
La crise diplomatique entre le Bénin et le Niger s’enlise. Le rappel de l’ambassadeur béninois à Niamey, Gildas Agonkan, entériné quatre mois après son départ, accentue des relations déjà très dégradées. Entre accusations de déstabilisation, fermeture de frontières et malentendus diplomatiques, les deux voisins sahéliens peinent à sortir de l’impasse.
Retour sur une rupture révélatrice des tensions profondes qui minent la coopération régionale.
Une mission écourtée sur fond de désaccords politiques
Nommé en juin 2023 pour apaiser les relations après le coup d’État militaire au Niger, Gildas Agonkan n’aura finalement passé que quelques mois en poste. Son rappel officiel, annoncé début juin 2025 par le chef de la diplomatie béninoise, fait suite à une déclaration polémique. En février, lors d’une cérémonie à Gaya, il avait demandé pardon au nom du peuple béninois, une prise de parole saluée à Niamey mais perçue comme une faute grave à Cotonou. Ses propos, jugés contraires à la position officielle du gouvernement béninois, ont déclenché un rappel immédiat, sans retour depuis.
Une frontière toujours fermée, malgré les appels au dialogue
Depuis juillet 2023, les relations entre le Niger dirigé par le général Tiani et le Bénin de Patrice Talon se sont considérablement détériorées. Le principal point de tension : les accusations de Niamey, selon lesquelles Cotonou hébergerait des bases françaises impliquées dans des actions hostiles. Conséquence : la frontière reste hermétiquement close, malgré les tentatives béninoises de négociation. “Le blocage n’est pas de notre fait”, a récemment déclaré le ministre béninois des Affaires étrangères. Il a laissé la porte ouverte à un apaisement… sans réponse du côté nigérien.
Des conséquences lourdes pour les populations et les économies
Cette fermeture prolongée affecte durement les populations frontalières, notamment les transporteurs et commerçants qui vivaient de la circulation entre les deux pays. Les circuits alternatifs, plus longs et dangereux, via le Burkina Faso, exposent les transporteurs à l’insécurité. Seul le fleuve Niger reste un point de passage officieux pour les voyageurs et les marchandises légères. Mais les grandes opérations logistiques, comme l’exportation d’uranium nigérien ou l’acheminement massif de biens, sont à l’arrêt ou détournées au détriment des économies locales.
Une diplomatie béninoise en quête d’équilibre
Face aux accusations de déstabilisation, le Bénin nie catégoriquement toute implication. Le pays, confronté à une montée des attaques jihadistes sur son propre territoire, déplore l’absence de coopération sécuritaire avec ses voisins. Le limogeage de Gildas Agonkan semble ainsi s’inscrire dans une volonté de redonner à la diplomatie béninoise un cap plus ferme, mais aussi plus crédible. Le profil du prochain ambassadeur sera déterminant : il devra rétablir une relation de confiance avec Niamey, sans céder sur les principes.