Mohamed Toujgani, l’imam expulsé de retour en Belgique trois ans après son renvoi vers le Maroc


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Imam Mohamed Toujgani
Imam Mohamed Toujgani

Trois ans après son expulsion controversée, Mohamed Toujgani, ancien imam marocain de la mosquée Al Khalil à Molenbeek, est de retour en Belgique. Lundi soir, il a atterri à l’aéroport de Bruxelles-National, accueilli par un comité de soutien. L’affaire, relayée mardi par la RTBF, mêle soupçons de radicalisme, questions d’espionnage et débats sur la liberté religieuse.

L’affaire remonte à 2021, lorsqu’un arrêté d’expulsion avait été prononcé à l’encontre de Mohamed Toujgani par l’Office des étrangers. Les autorités belges l’accusaient alors de représenter une menace pour la sécurité nationale, évoquant des soupçons de radicalisme et même d’espionnage présumé au profit du Maroc. L’imam, né au Maroc mais installé en Belgique depuis les années 1980, dirigeait depuis des années la mosquée Al Khalil à Molenbeek, la plus grande du pays, jouant un rôle d’influence dans les milieux musulmans.

L’expulsion avait été mise en œuvre dans la plus grande discrétion. Aucune décision judiciaire ne l’accompagnait dans un premier temps. Ce n’est que par la suite que les éléments de l’affaire ont été rendus publics. Ce qui avait d’ailleurs suscité l’indignation de nombreux fidèles et responsables religieux.

Un homme conservateur dans ses pratiques

Contrairement à l’interprétation des services de renseignement, la justice belge n’a jamais confirmé l’existence d’un réel danger. Dès 2021, une décision judiciaire avait estimé que Mohamed Toujgani ne constituait pas une menace pour la sécurité du pays. Par ailleurs, il remplissait, selon les juges, les critères pour obtenir la nationalité belge, un droit qui lui avait été reconnu dans une décision confirmée en cassation.

Ses partisans, dont plusieurs personnalités issues du monde associatif et religieux, ont toujours défendu l’image d’un homme conservateur dans ses pratiques, mais éloigné de tout discours de haine ou de violence. Ils décrivent un imam prônant la modération et engagé dans le dialogue interreligieux, notamment dans un contexte bruxellois souvent sensible aux tensions communautaires. Mohamed Toujgani ne devrait pas reprendre immédiatement ses fonctions au sein de la mosquée Al Khalil.

Expulsion de l’imam Hassan Iquioussen

Mais son retour en Belgique pourrait néanmoins raviver le débat sur les critères d’expulsion appliqués aux responsables religieux. Le comité d’accueil qui l’attendait à l’aéroport témoigne de l’importance que conserve Toujgani au sein de certaines communautés musulmanes en Belgique. Pour ses soutiens, il s’agit d’une forme de réhabilitation, voire de justice tardive. Ces dernières années, plusieurs imams d’origine nord-africaine ont été expulsés ou interdits de séjour dans divers pays européens, souvent sur la base de soupçons liés à la radicalisation ou à l’ingérence étrangère.

En 2022, la France a expulsé l’imam Hassan Iquioussen, également d’origine marocaine, pour des propos jugés contraires aux valeurs républicaines. Ce dernier avait tenu des discours controversés sur les femmes et les Juifs, bien qu’il ait par la suite tenté de nuancer ses positions. L’affaire avait fait grand bruit, notamment en raison de la nationalité française de sa famille et de son enracinement dans le Nord de la France. En Allemagne également, des cas similaires ont été observés. À Berlin, un imam tunisien a été expulsé en 2023 après des sermons jugés radicaux, bien qu’il n’ait jamais été condamné pour des faits de terrorisme.

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Je suis passionné de l’actualité autour des pays d’Afrique du Nord ainsi que leurs relations avec des États de l’Union Européenne.
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