
Le Nigeria a fermement rejeté les pressions américaines pour accueillir des migrants expulsés des États-Unis, dont certains sortent directement de prison. Bien que les Vénézuéliens constituent une part importante de cette politique de déportation vers des pays tiers, l’administration Trump cherche à envoyer des migrants de multiples nationalités vers des pays africains, illustrant une nouvelle stratégie de gestion migratoire.
Le Nigeria oppose une fin de non-recevoir aux États-Unis. Le ministre des Affaires étrangères nigérian, Yusuf Tuggar, a révélé jeudi 11 juillet que l’administration Trump exerçait des « pressions considérables » sur les pays africains pour qu’ils acceptent des migrants de diverses nationalités expulsés des États-Unis, notamment des Vénézuéliens mais pas exclusivement.
S’exprimant depuis le Brésil où il participait au sommet des BRICS, Tuggar a été sans ambiguïté : « Il sera difficile pour un pays comme le Nigeria d’accepter des prisonniers vénézuéliens au Nigeria. Nous avons déjà suffisamment de problèmes. »
Cette déclaration fait suite à des rencontres à la Maison-Blanche où l’administration Trump a demandé à cinq présidents africains en visite – du Libéria, du Sénégal, de la Guinée-Bissau, de la Mauritanie et du Gabon – d’accepter des migrants expulsés par les États-Unis, y compris des personnes ayant un casier judiciaire.
Le fardeau d’un géant démographique
Avec plus de 230 millions d’habitants, le Nigeria fait face à ses propres défis intérieurs majeurs. Le pays le plus peuplé d’Afrique traverse une crise humanitaire et sécuritaire persistante depuis treize ans, particulièrement dans les régions du Nord-Est, du Nord-Centre et du Nord-Ouest.
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Les conflits impliquant des groupes armés non étatiques, les affrontements entre agriculteurs et éleveurs, les activités criminelles et les impacts climatiques comme les inondations et les sécheresses ont créé des millions de déplacés internes. Dans ce contexte, l’accueil de migrants supplémentaires représenterait une charge difficilement supportable pour un État déjà en difficulté.
Une stratégie de déportation vers des pays tiers
L’administration Trump déploie une politique de déportation sans précédent vers des pays tiers. Récemment, huit migrants de nationalités diverses – Cuba, Laos, Mexique, Myanmar, Vietnam et Soudan du Sud – ont été expulsés vers le Soudan du Sud, bien qu’un seul d’entre eux soit originaire de ce pays.
Cette stratégie de « déportation vers des pays tiers » vise à contourner le refus de certains pays, notamment la Chine, Cuba et le Venezuela, d’accepter leurs ressortissants expulsés. L’administration négocie également des accords avec la Libye, l’Angola, le Bénin et l’Eswatini pour accepter des migrants qui ne sont pas leurs ressortissants.
Les Vénézuéliens, bien que majoritaires ne sont pas les seuls concernés. Le nombre d’Africains appréhendés à la frontière sud des États-Unis a bondi à 58.462 en 2023, contre 13.406 en 2022, avec la Mauritanie, le Sénégal, l’Angola et la Guinée comme principales sources.
Les nouvelles routes migratoires et la diversification des flux
Bien que la crise vénézuélienne reste majeure avec près de 7,9 millions de personnes ayant quitté leur pays, la migration vers les États-Unis s’est diversifiée. Les Africains, les Asiatiques et d’autres Latino-américains forment désormais un flux complexe que l’administration Trump tente de gérer par des déportations vers des pays tiers.
La migration africaine vers les États-Unis connaît une forte augmentation, notamment depuis que l’Europe durcit ses politiques migratoires. Les migrants africains utilisent désormais des routes traditionnellement empruntées par les Latino-américains, créant de nouveaux défis logistiques pour les autorités américaines.
La fermeté du Nigeria dans ce dossier démontre que les pays africains ne sont pas disposés à accepter sans conditions toutes les demandes de la puissance américaine.