Nigeria et Somalie veulent un front uni face au terrorisme en Afrique


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Baterau échoué et terrorisme
Baterau échoué et terrorisme

Le Nigeria et la Somalie veulent émerger comme deux acteurs clés d’une nouvelle dynamique continentale de lutte contre le terrorisme. Cette collaboration, catalysée par une série de sommets militaires historiques, illustre la volonté croissante des nations africaines de développer des solutions endogènes face aux menaces sécuritaires qui traversent le continent.

Le Sommet d’Abuja : un rendez-vous historique

En août 2025, le Nigeria a accueilli à Abuja un sommet sans précédent réunissant les chefs d’état-major de la défense des 54 nations africaines. Cette rencontre, orchestrée par les Forces armées nigérianes, incarne une vision panafricaine de la sécurité collective. Le thème du sommet, « Combattre les menaces contemporaines à la paix et à la sécurité régionale en Afrique : le rôle de la collaboration stratégique en défense« , place la coopération au cœur des préoccupations.

Le général Christopher Musa, chef d’état-major de la défense du Nigeria, a souligné l’importance de développer des capacités locales pour répondre aux défis sécuritaires, une philosophie résumée par l’expression « solutions africaines aux problèmes africains« .

Des menaces partagées, des réponses coordonnées

Les données sont alarmantes : en 2024 seulement, le Centre de lutte contre le terrorisme de l’Union africaine a recensé plus de 3 400 attaques terroristes sur le continent, causant plus de 13 900 décès. Cette réalité brutale souligne l’urgence d’une action coordonnée.

Le Nigeria fait face à Boko Haram dans le bassin du lac Tchad, tandis que la Somalie continue de lutter contre Al-Shabaab, affilié à Al-Qaïda, dont la capacité à mener des attaques complexes contre le gouvernement somalien et les forces internationales reste intacte. Des groupes comme l’État islamique en Afrique de l’Ouest et dans le Grand Sahel ont étendu leurs zones d’opération, menaçant de contrôler un vaste territoire allant du Mali au nord du Nigeria.

L’évolution de la mission AUSSOM en Somalie

La Somalie a vu le remplacement de la Mission de transition de l’Union africaine (ATMIS) par la Mission de soutien et de stabilisation de l’Union africaine en Somalie (AUSSOM) le 1er janvier 2025, avec un effectif prévu allant jusqu’à 11 911 personnels. Le Nigeria figure parmi les pays contributeurs clés de cette mission, aux côtés de l’Égypte, de l’Éthiopie, de Djibouti, du Kenya, de la Sierra Leone et de l’Ouganda.

Lors d’un sommet tenu à Kampala en avril 2025, les pays contributeurs de troupes ont souligné le besoin d’augmenter les effectifs d’au moins 8 000 personnels supplémentaires pour faire face aux défis sécuritaires actuels. Cette demande reflète la gravité de la situation et les lacunes créées par les retraits progressifs de troupes non remplacées par des forces somaliennes comme prévu initialement.

INTERPOL a coordonné plusieurs opérations en Afrique en 2024, aboutissant à 121 arrestations pour terrorisme et infractions polycriminelles. Cette coopération internationale démontre l’importance cruciale du partage d’informations et de la coordination opérationnelle entre les forces de sécurité africaines.

Les initiatives bilatérales et multilatérales

En mai 2025, la Conférence des chefs de défense africains à Nairobi, organisée conjointement par les Forces de défense kenyanes et le Commandement américain pour l’Afrique, a réuni 37 pays africains pour discuter de stratégies antiterroristes et de sécurité maritime. Plus de 70 engagements bilatéraux ont eu lieu lors de cet événement, renforçant les liens entre les nations africaines.

Par ailleurs, la Force multinationale mixte (MNJTF) dans le bassin du lac Tchad, comprenant des troupes du Cameroun, du Tchad, du Niger et du Nigeria, continue de combattre Boko Haram malgré les défis politiques et opérationnels. Cette expérience de coopération régionale sert de modèle pour d’autres initiatives similaires sur le continent.

La cybersécurité et les nouvelles menaces

Les dirigeants militaires nigérians ont été explicites sur la nécessité de développer l’industrie de défense africaine comme moyen de réduire la dépendance vis-à-vis des entreprises étrangères. Le sommet d’Abuja a notamment présenté une vitrine de l’armement et des capacités de défense fabriqués en Afrique.

Mais au-delà du terrorisme traditionnel, les discussions ont également porté sur la cybersécurité et les menaces émergentes de la cyberguerre, ainsi que sur l’acquisition de matériel de défense, la modernisation militaire et le maintien de la paix. Cette approche holistique reconnaît la nature évolutive des menaces sécuritaires au 21e siècle.

La sécurité maritime constitue également une préoccupation vitale pour les communautés côtières confrontées à la pêche illégale et à la piraterie. Le Nigeria et la Somalie, avec leurs longues côtes stratégiques, partagent des défis similaires dans la protection de leurs espaces maritimes.

La collaboration entre le Nigeria et la Somalie dans la lutte antiterroriste s’inscrit dans une dynamique plus large de solidarité africaine. C’est dans ce cadre que vient de se dérouler la rencontre à Kigali entre le commandant des forces terrestres somaliennes, le général Sahal Abdullahi Omar, et le commandant de l’infanterie nigériane, le général Usman Abdulmumin Yusuf. Ils ont discuté du renforcement de la coopération militaire bilatérale, notamment dans la lutte conjointe contre le terrorisme, à travers l’échange d’expériences et des entraînements communs.

Masque Africamaat
Spécialiste de l'actualité d'Afrique Centrale, mais pas uniquement ! Et ne dédaigne pas travailler sur la culture et l'histoire de temps en temps.
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