Éthiopie : la BAD injecte 500 millions de dollars pour propulser le méga-aéroport de Bishoftu


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Ethiopian Airlines
Ethiopian Airlines

L’Éthiopie franchit une étape décisive dans son ambition de devenir le premier hub aérien d’Afrique. La Banque africaine de développement (BAD) a annoncé, ce lundi, l’octroi d’un crédit de 500 millions de dollars destiné au financement du futur aéroport international de Bishoftu, un projet titanesque estimé à 10 milliards de dollars.

L’accord a été signé à Addis-Abeba par le Président-directeur général d’Ethiopian Airlines, Mesfin Tasew Bekele, et le président de la BAD, Akinwumi Adesina. Pour l’institution panafricaine, ce chantier représente un « projet d’intégration régionale structurant », susceptible de transformer la connectivité aérienne du continent.

Un levier pour mobiliser 8 milliards de dollars supplémentaires

Le prêt de la BAD n’est pas qu’une simple contribution : il constitue un signal de confiance aux investisseurs internationaux. Sur les 10 milliards de dollars nécessaires, Ethiopian Airlines financera 2 milliards sur fonds propres, tandis que les 8 milliards restants devront être mobilisés auprès de bailleurs multilatéraux, d’agences de crédit à l’exportation et de partenaires privés.

« Ce financement d’ancrage doit entraîner un effet d’entraînement auprès des autres créanciers », a expliqué Akinwumi Adesina en présence du ministre éthiopien des Finances, Ahmed Shide, du P-DG d’Ethiopian Airlines.

Un nouvel aéroport pour soulager Bole et viser les sommets mondiaux

Situé à 40 km au sud-est d’Addis-Abeba, le futur aéroport de Bishoftu remplacera progressivement l’aéroport international de Bole, aujourd’hui saturé avec 25 millions de passagers annuels. À terme, la nouvelle infrastructure devrait accueillir jusqu’à 110 millions de voyageurs par an, soit plus du quadruple de la capacité actuelle.

Doté de quatre pistes et d’un terminal ultra-moderne de plus d’un million de mètres carrés, le site accueillera également des zones logistiques, hôtelières et commerciales, dans une logique de « ville-aéroport ». L’objectif affiché : rivaliser avec les grands hubs mondiaux tels que Dubaï, Doha ou Istanbul, tout en consolidant la position d’Ethiopian Airlines comme leader africain du transport aérien.

Des défis colossaux face à une ambition immense

Pour le gouvernement éthiopien, l’enjeu dépasse le transport aérien. Selon le ministre éthiopien des Finances, ce hub pourrait doubler les arrivées touristiques en dix ans, stimuler les exportations de produits frais grâce au fret aérien, et générer des milliers d’emplois directs et indirects. Ce projet s’inscrit dans la vision « Homegrown Economic Reform », qui place les infrastructures au cœur de la transformation structurelle du pays, en parallèle d’investissements massifs dans le rail et l’énergie.

Si les ambitions sont immenses, les défis le sont tout autant. La sécurisation des financements restants, la maîtrise des délais — première mise en service prévue en 2029 — et la gestion des déplacements de population dans la zone de Bishoftu constituent des enjeux majeurs. Des ONG locales ont déjà exprimé des préoccupations sur l’indemnisation et la relocalisation de milliers d’agriculteurs affectés.

Sur le plan régional, cette montée en puissance pourrait également intensifier la compétition avec d’autres hubs africains comme Johannesburg, Casablanca ou Nairobi, chacun cherchant à capter une part du trafic aérien intercontinental.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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