techniques que devront respecter les nouveaux documents. Ces standards harmonisés ont ensuite été formalisés, le 18 avril 2025, par une série de décisions émanant de la présidence tournante de la Confédération.
Des décisions concertées à l’échelle confédérale
Ces mesures ont abouti à l’institution officielle de deux documents clés : le passeport électronique commun, baptisé « e-passeport AES », et la Carte d’Identité biométrique de la Confédération. Ces outils sont destinés à simplifier les démarches administratives et à favoriser une meilleure coordination entre les administrations des trois pays. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont été le théâtre de coups d’État respectifs entre 2020 et 2023, balayant les anciens régimes dirigés par Ibrahim Boubacar Keïta, Roch Marc Christian Kaboré et Mohamed Bazoum.
Dans la foulée de ces changements de régime, les nouvelles autorités ont pris leurs distances avec l’ancienne puissance coloniale, la France, en exigeant le retrait de ses troupes. En parallèle, ces pays ont choisi de se désengager de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), qu’ils accusent d’ingérence. Cette rupture a été officialisée le 29 janvier dernier, date à laquelle les trois États ont annoncé leur retrait commun de l’organisation sous-régionale.
Une alliance tournée vers la souveraineté et la coopération militaire
L’AES, fondée comme une réponse à l’isolement diplomatique et aux menaces d’intervention militaire, notamment au Niger après la chute de Mohamed Bazoum, s’est structurée autour d’objectifs clairs : souveraineté, sécurité et développement économique. Parmi les projets majeurs figure la mise en place d’une force militaire conjointe de 5000 hommes. Cette armée confédérale vise à mutualiser les moyens dans la lutte contre le terrorisme, fléau qui continue de déstabiliser la région sahélienne. En parallèle, les trois pays ont annoncé la création d’une institution financière régionale : la Banque Confédérale pour l’Investissement et le Développement (BCID AES).
Celle-ci doit permettre de financer des projets d’infrastructure, soutenir l’économie locale et attirer de nouveaux partenariats économiques.En rompant avec certains cadres traditionnels de coopération régionale et internationale, les pays de l’AES cherchent de nouveaux alliés. Des discussions avancées ont été engagées avec des puissances comme la Russie, dans une volonté de diversification des partenariats et de recentrage sur des intérêts jugés plus alignés avec les ambitions souverainistes du groupement.