Tunisie : le sort de Chedly Ayari bientôt scellé par l’ANC


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Il s’agit, normalement, du dernier épisode du feuilleton de la Banque centrale de Tunisie. L’assemblée constituante doit, ce mardi, confirmer ou non la nomination de Chedly Ayari en tant que gouverneur de la Banque centrale de Tunisie. Sa candidature intervient à la suite de la révocation contestée de Kamel Nabli par le président Marzouki le 27 juin 2012. Une histoire qui aura déchaîné les passions jusqu’au dernier souffle de son mandat.

C’est aujourd’hui que l’Assemblée nationale constituante (ANC) se réunit en séance plénière pour statuer sur la nomination de Chedly Ayari en tant que nouveau gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT). Sa candidature intervient suite à la révocation de Mustapha Kamel Nabli, le 27 juin dernier par le président de la République tunisienne, Moncef Marzouki. Sa nomination ne fait pas l’unanimité, au sein même de la Constituante. Selon plusieurs spécialistes du droit, cette nomination souffre d’un vice de forme. Du côté de la présidence, on assure que tout est aux normes. La séance de ce mardi est en ce moment-même probablement très houleuse.

Chedly Ayari est professeur d’économie. Il est l’ancien doyen de la Faculté de droit et de sciences économiques de Tunis, il a été plusieurs fois ministre (de 1969 à 1975) sous Habib Bourguiba. Il a, par ailleurs, dirigé la Banque Arabe de développement Economique en Afrique (BADEA).

La nomination d’Ayari est censée « améliorer » la politique économique et financière du pays. A son prédécesseur, ont été reprochés ses « mauvaises relations avec l’exécutif, la gouvernance et la réforme de la BCT, le contrôle et la réforme du système bancaire et l’inefficacité au niveau du recouvrement des avoirs à l’étranger du président déchu et de son clan ». Des arguments qui, au passage, ont été réfutés un à un par Kamel Nabli le 18 juillet dernier lors de son passage à la Constituante. Ayari changera très certainement la donne en étant plus « conciliant » que Nabli avec le pouvoir en place. Bien que taxé d’ancien « Rcdiste » (RCD, parti dissous de Ben Ali) par certains, le (probable) futur gouverneur de la BCT n’appartient aujourd’hui à aucun parti politique. Ses détracteurs estiment qu’une personne âgée de 79 ans et qui s’est éloignée du monde de la finance depuis au moins vingt ans n’est pas en adéquation avec ce type de poste.

Désaccord et unité au sein de la Troïka

Le parti Ennahda s’était tout d’abord opposé aux choix du président provisoire de la Tunisie. Mais dans un souci d’unité gouvernementale, Ennahda a finalement accepté la candidature de Chedly Ayari. Pourquoi le parti islamiste, qui crie haut et fort sa volonté de rompre avec les figures de l’ancien régime, soutient-il la candidature d’un homme si controversé ? Ce serait, selon Kapitalis, car que ce soit Ennahda, le CPR, ou Ettakatol, qui composent la Troïka (la coalition gouvernementale), aucun « ne dispose des compétences requises pour un tel poste ».

Dans un billet paru sur sa page Facebook, Rached Ghannouchi, le président d’Ennahda, pointe du doigt la campagne de dénigrement contre celui qu’il qualifie de « sommité économique ». « Personne n’a dénigré ses compétences scientifiques ou son dossier professionnel dans la mesure où il a été, à côté du professeur Mansour Moâlla, parmi les économistes de plus haut niveau », rappelle-t-il. Quant aux rapports entre Ayari et l’ancien parti de Ben Ali, « M. Ayari a nié son appartenance. Il a précisé qu’il n’a jamais appartenu à l’ancien RCD, mais a fait partie pour une courte période de la chambre des Conseillers. Aujourd’hui, l’Etat ne peut pas se passer de toutes les anciennes compétences », selon Ghannouchi qui fait la distinction « entre ceux qui ont été très impliqués dans la dictature et la corruption (…) et les professionnels qui entretenaient depuis leur position des relations légères avec la dictature. »

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