
Deux trajectoires, deux fortunes, deux mondes. D’un côté, le roi Mohammed VI du Maroc, souverain chérifien héritier d’un immense patrimoine royal, chef d’État, chef religieux et entrepreneur influent. De l’autre, Hasnae Taleb, jeune prodige de la finance née à Khénifra, devenue milliardaire par ses propres moyens avant l’âge de 30 ans. Un duel symbolique entre tradition et modernité, pouvoir et mérite, monarchie et entrepreneuriat. Et surtout, une différence frappante en termes de fortunes, de parcours et d’impact.
La fortune royale : entre histoire, héritage et empire économique
Le roi Mohammed VI est aujourd’hui considéré comme l’un des monarques les plus riches au monde. Selon les estimations de Forbes et d’autres sources internationales, sa fortune personnelle avoisine les 5,7 milliards de dollars. Cette richesse découle en grande partie de sa participation à la holding Al Mada (anciennement SNI (Société Nationale d’Investissement), un conglomérat économique majeur au Maroc.
Al Mada est actif dans plusieurs secteurs : banque (avec Attijariwafa Bank), énergie, mines (à travers Managem), distribution, télécommunications, et même immobilier. Le roi détient une part significative de ces entreprises à travers des structures financières opaques, mais puissantes. L’empire économique royal est souvent critiqué pour son quasi-monopole dans certains secteurs stratégiques du pays, ce qui contribue à renforcer l’influence du palais dans la vie économique marocaine.
Ajoutons à cela un patrimoine immobilier royal très vaste : des dizaines de palais, résidences et domaines agricoles, répartis à travers le royaume. Le train de vie de Mohammed VI est luxueux, avec une flotte de voitures de collection, des yachts, et des voyages fréquents à l’étranger.
Hasnae Taleb : l’émergence d’une nouvelle puissance financière
À 29 ans, Hasnae Taleb incarne une toute autre forme de réussite. Elle n’est ni princesse ni héritière. Partie de Khénifra, ville discrète du Moyen Atlas, elle s’impose aujourd’hui comme une figure clé de la haute finance mondiale depuis le centre financier international de Dubaï (DIFC). Elle gère, via sa société Mintiply Capital, plus de 3,8 milliards de dollars d’actifs. Autodidacte dans ses débuts, passée par des géants comme Morgan Stanley et Nasdaq, elle se forge une réputation grâce à son flair financier et sa compréhension fine des marchés, notamment dans les domaines du capital-investissement, des actifs numériques et des fusions-acquisitions.
Son approche novatrice consiste à connecter les capitaux internationaux aux économies émergentes du Golfe, avec une vision éthique et à long terme. Surnommée la « louve du Nasdaq », elle ne cherche pas seulement à accumuler de la richesse. Elle veut, selon ses propres mots, « donner un sens à ces milliards », à travers des projets durables, en soutenant des entrepreneurs et en innovant dans la structuration financière.
Deux fortunes, deux philosophies
Au-delà des montants (5,7 milliards pour Mohammed VI contre 3,8 milliards pour Hasnae Taleb) la différence fondamentale entre les deux fortunes réside dans leur origine et leur philosophie. Mohammed VI hérite d’un empire royal consolidé depuis des décennies. Son rôle de roi lui donne accès à des ressources inégalées, mais aussi à un pouvoir politique et religieux total. Il est à la fois acteur et arbitre du système.
Hasnae Taleb, en revanche, est une self-made woman. Elle doit sa réussite à son intelligence, sa capacité à lire les marchés, son courage entrepreneurial et sa résilience dans un univers majoritairement masculin. Là où la fortune royale est figée dans le marbre des institutions, celle de Taleb est fluide, innovante, tournée vers l’international.
Les Marocains les plus riches : un club restreint mais dynamique
Au Maroc, peu de fortunes atteignent le niveau de Mohammed VI ou de Hasnae Taleb. Parmi les plus fortunés, on peut citer :
- Othman Benjelloun, président du groupe BMCE Bank, dont la fortune personnelle est estimée à 1,3 milliard de dollars. Il est actif dans la finance, les assurances (RMA Watanya), et les télécoms.
- Anas Sefrioui, magnat de l’immobilier et fondateur du groupe Addoha, avec une fortune estimée à environ 500 millions de dollars, bien qu’elle ait connu une baisse ces dernières années.
Mais aucun ne combine la jeunesse, la discrétion et la croissance exponentielle du portefeuille de Hasnae Taleb. Elle est en passe de devenir la première femme marocaine à figurer durablement dans les classements mondiaux des milliardaires, aux côtés de figures comme Oprah Winfrey ou Sheryl Sandberg.
Nord-Africains les plus riches : domination égyptienne et algérienne
Sur l’échelle régionale, la fortune royale de Mohammed VI reste impressionnante, mais elle n’est pas la plus élevée d’Afrique du Nord. Le titre revient à l’homme d’affaires égyptien Nassef Sawiris, dont la fortune dépasse les 7 milliards de dollars. Il est grand actionnaire d’Adidas, de la société de construction Orascom, et d’autres grands groupes.
Du côté algérien, la figure la plus marquante reste Issad Rebrab, fondateur de Cevital (agroalimentaire, électronique, sidérurgie), dont la fortune a atteint jusqu’à 4 milliards de dollars, bien qu’elle ait fluctué selon les cycles économiques et politiques du pays.