Madagascar : la France appelle au dialogue face à la crise politique et institutionnelle


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Andry Rajoelina et Emmanuel Macron
Andry Rajoelina et Emmanuel Macron

La situation politique à Madagascar connaît un tournant critique. Depuis plusieurs semaines, le pays est secoué par des tensions sociales grandissantes, culminant avec l’intervention de militaires du CAPSAT (Corps des personnels et des services administratifs et techniques), qui ont annoncé une prise de pouvoir. Face à cette instabilité, la France, par la voix de son ministère des Affaires étrangères, a lancé un appel solennel à la responsabilité, à la retenue et au dialogue entre toutes les parties prenantes. Cette déclaration intervient dans un contexte de vacance du pouvoir, de manifestations populaires soutenues par une frange de l’armée, et de désaveu institutionnel du pouvoir exécutif en place.

Un climat politique sous haute tension à Madagascar

La crise politique actuelle à Madagascar trouve ses racines dans un climat de mécontentement populaire profond. Depuis le 25 septembre, plusieurs grandes villes malgaches, à commencer par la capitale Antananarivo, sont le théâtre de manifestations massives. Portées en grande partie par la jeunesse, notamment la Génération Z, ces protestations dénoncent la gestion chaotique des services publics, en particulier les pénuries récurrentes d’eau et d’électricité.

Ce mouvement de contestation, loin de s’essouffler, a trouvé un écho favorable au sein de certaines factions de l’armée, notamment le CAPSAT. Le 14 octobre, un groupe de militaires a investi le Palais présidentiel d’Ambohitsorohitra, déclarant unilatéralement la prise de pouvoir et remettant en question la légitimité du président Andry Rajoelina. La Haute Cour constitutionnelle (HCC) a enfoncé le clou le jour même en constatant la vacance du pouvoir présidentiel et sénatorial, tout en appelant le Colonel Randrianirina Michaël à assurer la fonction de chef de l’État de manière transitoire.

La réaction de la France : un appel à la stabilité démocratique

Face à ces développements, la France a publié un communiqué officiel appelant à une résolution pacifique de la crise. Le Quai d’Orsay insiste sur « la responsabilité » des différents acteurs, qu’ils soient politiques, institutionnels ou sociaux, dans la gestion de cette période sensible. Paris affirme qu’il est « essentiel que la démocratie, les libertés fondamentales et l’État de droit soient scrupuleusement préservés ».

La diplomatie française insiste également sur le droit du peuple malgache, et notamment de sa jeunesse, à faire entendre sa voix sans crainte ni pression. Elle rappelle que les aspirations à une vie plus juste et plus digne doivent être prises en compte dans toute solution politique envisagée. En exprimant sa compassion pour les victimes et les blessés des récents événements, notamment une manifestante évacuée vers La Réunion pour soins, la France souligne également son engagement humanitaire et consulaire auprès de ses ressortissants présents sur l’île.

Une crise institutionnelle aux multiples facettes

Le basculement de la situation politique malgache résulte d’un enchaînement rapide d’événements. Peu avant l’intervention des militaires, l’Assemblée nationale avait voté une motion de destitution à l’encontre du Président Rajoelina, en réponse à sa décision de dissoudre l’institution. Cette escalade politique, couplée à une perte de légitimité populaire, a conduit à une fragmentation du pouvoir.

Dans ce contexte troublé, la HCC, loin d’apaiser la situation, a entériné la prise de pouvoir militaire en désignant le colonel Randrianirina comme chef de l’État par intérim. Une décision perçue par certains comme un coup d’État institutionnalisé, alors que d’autres y voient un retour à l’ordre après un vide de pouvoir. La présidence de la République, pour sa part, a rapidement réagi en dénonçant une tentative de coup d’État, affirmant que le président reste en fonction et condamnant fermement l’action du CAPSAT.

Une scène internationale attentive, mais prudente

Outre la France, plusieurs acteurs régionaux et internationaux suivent de près la situation à Madagascar. L’Union africaine (UA), la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) et la Commission de l’océan Indien (COI) sont identifiés par Paris comme les interlocuteurs privilégiés pour accompagner une sortie de crise.

Paris réaffirme sa volonté de soutenir toute initiative visant à ramener le calme et à garantir une transition démocratique. Toutefois, elle insiste sur le respect de la souveraineté malgache et sur le rôle central des institutions africaines dans la résolution de cette crise interne.

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