Sénégal : un réseau de migration clandestine démantelé à Yeumbeul, révélant un trafic bien organisé vers l’Europe


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Des migrants africains
Des migrants africains

Au Sénégal, l’ombre des migrations clandestines continue de s’étendre, portée par des réseaux de plus en plus sophistiqués. Alors que des centaines de jeunes cherchent à quitter le pays pour un avenir meilleur, certains tombent dans les filets d’escrocs sans scrupules. Une affaire survenue à Yeumbeul a dévoilé un circuit de trafic bien huilé, aux ramifications internationales.

Une affaire de migration clandestine vient de secouer la banlieue dakaroise, au Sénégal. Le Commissariat de Yeumbeul a procédé à l’arrestation d’un homme au cœur d’un vaste réseau d’escroquerie aux visas et de trafic de migrants. Cette opération a permis de découvrir les dessous d’un système frauduleux bien rodé, avec des ramifications nationales et transnationales.

Une affaire déclenchée par une plainte

Tout débute le 9 juillet 2025, lorsqu’une femme se présente au commissariat de Yeumbeul, accompagnée de sa belle-sœur, pour porter plainte contre un individu qui les aurait escroquées. L’homme leur aurait promis un voyage en Roumanie, moyennant 5,4 millions de francs CFA. En réalité, il ne s’agissait que d’un subterfuge pour extorquer de l’argent à ses victimes, désireuses de quitter le Sénégal à la recherche de meilleures opportunités en Europe.

Les enquêteurs de la Police nationale sénégalaise n’ont pas tardé à ouvrir une enquête. Celle-ci a conduit, quelques jours plus tard, à l’interpellation du suspect, qui a été officiellement déféré devant le parquet le jeudi 17 juillet. Il est désormais poursuivi pour escroquerie au visa, complicité d’escroquerie et trafic de migrants.

Un réseau bien organisé, des destinations multiples

Les investigations, notamment l’analyse des échanges sur WhatsApp entre le suspect et d’autres individus, ont permis de dévoiler l’existence d’un réseau structuré, opérant à partir de plusieurs points stratégiques : Kédougou, Dakar, Saint-Louis (au Sénégal), ainsi que Nouadhibou (en Mauritanie). Le mode opératoire de ce réseau impliquait des départs par voie terrestre et maritime vers l’Italie et l’Espagne, deux destinations prisées par les migrants ouest-africains.

Une partie des migrants pris en charge par ce réseau auraient été abandonnés en route, notamment en Tunisie, aujourd’hui devenue un point de transit critique, mais aussi un véritable goulet d’étranglement pour de nombreux migrants bloqués dans des conditions précaires. Ce type d’affaire touche non seulement le Sénégal mais aussi de nombreux autres pays africains. L’immigration clandestine est devenue un commerce lucratif pour des réseaux mafieux, qui exploitent la détresse sociale et le chômage endémique pour appâter leurs victimes. Selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), des milliers de jeunes Africains tentent chaque année de rejoindre l’Europe, souvent au péril de leur vie.

Le trafic de migrants, un fléau transnational

Le Sénégal, comme d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, figure parmi les points de départ majeurs, avec des routes passant par le désert du Sahara, la Libye ou encore la Mauritanie. Ces itinéraires, bien que périlleux, sont alimentés par des promesses illusoires de réussite à l’étranger. Les familles des migrants, souvent impliquées dans le financement du départ de leurs proches, se retrouvent elles aussi piégées. En plus des pertes financières colossales, elles doivent affronter l’angoisse liée à l’absence de nouvelles ou au sort parfois tragique réservé à ceux qui n’arrivent jamais à destination.

Le drame des pirogues chavirées au large des côtes sénégalaises, les arrestations massives en Tunisie ou encore les détentions arbitraires en Libye sont autant de rappels de la cruauté de cette réalité. Dans certains cas, des jeunes diplômés, incapables de trouver un emploi, sont les premières cibles de ces réseaux d’escroquerie, attirés par des offres de travail ou de visa falsifiées. Face à l’ampleur du phénomène, les autorités sénégalaises tentent d’intensifier les actions de sensibilisation sur les dangers de la migration irrégulière.

Une responsabilité partagée : sensibilisation et prévention

La Police nationale, dans son communiqué sur l’affaire de Yeumbeul, a d’ailleurs rappelé l’importance de vérifier la véracité des offres de voyage et de signaler toute tentative de fraude. Au-delà du Sénégal, d’autres pays africains sont également concernés par l’immigration clandestine. La Guinée, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Nigeria ou encore le Cameroun figurent parmi les plus grands pourvoyeurs de migrants. À chaque fois, le même schéma se reproduit : des jeunes désillusionnés face à la pauvreté et au chômage.

A côté de ceux-ci, des passeurs qui promettent un passage sûr, et une réalité bien plus sombre qui attend les migrants sur la route. Certaines routes sont devenues tristement célèbres, comme celle de Gao (Mali) à Agadez (Niger), ou encore celle reliant le nord du Nigeria à la Libye, à travers des zones désertiques où les risques de mort par déshydratation ou de violence sont omniprésents.

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Une plume qui balance entre le Sénégal et le Mali, deux voisins en Afrique de l’Ouest qui ont des liens économiques étroits
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