RDC : le ministre Constant Mutamba auditionné, repart libre


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Constant Mutamba, après son audition ce mardi
Constant Mutamba, après son audition ce mardi

Ce mardi, le ministre congolais de la Justice, Constant Mutamba, a été auditionné au parquet général près la Cour de cassation. Une audition dont le jeune ministre est ressorti libre.

Le ministre d’État en charge de la Justice et garde des Sceaux, Constant Mutamba, a comparu ce mardi devant le parquet général près de la Cour de cassation, dans le cadre d’une enquête pré-juridictionnelle portant sur un présumé détournement de fonds publics. Il lui est reproché d’avoir ordonné un paiement anticipé de 19 millions de dollars américains dans le cadre d’un marché de gré à gré non encore approuvé, relatif à la construction d’une nouvelle prison à Kisangani (province de la Tshopo).

Après plus de trois heures d’audition à huis clos, le ministre est ressorti libre, sans faire de déclaration à la presse.

Une procédure particulièrement suivie

Dès 14 heures, Constant Mutamba s’est présenté au siège du Parquet général, situé sur le boulevard du 30 juin à Kinshasa, accompagné de son avocat principal et d’une impressionnante délégation d’une vingtaine de conseils. Il a été entendu par l’avocat général Sylvain Kalwila, assisté du magistrat Christophe Museme, sous la supervision du procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde.

À l’extérieur, une foule compacte de militants, de sympathisants et de membres du cabinet ministériel, armés de sifflets et de pancartes, s’est mobilisée en signe de soutien. La police a toutefois empêché ce groupe d’accéder à l’enceinte du parquet, provoquant un moment de tension vite maîtrisé.

Des soupçons de détournement autour d’un marché public

Au cœur de l’enquête, une enveloppe globale de 39 millions de dollars destinée à la construction d’une prison moderne à Kisangani. Selon les premières informations, Constant Mutamba aurait autorisé, en amont de toute validation légale par les instances compétentes, le décaissement d’une avance de 19 millions de dollars au profit d’un prestataire sélectionné par procédure de gré à gré. Une décision qui, selon l’accusation, pourrait constituer une violation des règles de la commande publique et un détournement présumé de fonds.

Les détails du contrat en question n’ont pas encore été rendus publics, mais plusieurs sources au sein du ministère de la Justice évoquent une « urgence sécuritaire » pour justifier cette procédure accélérée.

Un ministre combatif et confiant

Si l’audition s’est déroulée dans la discrétion, la sortie du ministre aux alentours de 16h40 a été marquée par une scène de quasi-triomphalisme. Accueilli par ses partisans dans un bain de foule sur le boulevard du 30 juin, Constant Mutamba a salué brièvement la foule, sans toutefois faire de commentaire aux médias.

Cette comparution ne constitue cependant que le début de la procédure. Une seconde audition est prévue vendredi 6 juin, au cours de laquelle le parquet pourrait approfondir certains aspects techniques du dossier et confronter le ministre à de nouveaux éléments.

Une affaire à fort enjeu politique

Figure montante de la scène politique congolaise et connu pour sa rhétorique offensive contre certains adversaires du régime, Constant Mutamba voit son image écornée par cette affaire. Même s’il bénéficie, jusqu’à preuve du contraire, de la présomption d’innocence, l’implication d’un membre du gouvernement dans une affaire de détournement aussi massive suscite de vives réactions dans l’opinion publique.

Pour les organisations de la société civile et les observateurs du processus de lutte contre la corruption, cette affaire constitue un test important pour la justice congolaise. Sa capacité à mener une enquête indépendante, malgré la stature politique du mis en cause, sera scrutée de près.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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