
L’Église catholique sort de son silence pour tenter d’apaiser le climat délétère qui règne en Guinée-Bissau. Ce jeudi 18 décembre 2025, une délégation de hauts dignitaires ecclésiastiques a franchi les portes de la prison pour rencontrer quatre figures de l’opposition, détenues depuis le coup d’État du 26 novembre dernier. Cette démarche, qualifiée d’humanitaire et de solidaire, intervient dans un climat de vive inquiétude, alors que les familles et les avocats des prévenus sont toujours privés de tout contact avec leurs proches.
En s’invitant dans les geôles du pouvoir de transition, les prélats marquent leur volonté de s’assurer de l’intégrité physique des prisonniers, dont l’ancien Premier ministre Domingos Simoes Pereira.
Une rencontre sous haute surveillance médiatique
L’autorisation accordée à la délégation, qui comprenait notamment Dom Victor Luis Quematcha, évêque de Bafata, a été accueillie avec un mélange de soulagement et d’amertume par la société civile. Si la présence des religieux a permis de confirmer que l’ancien Premier ministre et trois de ses compagnons sont toujours en vie, le périmètre restreint de cette visite interroge. En effet, les autorités militaires n’ont autorisé l’accès qu’à ce petit groupe, laissant dans l’ombre d’autres détenus arrêtés dans le sillage du putsch qui a suivi les élections du 23 novembre. Ce tri sélectif, opéré sans justification officielle, alimente les doutes des observateurs sur le traitement réel réservé à l’ensemble des prisonniers politiques.
Le cri d’alarme de la société civile bissau-guinéenne
L’indignation gagne du terrain à Bissau. Plusieurs organisations locales de défense des droits humains, soutenues par des partis d’opposition, dénoncent une situation qu’elles qualifient de détention arbitraire. Le silence des autorités de transition face aux courriers de l’Église, qui demandait initialement la libération pure et simple des opposants, a renforcé le sentiment d’un recul flagrant des libertés fondamentales. Les familles des détenus, plongées dans l’angoisse depuis près d’un mois, craignent que l’état de santé de certains prisonniers ne se dégrade sans assistance médicale adéquate, une préoccupation qui reste au cœur des motivations de la mission ecclésiastique.
L’Église comme dernier rempart de la médiation
En Guinée-Bissau, l’institution catholique jouit historiquement d’un rôle de médiatrice crédible lors des crises cycliques qui secouent le pays. En choisissant la voie de la diplomatie religieuse, les évêques tentent de maintenir un canal de communication avec les militaires au pouvoir, là où le dialogue politique semble totalement rompu. Bien que la délégation n’ait pas souhaité commenter publiquement la teneur de ses échanges avec les détenus ou avec le commandement militaire, cette visite symbolique envoie un message important : celui d’une vigilance morale constante. L’enjeu est désormais de savoir si cette initiative ouvrira la voie à des garanties judiciaires pour les opposants ou si elle restera une simple parenthèse humanitaire dans une transition qui s’annonce déjà tendue.




