Sénégal : le groupe Whatsapp de « Diomaye Président » explose après le remaniement


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WhatsApp et Facebook (04 oct 21)
WhatsApp et Facebook

La scène politique sénégalaise, déjà marquée par des équilibres fragiles, connaît un nouvel épisode mouvementé. La décision du Président Bassirou Diomaye Faye de nommer Aminata « Mimi » Touré à la tête de la coalition « Diomaye Président », en remplacement d’Aïda Mbodj, a déclenché une véritable tempête au sein du mouvement. Ce changement inattendu n’a pas seulement bousculé les calculs politiques : il a aussi provoqué une explosion de tensions sur le groupe WhatsApp officiel de la coalition, devenu en quelques heures un champ de bataille numérique.

Tout est parti d’un simple message. Dans le groupe WhatsApp rassemblant les cadres et coordinateurs régionaux de la coalition, Mimi Touré a publié la lettre officielle de sa nomination. À peine le message envoyé, les réactions ont fusé. Parmi les premières à réagir, Mame Diarra Fam, connue pour sa proximité avec Ousmane Sonko et Aïda Mbodj, n’a pas mâché ses mots. Elle a contesté ouvertement la légitimité de cette désignation, accusant la nouvelle coordinatrice d’être parachutée sans concertation.

Les raisons d’un remaniement surprise

Très vite, d’autres membres ont pris position. Certains ont félicité Mimi Touré, saluant « une femme d’expérience et de rigueur », tandis que d’autres ont dénoncé un « coup de force politique ». Entre ces deux camps, une minorité de membres a préféré observer le silence, espérant que la tempête s’apaise. Mais le ton était déjà donné : la coalition traversait une zone de turbulence majeure.

À l’origine de cette agitation, une décision présidentielle prise le 10 septembre 2025, mais rendue publique seulement deux mois plus tard. Dans une note datée du 11 novembre, le Président Diomaye Faye officialise la fin de mission d’Aïda Mbodj à la tête de la conférence des leaders de la coalition. Le chef de l’État salue « l’engagement et la loyauté » de l’ancienne responsable, tout en soulignant la nécessité d’un nouvel élan organisationnel. Selon lui, malgré l’élan populaire dont bénéficie la coalition, les divisions internes et la lenteur des prises de décision compromettent la mise en œuvre du projet présidentiel.

Une mission délicate pour Mimi Touré

Le choix d’Aminata Touré apparaît ainsi comme un pari sur la discipline et la cohésion. Ancienne Première ministre et cheffe de la campagne présidentielle de mars 2024, Mimi Touré est réputée pour son franc-parler et son sens de la méthode. Diomaye Faye espère qu’elle saura transformer la coalition en un instrument politique plus efficace, capable d’appuyer le gouvernement conduit par Ousmane Sonko. Si sa nomination s’inscrit dans une logique de renforcement institutionnel, elle s’accompagne de nombreux défis.

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Mimi Touré est attendue pour rassembler des sensibilités politiques parfois antagonistes : anciens compagnons de lutte du Pastef, alliés de circonstance issus de la société civile, et figures locales ayant rejoint la mouvance présidentielle après la victoire. Sa mission consistera à « redonner souffle et unité » à une coalition fragilisée par des luttes d’influence. Selon des proches du Palais, le Président Faye souhaite voir la coalition adopter une posture plus stratégique et moins émotionnelle, centrée sur le soutien aux réformes économiques et sociales engagées depuis le début de son mandat.

Le Pastef entre loyauté et méfiance

Cependant, la réaction du Pastef, parti dirigé par le Premier ministre Ousmane Sonko, montre que la cohabitation au sommet reste délicate. Le bureau politique du parti a publié, dès l’annonce officielle, un communiqué cinglant remettant en cause la légitimité de la décision présidentielle. Selon ce texte, le Président Diomaye Faye n’a pas le pouvoir de modifier unilatéralement la direction de la coalition, qui repose sur un accord collectif entre les différentes composantes.

A travers ce message, le Pastef entend défendre son influence au sein de la majorité et ne pas laisser le président imposer seul ses choix. Cette sortie publique, bien que mesurée, traduit un malaise profond entre les deux têtes de l’exécutif. Car si le tandem Diomaye–Sonko a jusque-là fonctionné dans la complémentarité, ce remaniement révèle une lutte silencieuse pour le contrôle de la base politique du pouvoir.

Un groupe WhatsApp en ébullition

À travers ce remaniement, Bassirou Diomaye Faye semble vouloir affirmer son autorité et donner un signal fort : celui d’un Président qui entend gouverner sans tutelle politique. En confiant la coordination à une figure comme Mimi Touré, connue pour sa rigueur administrative et sa fermeté, il cherche à professionnaliser la gestion de la coalition. Mais cette stratégie pourrait avoir un coût politique. Si la fronde du Pastef s’amplifie, elle risque d’affaiblir la dynamique de réforme que le duo au pouvoir tente de maintenir.

Dans l’immédiat, le groupe WhatsApp de la coalition reste le symbole d’un climat tendu : des débats à vif, des départs silencieux et des tentatives de médiation qui peinent à calmer les esprits. Ce qui devait être un simple ajustement organisationnel est devenu un révélateur des fractures internes du camp présidentiel. Le défi pour Diomaye Faye sera désormais de transformer cette crise en opportunité : celle de consolider une majorité unie, capable de gouverner au-delà des ambitions personnelles et des susceptibilités politiques.

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Une plume qui balance entre le Sénégal et le Mali, deux voisins en Afrique de l’Ouest qui ont des liens économiques étroits
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