
L’ancien Président du Nigeria Muhammadu Buhari est mort ce 13 juillet 2025 à l’âge de 82 ans, a indiqué son ancien porte-parole. Deux fois président dans sa carrière, Il a marqué l’histoire de ce pays d’Afrique de l’ouest avec sa lutte acharnée contre le groupe terroriste Boko Haram.
Muhammadu Buhari, 82 ans, ce 13 juillet 2025, est décédé à Londres, où il suivait un traitement pour une maladie prolongée. Son épouse, l’ancienne First Lady Aisha Buhari, et son épouse précédente, Safinatu, ainsi que ses dix enfants, figurent parmi les proches qui lui survivent. Selon l’annonce officielle, Buhari aurait succombé à une leucémie. Il était hospitalisé depuis plusieurs semaines dans une clinique britannique, après avoir voyagé au Royaume-Uni à des fins médicales en avril 2025.
Une carrière triangulaire : militaire, putschiste et démocrate
Le Président Bola Tinubu a, ce même jour, ordonné que le drapeau soit mis en berne à l’échelle nationale et a dépêché le vice-président Kashim Shettima à Londres pour rapatrier la dépouille. Né le 17 décembre 1942 à Daura (État de Katsina), Buhari intègre l’armée en 1961 avant de monter en grade et participer à la Guerre du Biafra (1967–1970). Il accède au pouvoir suite au coup d’État du 31 décembre 1983, renversant le président Shehu Shagari pour instaurer une junte militaire.
Son régime lance la « Guerre contre l’indiscipline », imposant des mesures d’ordre strictes, fouet, exécutions publiques, suscitant autant l’admiration que la critique. Mais il est renversé par Ibrahim Babangida en août 1985 et placé en détention jusqu’en 1988. Après 1999, Buhari se présente à quatre reprises aux présidentielles (2003, 2007, 2011). Sa persévérance paie en 2015 lorsqu’il est élu à la tête du Nigeria, devenant ainsi le premier candidat d’opposition à battre un président sortant, Goodluck Jonathan. Il est réélu en 2019, consolidant sa stature politique.
Un règne sous tension : promesses et critiques
Buhari s’affirme en tant que guerrier contre la corruption, se présentant comme un homme intègre, austère et incorruptible (posture séduisante dans un paysage politique rongé par les scandales). Ses rares absences à l’étranger, souvent prolongées pour des traitements médicaux, alimentent cependant les critiques quant à une gouvernance détachée et des problèmes de santé cachés. Sous sa présidence, l’économie nigériane connaît deux récessions (2016, 2020), inflation galopante, immobilisme monétaire et dettes croissantes.
La fermeture des frontières en 2019, destinée à stimuler la production locale, se traduit par une flambée des prix. À la fin de son mandat, le taux de chômage global atteint 37,7 %, avec 54% chez les jeunes. Buhari promet la défaite de Boko Haram, mais le terrorisme s’étend, États et enlèvements marquent la vie quotidienne, et les jeunes protestent massivement en 2020 contre les violences policières (#EndSARS). L’armée tue des manifestants, provoquant une onde de choc dans le pays. Son gouvernement est accusé de museler les médias et d’entraver les droits civils, allant jusqu’à suspendre Twitter (maintenant X) pendant sept mois.
Héritage contrasté, veillées, deuil et funérailles
Buhari laisse un héritage polarisé : certains louent sa rigueur morale et son discours anticorruption, d’autres dénoncent son leadership « inefficace » et l’aggravation des fractures sociales ou économiques. Un observateur d’Al Jazeera estime que l’économie a régressé sous son mandat : « très inefficace ». Sa mort coïncide avec une redistribution des influences au sein du nord du Nigeria et de son parti, l’APC. Sa stature symbolique a longtemps servi de ciment au consensus électoral « nordiste » ; son départ suscite déjà des repositionnements en vue de l’élection de 2027.
À Abuja, Lagos et Daura, villes chères à Buhari, un deuil national est déjà entamé : drapeaux en berne, condoléances internationales, registres de sympathie, et préparation de funérailles d’État musulmanes, avec rapatriement par le vice-président Shettima. Le gouverneur de l’État de Bauchi, Bala Mohammed, a salué « un homme d’une intégrité sans pareil, patriotique et simple », affirmant que sa disparition est « une perte monumentale pour la nation ».