
Au Bénin, une importante saisie de faux médicaments a été opérée à Abomey-Calavi. Plus de 300 kg de produits contrefaits ont été découverts par la Police républicaine dans un entrepôt clandestin. Ce fléau touche une grande partie de l’Afrique. Les autorités béninoises, comme d’autres sur le continent, tentent de renforcer leur riposte face à ce danger sanitaire.
La Police républicaine du Bénin a mené une vaste opération dans la lutte contre le trafic de médicaments illicites. À Ouèdo, un quartier de la commune d’Abomey-Calavi, les agents du commissariat local ont mis la main sur un entrepôt renfermant plus de 300 kilogrammes de produits pharmaceutiques contrefaits. Cette saisie, jugée « importante » par les autorités, met en exergue l’ampleur du phénomène au Bénin et plus largement en Afrique.
Grossiste opérant en marge de toute réglementation
Les médicaments découverts dans l’entrepôt comprenaient principalement des comprimés psychotropes et d’autres substances prohibées. La propriétaire des lieux, soupçonnée d’être une grossiste opérant en marge de toute réglementation, a été arrêtée. Selon ses déclarations, les produits étaient livrés sur commande par un fournisseur situé dans le département de l’Ouémé. L’enquête, toujours en cours, vise à démanteler l’ensemble du réseau d’approvisionnement.
Depuis plusieurs années, le Bénin, comme nombre de pays africains, est confronté à une recrudescence de la circulation de médicaments falsifiés, souvent vendus à bas prix dans les marchés informels et utilisés par une population en quête de solutions accessibles. En Afrique de l’Ouest et dans d’autres régions du continent, les autorités se heurtent à des réseaux bien structurés, souvent transnationaux, qui prospèrent grâce à la faiblesse des contrôles aux frontières, la corruption, et l’absence de couverture médicale généralisée.
Opération coordonnée par Interpol dans 123 pays
Au Niger, par exemple, une opération menée en avril 2023 à Niamey a permis la saisie de près de deux tonnes de médicaments falsifiés entreposés dans un garage. Au Nigeria, pays voisin, les agences de régulation comme la NAFDAC (National Agency for Food and Drug Administration and Control) mènent régulièrement des campagnes de destruction de stocks de produits illégaux, parfois importés d’Asie ou d’Inde via des ports peu surveillés.
En 2017 déjà, l’opération « Pangea », coordonnée par Interpol et menée dans 123 pays, avait permis la saisie de 25 millions de médicaments contrefaits, dont une grande partie en Afrique subsaharienne. Ces opérations de grande ampleur ont mis à la lumière du jour l’ampleur de la criminalité pharmaceutique, souvent comparée à celle du trafic de drogue en raison de ses réseaux tentaculaires et de ses profits élevés.
Les causes profondes : pauvreté, accès limité et méfiance
La prolifération des médicaments contrefaits en Afrique s’explique par plusieurs facteurs. Le premier reste l’accès limité aux soins et aux médicaments dans les structures sanitaires officielles. Dans de nombreuses zones rurales ou urbaines défavorisées, les pharmacies sont rares, mal approvisionnées, ou financièrement inaccessibles pour une grande partie de la population.
Le second facteur tient à la méfiance envers le système de santé. Dans certains cas, les patients préfèrent se tourner vers les marchés informels ou les vendeurs ambulants pour des médicaments moins chers et disponibles sans ordonnance. Enfin, l’analphabétisme et le manque d’information sur les dangers des produits falsifiés aggravent la situation. Sur le plan judiciaire, les poursuites contre les trafiquants aboutissent rarement à des condamnations lourdes, ce qui alimente un sentiment d’impunité.
Une réponse judiciaire et sanitaire encore timide
Pourtant, les conséquences sont graves : chaque année, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 100 000 décès sont imputables aux médicaments falsifiés en Afrique. Des initiatives voient tout de même le jour pour endiguer ce fléau. Plusieurs pays africains ont rejoint des plateformes de collaboration comme la Conférence internationale des médicaments falsifiés (ICMRA) et participent à des campagnes de sensibilisation à grande échelle.
Au Bénin, le gouvernement a annoncé en 2024 la mise en place d’un plan national de lutte contre les médicaments de qualité inférieure et falsifiés (MQIF), impliquant une collaboration entre les ministères de la Santé, de la Justice et de l’Intérieur. Des efforts sont également en cours pour développer un système national de traçabilité des médicaments légaux, via des codes numériques permettant aux consommateurs de vérifier l’authenticité d’un produit.