Réchauffement climatique : les pays africains appelés à faire baisser la température


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Le changement climatique est au coeur d’une rencontre qui a démarré ce jeudi à Accra, au Ghana. Jusqu’au 27 août, il sera question de réfléchir aux modalités d’un nouveau protocole qui succèdera à celui de Kyoto en 2012. L’implication et l’assistance à l’Afrique, continent vulnérable et démuni face au changement climatique, est à l’ordre du jour.

Le Ghana est depuis ce jeudi l’étape africaine d’une série de discussions qui devrait aboutir à l’adoption d’un nouvel accord sur le changement climatique. Ce dernier doit succéder au protocole de Kyoto qui expire en 2012 [Le protocole de Kyoto a été adopté en 1997 par 37 pays industrialisés. Ils ont accepté de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 5% en dessous des niveaux de 1990 d’ici 2012. Cependant, les Etats-Unis, le plus gros pollueur de la planète, ont refusé de ratifier l’accord arguant qu’il ne faisait mention d’aucune obligation pour l’Inde et la Chine, pays émergents en pleine industrialisation et par conséquent nouveaux pollueurs.]]. Un accord doit être impérativement trouvé à Copenhague en 2009 d’après le calendrier adopté en décembre 2007 à [Bali où s’est tenue la dernière rencontre ministérielle sur le changement climatique. La conférence d’Accra est le troisième rendez-vous depuis cette rencontre et le dernier avant celui de la Convention des Nations unies sur les changements climatiques (CNUCC ) à Poznan, en Pologne, en décembre prochain.

Inciter et aider les pays Africains à se prendre en charge

La rencontre d’Accra, qui s’achèvera le 27 août, a également pour objectif d’impliquer davantage les pays africains dans la lutte contre le réchauffement climatique. « Quand la maison brûle, on ne perd pas de temps à pérorer », a déclaré ce jeudi Yvo de Boer, secrétaire exécutif de la CNUCC, citant un proverbe ashanti à l’ouverture de la conférence. Après le Kenya en 2006, c’est la deuxième fois qu’une réunion internationale sur le changement climatique se tient en Afrique, le continent le plus vulnérable et notoirement démuni face au phénomène. « L’Afrique se trouve fragilisée face aux changements climatiques parce qu’elle est déjà le continent des extrêmes en matière de climat », explique Nick Nuttall, le porte-parole du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). Sécheresse et pluies torrentielles font des ravages sur un continent marqué par les dérèglements climatiques. La mutation des paysages africains en témoigne. Les glaces éternelles du Mont Kilimandjaro (Kenya) fondent, la masse des glaciers du Mont Rwenzori (Ouganda) a été réduite de moitié entre 1987 et 2003. Le lac Tchad s’assèche et les niveaux d’eau du lac Victoria (Kenya) baissent.

Les changements climatiques ne sont pas seulement une menace pour l’équilibre des écosystèmes. Les économies africaines reposent en grande partie sur le secteur primaire. « L’agriculture africaine dépend essentiellement du volume des précipitations qui vont aller en décroisant dans les années à venir. Les experts estiment que l’augmentation des températures provoquera une perte du volume des cours d’eau équivalent à celui induit par un gros barrage, comme celui d’Akosombo au Ghana ». Côté tourisme, « 25 à 40% » des espaces de vie de certaines espèces animales, comme le zèbre, dans les parcs nationaux seront menacés. Ce qui devrait occasionner des pertes importantes pour certains pays dont la principale attraction touristique est la faune. La dégradation de l’environnement a aussi un fort impact social. « Durant ce siècle, le réchauffement climatique devrait être à l’origine des pénuries d’eau qui pourrait toucher 1,8 milliard de personnes. De même, 30% des villes côtières africaines risquent d’être submergées ou détruites à cause de l’élévation du niveau de la mer », selon Nick Nuttall. En 2080, si rien n’est fait d’ici là, la culture du blé relèvera définitivement du passé. Trente ans plus tôt, celle du maïs aura commencée à être ardue. En 2050 toujours, cultiver le soja en Egypte relèvera du miracle.

« Le réchauffement climatique vient se rajouter aux nombreux autres problèmes auxquels doit faire face l’Afrique ».

L’Afrique, qui contribue le moins aux émissions de gaz à effet de serre, est confrontée à un phénomène contre lequel son niveau technologique ne lui permet pas de se prémunir. Mais des solutions existent et peuvent être plus largement mises en œuvre. Les pays riches s’y sont engagés. Le Clean Development Mechanism (CDM) [[ Des particuliers et des organisations en Afrique peuvent développer des projets dont l’objectif est de réduire les émissions de CO2. Les réductions générées peuvent être vendues aux gouvernements ou aux entreprises des pays riches qui se sont engagés à réduire leurs émissions de CO2.]], prévu par le protocole de Kyoto, devrait mettre à la disposition des pays en voie de développent 100 milliards de dollars destinés à développer des énergies propres et renouvelables. A Accra, indique Nick Nuttall, le PNUE annoncera qu’elle entend faire de ce mécanisme basé sur le principe du pollueur-payeur une réalité sur la totalité du continent. Son utilisation s’est jusqu’ici limitée au nord et au Sud. L’organisation estime également que l’idée lancée à Kyoto en 1997, celle de verser une contrepartie financière aux pays en voie de développement qui préserveront leur capital forestier, est en passe de devenir un engagement ferme. « Nous espérons qu’à Copenhague, tous les pays s’accorderont sur cette question. La déforestation contribue pour 20% à l’effet de serre. »

Les pays développés envisagent, certes, de venir en aide aux Africains, mais c’est à leurs décideurs politiques qu’il appartient de faire pression pour sauver le continent d’une catastrophe environnementale. « Le réchauffement climatique vient se rajouter aux nombreux autres problèmes auxquels doit faire face l’Afrique ». La lutte contre le réchauffement climatique, selon Nick Nuttall, passe par l’affirmation d’une réelle volonté politique. « Ces dernières années, l’Afrique a accueilli de nombreux investissements. Mais participent-ils d’une manière ou d’une autre à la lutte contre le dérèglement climatique ? ». Les pays africains, soutenus par la communauté internationale, doivent amener le secteur privé à s’investir massivement dans la bataille environnementale tout en envisageant des solutions à leur portée. La collecte d’eau de pluie pourrait par exemple pallier à la pénurie d’eau en Afrique. Selon une étude du PNUE publiée en 2006, ces eaux pourraient permettre au Kenya, qui compte plus de 40 millions d’habitants, de subvenir six à sept fois aux besoins en eau de sa population. Depuis, les autorités kenyanes ont pris des dispositions pour que tous les nouveaux bâtiments soient équipés d’un système de récupération des eaux de pluies.

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