
L’Éthiopie poursuit son ambition de devenir le hub aérien incontournable de l’Afrique. Ethiopian Airlines et la Banque africaine de développement (BAD) ont officialisé en mars 2025 leur partenariat pour financer un nouvel aéroport international à Bishoftu, près d’Addis-Abeba. Ce projet titanesque, dont le coût est désormais estimé à 10 milliards de dollars, représente l’investissement aéroportuaire le plus ambitieux jamais entrepris sur le continent africain.
Le futur aéroport international de Bishoftu sera situé à Abusera, à 40 kilomètres au sud-est de la capitale éthiopienne, sur une superficie de 35 kilomètres carrés. Les chiffres donnent le vertige : une capacité initiale de 60 millions de passagers par an, extensible à 110 millions, avec un potentiel de traitement de 3,73 millions de tonnes de fret annuellement.
L’infrastructure comprendra quatre pistes d’atterrissage (deux dans un premier temps), 600 000 m² d’installations passagers, 126 190 m² de bâtiments de soutien aux compagnies aériennes, et un parking pouvant accueillir 270 avions simultanément. En outre, doté d’un terminal ultra-moderne de plus d’un million de mètres carrés, le site accueillera également des zones logistiques, hôtelières et commerciales, dans une logique de « ville-aéroport ».
Un financement structuré à l’échelle internationale
Le montage financier de ce méga-projet révèle l’ampleur des enjeux. La Banque africaine de développement s’est engagée à fournir un financement de 500 millions de dollars et à jouer le rôle d’arrangeur principal mandaté pour mobiliser près de 8 milliards de dollars supplémentaires. Ethiopian Airlines va financer 20% du projet sur fonds propres. Cela représente environ 2 milliards de dollars, tandis que les 8 milliards restants devront être mobilisés auprès de bailleurs multilatéraux et d’agences de financement internationales.
Cette approche témoigne de la confiance des institutions financières internationales dans la capacité d’Ethiopian Airlines à mener à bien ce projet d’envergure. Pour l’institution panafricaine, ce chantier représente un « projet d’intégration régionale structurant« . Il est susceptible de transformer la connectivité aérienne du continent.
Une réponse à la saturation de l’aéroport actuel
Le projet trouve sa justification dans la croissance explosive du trafic aérien éthiopien. L’actuel aéroport international de Bole, d’une capacité maximale de 25 millions de passagers, a vu passer plus de 20 millions de voyageurs en 2023. Cette croissance va entrainer sa saturation dans les prochaines années. Ethiopian Airlines a enregistré un chiffre d’affaires record de 7,6 milliards de dollars au cours de l’exercice fiscal achevé en juin 2025, soit une progression de 8% par rapport à l’année précédente.
Avec 17,1 millions de passagers transportés en 2024 (+23% par rapport à 2023), la compagnie nationale éthiopienne confirme son statut de leader africain. Avec une flotte actuelle de 150 avions et des plans ambitieux pour en posséder 270 d’ici 2035, Ethiopian Airlines se positionne résolument pour l’avenir.
L’aéroport international de Bishoftu desservira le trafic international de passagers et de marchandises, en complément de l’aéroport international de Bole, qui conservera les activités intérieures d’Ethiopian Airlines. Cette complémentarité optimisera l’efficacité opérationnelle tout en permettant une spécialisation des infrastructures.
Un calendrier ambitieux
Le calendrier de réalisation s’étale sur plusieurs années avec des étapes clés bien définies. Les travaux de terrassement commenceront fin 2025, et la phase I devrait être achevée d’ici novembre 2029. Un défi important reste à relever : l’accord avec les 2500 agriculteurs qui occupent aujourd’hui le site. Selon les autorités éthiopiennes, ils vont être indemnisés et relocalisés d’ici à fin 2025. Ainsi, le groupe Ethiopian Airlines a alloué un total de 350 millions de dollars à la restauration des moyens de subsistance et à la réinstallation des communautés qui seront affectées par la construction de l’aéroport.
Ce projet s’inscrit dans une vision plus large de développement du transport aérien africain. Les prévisions officielles annoncent une croissance soutenue du trafic aérien en Afrique au cours des prochaines années, et selon l’IATA, la progression devrait atteindre près de 5,7% par an en moyenne jusqu’en 2034.
Akinwumi Adesina, président de la BAD, a souligné que ce partenariat entre Ethiopian Airlines et la Banque représente « un partenariat approprié entre la plus grande compagnie aérienne d’Afrique et le plus grand financier d’infrastructures du continent, pour offrir un changement de donne pour l’aviation africaine et mondiale« . Cette expansion correspond à l’une des cinq grandes priorités de la Banque africaine de développement, qui est d’intégrer l’Afrique en supprimant les obstacles, en établissant des liens transfrontaliers et en permettant aux économies africaines de commercer, de voyager et de prospérer ensemble dans un environnement concurrentiel mondial.
L’objectif affiché est de rivaliser avec les grands hubs mondiaux tels que Dubaï, Doha ou Istanbul. Ainsi, que de consolider la position d’Ethiopian Airlines comme leader africain du transport aérien.