
Venu tout droit de Kigali où il a rencontré le Président Paul Kagame, l’ancien Président nigérian, Olusegun Obasanjo, a été reçu ce mercredi 25 juin à Kinshasa par le chef de l’État congolais, Félix Tshisekedi. Facilitateur mandaté par la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), Obasanjo poursuit une délicate mission diplomatique pour rapprocher les positions de la République démocratique du Congo (RDC) et du Rwanda, à la veille d’une signature d’accord de paix historique.
L’offensive diplomatique pour la résolution de la crise à l’est de la RDC ne faiblit pas à quelques heures de la signature de l’accord de Washington. La visite de l’ancien Président nigérian, Olusegun Obasanjo, au Président congolais, Félix Tshisekedi, ce mercredi, s’inscrit dans ce cadre.
Une médiation diplomatique intensive
« Nous explorons toutes les possibilités sur la situation entre le Rwanda et la RDC pour qu’il n’y ait plus de confrontation militaire et de violence. Les discussions que j’ai eues avec mes deux frères du Rwanda et de la RDC sont sur le bon chemin », a déclaré Olusegun Obasanjo à l’issue de son entretien d’environ deux heures avec le Président Tshisekedi.
Ancien chef d’État et figure respectée de la diplomatie africaine, Obasanjo fait partie des cinq anciens Présidents désignés en mars dernier lors du 2ᵉ sommet conjoint EAC-SADC comme facilitateurs régionaux. À ses côtés : Uhuru Kenyatta (Kenya), Kgalema Motlanthe (Afrique du Sud), Catherine Samba-Panza (République centrafricaine) et Sahle-Work Zewde (Éthiopie). Leur mission : favoriser le retour de la paix dans l’est de la RDC, une région en proie à une insécurité chronique, marquée par l’occupation de territoires par les rebelles du M23 avec le soutien actif de Kigali.
Un climat propice à la désescalade
Après Kigali et Kinshasa, Olusegun Obasanjo a annoncé qu’il se rendrait à Lomé pour consulter Faure Gnassingbé, président du Conseil des ministres togolais et médiateur désigné par l’Union africaine. « Nous avons un médiateur nommé par l’Union africaine en la personne de Faure Gnassingbé, président du Conseil des ministres togolais. Je vais me rendre à Lomé pour lui faire rapport et voir ce qui doit être fait pour une paix durable dans la région », a-t-il précisé. Cette coordination diplomatique renforce l’architecture de médiation continentale, où s’articulent les efforts des organisations régionales, de l’Union africaine et de partenaires internationaux.
La visite d’Obasanjo survient dans un contexte de détente relative. À l’échelle internationale, les efforts de médiation portés par les États-Unis et le Qatar ont enregistré une avancée significative. Le texte d’un accord de paix entre la RDC et le Rwanda a été paraphé par les équipes techniques des deux pays, sous la supervision de la sous-secrétaire d’État américaine aux affaires politiques, Allison Hooker. La signature officielle, à l’échelon ministériel, aura lieu ce vendredi 27 juin, en présence du secrétaire d’État américain, Marco Rubio.
Doha et Washington ont activement coordonné leurs initiatives, veillant à leur complémentarité. Le Qatar a notamment participé aux discussions pour éviter toute duplication des démarches et renforcer la crédibilité d’un accord durable.
Soutien croissant des leaders religieux
En parallèle à ces négociations diplomatiques, les Églises catholique et protestante congolaises ont poursuivi un processus interne de consultations. Réticent dans un premier temps au Pacte social pour la paix, le Président Tshisekedi a reçu, ce 21 juin, les représentants de la CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo) et de l’ECC (Église du Christ au Congo). Ces derniers ont présenté les conclusions d’un travail de trois mois, mené aussi bien à l’intérieur du pays qu’à l’étranger. Leurs recommandations visent à offrir une solution endogène à la crise sécuritaire, notamment en favorisant la réconciliation nationale, le désarmement des groupes armés et la restauration de l’autorité de l’État dans les provinces orientales du pays.
Vers une paix durable ?
La situation sécuritaire dans l’est demeure cependant volatile. Des portions importantes du Nord-Kivu et du Sud-Kivu demeurent sous le contrôle du groupe armé M23, que Kinshasa qualifie de « force supplétive » de Kigali. Malgré les pressions diplomatiques, l’armée rwandaise reste accusée d’occuper discrètement certaines positions stratégiques. La population civile continue de subir les conséquences d’un conflit dont les ramifications dépassent les frontières congolaises, touchant l’ensemble de la région des Grands Lacs.
Cependant, avec la convergence des efforts diplomatiques africains, religieux et internationaux, la perspective de l’accord global entre Kinshasa et Kigali est plus que jamais porteuse d’espoir, même si de nombreux observateurs appellent à la prudence. Ils rappellent que les précédents accords ont souvent échoué à enrayer durablement la spirale des violences dans l’est du Congo. Ce qui est certain, c’est que la réussite du processus en cours dépendra autant de la volonté politique des parties que de leur capacité à impliquer les acteurs locaux et à garantir une mise en œuvre effective sur le terrain.