
Depuis la formation du gouvernement Lecornu 2, la diplomatie française adopte un ton plus apaisé envers Alger. Le départ de Bruno Retailleau, dont la ligne de fermeté s’inscrivait aussi dans une stratégie personnelle en vue de l’élection présidentielle de 2027, a libéré de nouveaux espaces de dialogue. Entre mémoire, langue et volonté de coopération, Paris et Alger esquissent un retour au dialogue entre deux nations liées par l’histoire et la culture.
Depuis l’annonce du gouvernement Lecornu 2, le 12 octobre 2025, la relation entre la France et l’Algérie semble amorcer un léger redressement après des mois de crispation. L’éviction de Bruno Retailleau du gouvernement marque la fin d’une période de tension durable. Son approche, mêlant discours de fermeté opportuniste et calcul politique, visait d’abord à se positionner sur l’échiquier national en vue de 2027. Sa sortie du dispositif gouvernemental a permis un changement de ton immédiat, plus diplomatique et moins électoraliste.
Les deux nations, liées par une mémoire et une langue partagées, cherchent visiblement à renouer le fil d’une conversation interrompue.
Mémoire partagée et geste symbolique
Le premier signe fort est venu du champ mémoriel : quelques jours après la nomination du nouveau gouvernement, l’ambassadeur de France en Algérie, Stéphane Romatet, a pris part à Paris aux commémorations du 17 octobre 1961, date tragique de la répression et del’assassinat de manifestants algériens par la police française.
Sa présence, saluée des deux côtés de la Méditerranée, a été perçue comme un geste d’apaisement, une reconnaissance implicite que les blessures du passé doivent être affrontées ensemble.
Ce moment de recueillement a marqué un changement discret mais réel : la participation française à cette cérémonie, longtemps jugée trop sensible, illustre un nouvel état d’esprit dans la relation bilatérale : moins d’arrogance, plus d’écoute, et une volonté de bâtir un discours commun autour d’une mémoire partagée.
Francophonie et dialogue culturel : un terrain d’entente retrouvé
La nomination d’Éléonore Caroit comme ministre déléguée chargée de la Francophonie n’est pas anodine non plus. Elle redonne corps à un espace francophone méditerranéen où l’Algérie tient une place singulière : celle d’un pays où la langue française, loin d’être un vestige du passé, demeure un outil de création et d’ouverture.
Des projets concrets sont déjà à l’étude : relance d’échanges universitaires, coproductions audiovisuelles, résidences d’artistes, partenariats scientifiques et environnementaux. La langue commune redevient ainsi un levier de coopération.
La crise du printemps 2025, marquée par les expulsions croisées de diplomates et le rappel de l’ambassadeur français, avait laissé les deux capitales dans une défiance totale. Mais les derniers échanges laissent entrevoir une volonté de reconstruire la confiance.
Jean-Noël Barrot, nouveau chef de la diplomatie française, prône une approche « de raison et de respect », tandis que son homologue algérien appelle à « bâtir une confiance durable ».
Cette inflexion ne gomme pas les différends qu’ils soient migratoires, économiques ou politiques, mais elle marque la fin d’une diplomatie dictée par la posture interne et la communication politique.
L’avenir d’une relation à réinventer
Pour que ce frémissement diplomatique se transforme en véritable rapprochement, il faudra dépasser les symboles. Les prochaines semaines seront décisives : reprise des visites ministérielles, relance du dialogue consulaire, et surtout réactivation des coopérations francophones et universitaires.
Entre Paris et Alger, ce ne sont pas deux capitales étrangères qui se toisent, mais deux sociétés liées par la mémoire, la langue et les peuples.




