Guinée : la Cour suprême valide neuf candidatures sur plus d’une trentaine de dossiers déposés


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Drapeau de la Guinée
Drapeau de la Guinée

La Cour suprême de Guinée a publié dans la soirée du samedi 8 novembre la liste provisoire des candidats retenus pour l’élection présidentielle prévue le 28 décembre 2025, première consultation nationale depuis la prise de pouvoir du général Mamadi Doumbouya en septembre 2021.

Au total, neuf personnalités ont vu leur dossier validé, dont sept sous la bannière d’un parti politique et deux indépendants, parmi lesquels figure le chef de l’État de transition lui-même. Sur la trentaine de dossiers déposés auprès de la juridiction suprême, une large majorité a été rejetée, faute de parrainages suffisants, de documents incomplets ou de non-conformité aux critères d’éligibilité fixés par le Code électoral.

Mamadi Doumbouya officialise sa candidature en indépendant

Comme attendu, le général Mamadi Doumbouya, Président de la transition, a été retenu par la Cour suprême. Il se présente en candidat indépendant, rompant ainsi avec toute affiliation partisane. Cette option vise, selon ses proches, à marquer une volonté d’« unité nationale » et de « neutralité politique » dans un pays encore traversé par de fortes fractures régionales et sociales. Le Président-candidat, qui avait promis lors de la transition de rendre le pouvoir à un régime civil, défend désormais son propre projet politique, qu’il présente comme une continuité de la « refondation de l’État ».

Ses opposants, eux, dénoncent un « détournement de la transition » et une « candidature de trop ». L’ancien Premier ministre, Lansana Kouyaté, dont la candidature a été rejetée, a d’ailleurs fustigé « une sélection politique travestie en procédure juridique ».

Les recalés : Lansana Kouyaté et Ousmane Kaba hors course

La Cour suprême a en effet écarté plusieurs figures historiques de la scène politique guinéenne. Les candidatures de Lansana Kouyaté, président du Parti de l’espoir pour le développement national (PEDN), et de l’économiste Ousmane Kaba, fondateur du Parti des démocrates pour l’espoir (PADES), n’ont pas été validées.

Si les motifs officiels ne sont pas encore détaillés, des sources proches du dossier évoquent des « insuffisances techniques et financières ». Ces exclusions, cependant, alimentent déjà les soupçons de manipulation politique dans une période où le climat électoral demeure tendu.

Les autres candidats : le retour des partis face au pouvoir militaire

Parmi les sept candidats de partis politiques, on retrouve notamment Abdoulaye Kourouma, leader du Rassemblement pour la renaissance et le développement (RRD), qui s’est dit « prêt à affronter le scrutin ».

Autre personnalité en lice, Mohamed Chérif Tounkara, également candidat indépendant, a exprimé sa « grande joie » de voir sa candidature validée : « Nous allons maintenant montrer ce que nous savons faire avec la campagne qui va commencer. L’ambition, c’est de gagner la présidentielle et de servir la Guinée ! »

Les six autres candidats sont : Abdoulaye Yéro Baldé, Makalé Camara, Ibrahima Abé Sylla, Faya Lansana Millimouno, Mohamed Nabé et Elhadj Bouna Keïta.

La liste définitive attendue le 13 novembre

Cette publication de la Cour suprême ouvre officiellement la voie à une campagne qui s’annonce âpre et décisive. Mais l’atmosphère politique est lourde : la Guinée tente toujours de sortir d’une longue période de transition militaire, marquée par des arrestations d’opposants, des restrictions des libertés publiques et des tensions sociales autour de la hausse du coût de la vie.

La liste définitive des candidats sera publiée le 13 novembre, après examen des éventuels recours. Le scrutin du 28 décembre doit permettre au pays de tourner la page de la transition et d’ouvrir une nouvelle ère institutionnelle.

Mais pour de nombreux observateurs, la participation de Mamadi Doumbouya, celui-là même qui avait renversé Alpha Condé au nom de la démocratie, pose un dilemme éthique et politique majeur. La présidentielle s’annonce ainsi comme un test crucial : celui de la sincérité du retour à l’ordre constitutionnel en Guinée.

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Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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