
Dans un contexte de méfiance grandissante envers les médias, les plateformes sociales deviennent le terrain fertile de campagnes de désinformation visant les grandes rédactions françaises, notamment en Afrique francophone. France 24 et RFI, symboles d’un journalisme international de référence, sont de plus en plus souvent les cibles de détournements sophistiqués. Ces attaques soulèvent des questions profondes sur l’influence médiatique, la confiance citoyenne et la manipulation de l’opinion publique par des technologies de plus en plus accessibles.
Un phénomène qui prend de l’ampleur
À travers TikTok, Facebook ou encore WhatsApp, circulent régulièrement de prétendues « alertes » attribuées à des journalistes bien connus. Ces vidéos ou audios falsifiés sont généralement construits à partir de montages crédibles mêlant extraits d’émissions, visuels officiels et voix synthétiques créées par intelligence artificielle. Leur objectif ? Créer un effet de panique, alimenter des tensions sociales ou politiques, et surtout manipuler la perception du public.
Un exemple marquant a récemment frappé la capitale sénégalaise, Dakar, où une rumeur d’éruption volcanique imminente a inondé les réseaux. Bien que cette menace n’ait aucun fondement scientifique, elle a été relayée par une vidéo reprenant les codes visuels de France 24, mettant en scène deux journalistes de la chaîne. La fausse alerte a semé l’inquiétude, malgré les démentis rapides des autorités et des experts.
Quand la technologie sert la fiction
Ce type de désinformation n’a plus besoin de moyens démesurés. Quelques clics suffisent aujourd’hui pour générer une voix artificielle, calquer une déclaration fictive sur une image officielle, ou reproduire l’habillage graphique d’un média reconnu. Ce n’est plus seulement une question de rumeur ou de fake news traditionnelle ; il s’agit d’une mise en scène, presque cinématographique, destinée à tromper l’œil et l’oreille.
Dans certains cas, ces campagnes semblent coordonnées. Les montages sont diffusés en plusieurs langues locales, surfent sur des clivages existants ou exploitent des contextes sensibles, comme les périodes électorales, les tensions diplomatiques ou les crises sanitaires. L’image de médias français comme RFI ou France 24 est alors instrumentalisée, parfois pour nuire à leur crédibilité, parfois pour donner une légitimité à des messages politiques douteux.
Une crise de confiance en toile de fond
Ces détournements ne prospéreraient pas sans un terreau favorable : la méfiance vis-à-vis des institutions, des élites et des médias dits « occidentaux ». Dans plusieurs pays africains, notamment ceux où les tensions avec la France sont palpables, ces infox trouvent un public déjà sceptique. La désinformation devient ainsi un outil stratégique pour influencer les perceptions, et parfois même pour asseoir des discours anti-français ou nationalistes.
Mais au-delà des enjeux géopolitiques, c’est la relation entre citoyens et information qui est fragilisée. Lorsqu’un média reconnu est victime d’une telle usurpation, ce n’est pas seulement sa réputation qui est en jeu, mais aussi la capacité du public à distinguer le vrai du faux. Et cette confusion alimente une spirale dangereuse où l’opinion se forge sur des bases erronées. Face à cette offensive numérique, la réponse ne peut pas se limiter à des démentis.
Renforcer l’éducation aux médias, une urgence
Si les rédactions concernées, comme France 24 ou RFI, disposent d’équipes de vérification et de contre-attaque, cela ne suffit pas à endiguer la vague. Il devient indispensable de renforcer l’éducation aux médias, notamment auprès des jeunes générations, grandes consommatrices de contenus en ligne. Apprendre à vérifier une source, reconnaître une vidéo truquée, comprendre comment les algorithmes amplifient certaines publications : voilà les compétences nécessaires dans un monde saturé d’informations.