Procès Joseph Kabila : la nationalité du prévenu au cœur des débats


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L'ancien Président, Joseph Kabila, à Goma
L'ancien Président, Joseph Kabila, à Goma

La Haute Cour militaire de la République démocratique du Congo a clos vendredi 19 septembre les débats dans le procès intenté contre l’ancien Président, Joseph Kabila, jugé par contumace. Une affaire sans précédent, marquée par des accusations explosives, des témoins absents pour des raisons sécuritaires et une controverse centrale : la véritable nationalité de celui qui a dirigé la RDC pendant 18 ans.

La journée du vendredi 19 septembre 2025 a été marquée par la réouverture des débats dans le procès de Joseph Kabila. Ces débats étant désormais clos, le verdict est attendu dans dix jours.

Des charges lourdes, une requalification en débat

Joseph Kabila est poursuivi pour des faits de haute trahison, crimes de guerre, crimes contre l’humanité, participation à un mouvement insurrectionnel et complicité avec les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. Le ministère public, fidèle à sa ligne dure, a requis la peine de mort. Mais, la question de la nationalité du prévenu, déjà évoquée depuis le début du procès, est devenue une question centrale ayant animé l’audience de réouverture : les avocats de la partie civile ont demandé que l’accusation de trahison soit requalifiée en espionnage, arguant que Kabila n’aurait jamais eu la nationalité congolaise mais bien rwandaise.

« Il n’y a aucun doute que Kabila est un Rwandais et qu’il a gouverné le Congo comme un espion », a martelé Me Jean-Marie Kabengela, avocat de la République. Cette thèse, déjà brandie par certains opposants politiques par le passé, refait surface et est fortement soutenue au moment où la justice militaire doit trancher sur la culpabilité de l’ancien chef de l’État.

Témoins absents, sécurité en cause

L’audience de ce vendredi devait initialement entendre de nouveaux témoins. Mais aucun ne s’est présenté, les avocats de la République évoquant l’impossibilité d’assurer leur sécurité. « Comme leurs déclarations sont pléthoriques et déjà connues, nous pouvons nous-mêmes développer les éléments probants », a expliqué Me Richard Bondo, justifiant la volte-face.

Cette absence fragilise la procédure, mais n’empêche pas la partie civile de renforcer ses accusations. Elle maintient sa réclamation d’au moins 30 milliards de dollars de dommages et intérêts, contre 24 milliards précédemment, ainsi que la confiscation des biens de Joseph Kabila.

Entre mort et perpétuité : la bataille des peines

Le ministère public est resté inflexible, réclamant la peine capitale, alors que certains avocats de la partie civile ont plaidé pour la prison à vie, estimant qu’il serait plus « symbolique » que Kabila purge sa peine derrière les barreaux, confronté aux victimes et à la mémoire des crimes reprochés à son régime.

La Haute Cour militaire a mis l’affaire en délibéré et rendra sa décision dans dix jours. Une échéance qui tient le pays en haleine. Au-delà du sort judiciaire de l’ancien Président, c’est une question fondamentale qui est posée : comment juger, vingt ans après, un homme qui a incarné l’État congolais, mais qui est aujourd’hui présenté par ses accusateurs comme un étranger infiltré ?

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Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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