Les Bakassi Boys font régner la terreur


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Le 7 août 2006, les partisans d’un mouvement organisé par les militants armés de la région du Delta du Niger, avec à leur tête un leader des « Bakassi boys » nommé Tony Ene, déclarent l’indépendance de Bakassi en invoquant le principe d’autodétermination des peuples. Ils sont soutenus par des chefs tribaux nigérians vivant dans la région de Bakassi et Tony Ene déclare: « Rien ne saurait faire de ce peuple des esclaves du Cameroun, la République Démocratique de Bakassi s’inscrit en droite ligne des articles 1 et 55 de la Charte des Nations Unies sur le droit à l’auto détermination des peuples » [[Leger Ntiga « Cameroun link », « Provocation : des Nigérians proclament l’indépendance de Bakassi », 10 août 2006]]

Le 21 juillet 2006, sept chefs traditionnels de la péninsule, parmi lesquels Oroc Eneyo , Emmanuel Etene, Ndabu Eyo , Emmanuel Okokon, Ita Okon et Richard Ekpeyon s’allient à Tony Ene et contestent devant la Haute Cour Fédérale d’Abuja l’accord de Greentree, qu’ils qualifient « d’illégal et d’anticonstitutionnel » car n’ayant pas fait l’objet de ratification par l’Assemblée Nationale nigériane.

Cette situation survient alors que le Nigeria et le groupe des Bakassi Boys sont déjà cités par les organisations de défense des Droits de l’Homme, pour leurs actions. Du côté camerounais, les Bakassi Boys et les chefs sécessionnistes de la région sont perçus comme des instruments du gouvernement central nigérian pour maintenir la confusion dans la région. Cette situation est vécue comme une agression et une ingérence dans les affaires internes du Cameroun.

En fait, le Nigeria adopte plusieurs attitudes face aux Bakassi Boys et à leur union avec les chefs sécessionnistes… Officiellement, et face à la communauté internationale, le Nigéria est contre les activités des Bakassi Boys et des chefs sécessionnistes et les condamne souvent. Ce fut le cas lors de l’agression des soldats camerounais à la frontière qui causa vingt morts du côté camerounais le 12 novembre 2007. Le Nigéria accusa les Bakassi Boys… Sans pour autant mener une action à leur égard.

Le double langage du Nigeria

Légalement, le Nigéria reconnait les Bakassi Boys comme groupe d’autodéfense et comme une société de sécurité chargé de protéger les citoyens nigérians de la région, ce qui rend le Nigéria responsable des actions des Bakassi Boys dans un cadre international.

Officieusement, il est probable que le gouvernement nigérian est à l’origine des Bakassi Boys et des groupes sécessionnistes actifs dans la région et s’en sert quand il en a besoin pour se déresponsabiliser en cas d’attaque à la frontière ou quand il est mis à l’index par la communauté internationale. Ceci permet d’y voir une instrumentalisation des Bakassi Boys et des chefs sécessionnistes par le gouvernement nigérian pour faire échec à la résolution pacifique du confit.

Les organisations de défense des Droits de l’Homme tels que HUMAN RIGHTS WATCH et CLEEN convergent dans la condamnantion des exactions dont ces groupes armés se rendent coupables : « Les méthodes utilisées par les Bakassi Boys sont extrêmement brutales, impitoyables et arbitraires, de nombreuses personnes ont été exécutées hors de tout cadre juridique légal ou mutilées en public par les Bakassi Boys, des centaines d’autres ont étés torturées dans leurs cellules. » [[Rapport mondial de mai 2002 sur le Nigéria, « Human Rights Watch » : « Les Bakassi Boys : légitimation du meurtre et de la torture ».]]

C’est donc l’insécurité interne au Nigéria qui s’étend au Cameroun et jette un flou sur l’avenir de la région de Bakassi. D’autant plus que le nouvel homme fort d’Abuja, Musa Umaru Yar’Adua est perçu par les médias comme un instrument de l’ancien président Obasanjo. Peut-on vraiment espérer un changement positif dans la politique nigériane ?

En fait, à peine arrivé au pouvoir, Musa Umaru Yar’Adua a déjà remis en cause les accords de Greentree en les présentant au Sénat pour validation. Ce qui risque de causer un bond en arrière quant aux engagements du Nigéria dans la résolution de ce conflit.

Par Djat Mpayon

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