Présidentielle en Côte d’Ivoire : Affi N’Guessan sonne l’alarme et appelle l’ONU à stopper le processus


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Pascal Affi N'Guessan
Pascal Affi N'Guessan

À un mois de la Présidentielle ivoirienne, le climat politique continue de se tendre en Côte d’Ivoire. Samedi, le président du Front populaire ivoirien (FPI), Pascal Affi N’Guessan, a reçu à Abidjan le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Leonardo Santos Simão. Au cœur de l’entretien : la légitimité du processus électoral et les dangers d’un scrutin dont une partie de l’opposition se sent exclue.

En Côte d’Ivoire, alors que le compte à rebours pour la Présidentielle du 25 octobre 2025 a commencé, la tension ne baisse pas. Ce qui a justifié l’organisation d’une tournée du représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Leonardo Santos Simão depuis quelques jours dans le pays. Ce samedi, le diplomate a rencontré, entre autres, Pascal Affi N’Guessan. L’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo a été très alarmiste.

Un candidat recalé qui refuse de se taire

Le 8 septembre 2025, le Conseil constitutionnel a invalidé la candidature de Pascal Affi N’Guessan, faute de parrainages suffisants. Sur soixante dossiers déposés, seuls cinq ont été validés, dont celui d’Alassane Ouattara, en lice pour un quatrième mandat. Pour le chef du FPI, cette décision n’est pas une simple question de procédure : elle illustre un verrouillage du jeu politique.

« Nous sommes totalement d’accord avec le représentant spécial sur la nécessité d’utiliser toutes les voies légales pour éviter une crise comparable à celle de 2010-2011 », a-t-il déclaré à l’issue de son entretien avec M. Simão. Mais il va plus loin : « La situation actuelle est devenue plus dangereuse », a-t-il prévenu, appelant l’ONU à saisir le Conseil de sécurité pour adopter une résolution capable de « stopper le processus électoral actuel » et d’ouvrir un dialogue inclusif.

Pour Affi N’Guessan, la candidature d’Alassane Ouattara est non seulement « inconstitutionnelle », mais aussi « immorale ». L’ancien Premier ministre estime que le Président sortant s’accroche au pouvoir au détriment de la stabilité du pays et qu’il revient à la communauté internationale de prévenir une crise majeure.

Une mission onusienne en terrain miné

Depuis le 18 septembre, Leonardo Santos Simão enchaîne les rencontres avec les acteurs politiques ivoiriens. Après un entretien avec le Président Ouattara, il s’est successivement entretenu avec Pascal Affi N’Guessan, Laurent Gbagbo et Simone Gbagbo. Ces consultations visent à évaluer le climat préélectoral et à prévenir de nouvelles violences, à un moment où la mémoire des affrontements meurtriers de 2010-2011 reste vive, et où la tension est à son point culminant.

L’ONU, qui avait joué un rôle décisif durant la précédente crise postélectorale, se retrouve une nouvelle fois sollicitée. « Nous considérons que la mission des Nations unies ne doit pas s’arrêter à de simples observations, il faut aller plus loin », a insisté Affi N’Guessan, qui espère un engagement ferme de l’organisation pour favoriser une élection « inclusive, transparente et apaisée ».

Une élection… verrouillée

L’invalidation des candidatures de poids lourds de l’opposition, comme Laurent Gbagbo (PPA-CI) et Tidjane Thiam (PDCI-RDA), a accentué la colère des partisans d’un scrutin plus ouvert. L’exclusion de ces dinosaures de la politique ivoirienne laisse la place à une élection verrouillée, sans enjeu de laquelle Alassane Ouattara a la quasi-assurance de sortir victorieux. Surtout que ni le PPA-CI ni le PDCI-RDA ni le FPI n’ont choisi de se rallier à l’un des candidats en lice, préférant contester le processus dans son ensemble.

Dans ces conditions, l’appel d’Affi N’Guessan à l’ONU résonne comme un avertissement. Pour lui, la Côte d’Ivoire est « assise sur une poudrière ». Le souvenir de la crise postélectorale de 2010-2011, qui avait fait plus de 3 000 morts, reste dans toutes les mémoires. Et aujourd’hui, l’histoire bégaie déjà avec la reproduction des erreurs du passé : exclusion de candidats majeurs, méfiance envers les institutions électorales, polarisation extrême autour du Président sortant.

Si l’ONU se garde pour l’instant de prendre position publiquement, sa médiation pourrait s’avérer déterminante pour désamorcer les tensions. Mais à cinq semaines du scrutin, le temps presse, et les marges de manœuvre de l’organisation semblent assez minces.

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Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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