Bénin : la Cour constitutionnelle tranche ce lundi dans l’affaire du parrainage de Michel Sodjinou


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Boni Yayi, ancien Président béninois
Boni Yayi, ancien Président béninois

Au Bénin, le parti d’opposition Les Démocrates conteste la légalité de l’ordonnance rendue par le tribunal de Cotonou l’enjoignant à restituer la fiche de parrainage du député Michel Sodjinou. La Cour constitutionnelle se penche sur ce recours crucial ce lundi 20 octobre 2025.

Au Bénin, le regard des responsables et militants du parti d’opposition Les Démocrates est désormais tournés vers la Cour constitutionnelle appelée à trancher l’affaire du parrainage qui oppose le député Michel Sodjinou au reste du parti.

Une bataille judiciaire autour d’une fiche de parrainage

La controverse autour du parrainage du député Michel Sodjinou, membre du parti Les Démocrates, entre ce lundi dans une nouvelle phase. La Cour constitutionnelle du Bénin examine, le 20 octobre 2025, le recours formé par le parti contre une ordonnance du tribunal de Cotonou rendue une semaine plus tôt, le 13 octobre.

Cette décision de justice faisait obligation au parti et à son chef, Boni Yayi, de restituer la fiche de parrainage au député Michel Sodjinou, sous peine d’annulation du document par la Commission électorale nationale autonome (CENA). Le tribunal a en outre autorisé la CENA à délivrer une nouvelle fiche au député si le parti refusait de s’exécuter.

La CENA exécute la décision du tribunal

Conformément à cette ordonnance, la CENA a procédé à l’annulation de la fiche de parrainage initialement remise à Michel Sodjinou. Celle-ci avait été transmise au chef du parti Les Démocrates le 2 septembre 2025, dans le cadre des formalités de parrainage exigées pour la Présidentielle de 2026.

Le député, confronté au refus de restitution de sa fiche par les responsables du parti, avait saisi la juridiction de Cotonou, qui lui a donné gain de cause. Cette décision, jugée « illégale » par Les Démocrates, étant émise par une juridiction qu’ils estiment « incompétente », est désormais déférée à la Cour constitutionnelle pour appréciation.

Les Démocrates dénoncent une « ingérence judiciaire »

Pour le parti d’opposition, l’affaire va bien au-delà d’un simple différend administratif. Dans leurs arguments, Les Démocrates estiment que le tribunal de Cotonou n’est pas compétent pour connaître d’un litige portant sur un acte politique tel que le parrainage électoral.

Ils dénoncent une « ingérence judiciaire dans la vie interne des partis politiques », estimant que seul le juge constitutionnel peut se prononcer sur la validité ou la propriété d’une fiche de parrainage. Selon un membre du bureau politique, « c’est une question strictement politique qui relève de la souveraineté des formations partisanes et du contrôle constitutionnel ».

En face, les proches du député Sodjinou défendent son recours comme un acte de légitime défense politique. « Il est injuste et contraire à la loi de retenir la fiche de parrainage d’un député contre sa volonté », a confié un allié du parlementaire, estimant que la décision du tribunal « protège un droit individuel contre un abus partisan ».

Un enjeu politique derrière un dossier juridique

Derrière cette bataille judiciaire se cache un enjeu politique majeur. Depuis la réforme constitutionnelle de 2019, le système de parrainage, réservé aux députés et maires, conditionne l’éligibilité à la magistrature suprême.

Or, dans un Parlement largement dominé par les formations pro-gouvernementales, les fiches de parrainage deviennent un instrument de pouvoir et un levier stratégique dans la course à la Présidentielle. Les Démocrates, principale force d’opposition, dénoncent régulièrement un verrouillage du processus et une marginalisation politique à travers la répartition des parrainages. Dans ce contexte, l’affaire Sodjinou illustre les tensions entre discipline partisane et liberté individuelle des élus, un dilemme qui fragilise la cohésion interne du parti et met à nu des frictions latentes.

Vers une clarification juridique très attendue

La décision de la Cour constitutionnelle, attendue ce lundi, pourrait constituer une jurisprudence déterminante. Elle devra notamment préciser si un tribunal ordinaire peut intervenir dans un litige de nature politique, ou si la compétence exclusive revient au juge constitutionnel.

En attendant le verdict, le climat reste tendu au sein de l’opposition, où beaucoup craignent que cette affaire n’entraîne une implosion du parti Les Démocrates à l’approche des législatives et de la Présidentielle de 2026. Pour l’heure, les militants du parti retiennent leur souffle : le sort d’une simple fiche de parrainage pourrait bien redessiner les contours du droit électoral béninois et, peut-être, les équilibres politiques des scrutins à venir.

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Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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