Lionel Zinsou : « Entraîner une mobilisation économique franco-africaine »


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Demain, vendredi 6 février 2015, aura lieu la deuxième édition du Sommet économique Afrique-France. Alors que l’Afrique a le vent en poupe dans les milieux d’affaires, plus de 600 chefs d’entreprise y sont attendus à cette occasion, ainsi que de nombreuses délégations ministérielles de pays anglophones et francophones et quelques chefs d’État du continent. Prétexte pour évoquer avec Lionel Zinsou l’avancée des travaux de la « Fondation Africa France ».

L’occasion de la deuxième édition du Sommet économique Afrique-France, qui s’ouvre ce vendredi 6 février 2015 a été saisie pour faire le point avec Lionel Zinsou sur l’avancée des travaux de la « Fondation Africa France », qu’il est chargé de porter sur les fonts baptismaux. Entretien.

Afrik.com : Quels sont pour vous les enjeux de ce Forum économique franco-africain ?

Lionel Zinsou :
En réalité, ce Forum a été prévu lors du Sommet de l’Elysée en décembre 2013. Il y a à peine plus d’un an. L’idée étant de construire un point de rencontre annuel entre les Etats et les acteurs économiques (entreprises, associations, société civile, collectivités locales) afin de mettre en œuvre de nouvelles méthodes de coopération. Cette année, le thème général est « Jeunesse et Innovation ». Un thème idéal pour annoncer que la Fondation franco-africaine que nous préparons depuis douze mois devient pleinement opérationnelle.

Nous allons accélérer les coopérations dans le domaine de la formation afin de dégager rapidement les forces de travail qualifiées, à tous les niveaux, dont les entreprises et les collectivités manquent aujourd’hui pour nourrir leur croissance

Nous allons nous ingénier à faire travailler ensemble, selon des modalités nouvelles, plus souples, plus adaptables, les forces des sociétés civiles, à la fois en Afrique en France, construire des passerelles et des synergies entre les entreprises, les organisations professionnelles et, les associations, les collectivités locales, les pouvoirs publics et les bailleurs de fonds internationaux… Autant d’entités ou de personnes qui, jusque-là, avançaient séparément, mais dont nous sommes persuadés qu’elles peuvent aujourd’hui jouer un rôle d’accélérateur du développement au Nord comme au Sud, dès lors qu’elles mettront en commun leurs énergies.

Avec 400 entreprises présentes, mais aussi les grands bailleurs de fonds publics nationaux et internationaux, et des acteurs politiques de premier plan, des chefs d’Etat et de gouvernement, le Forum économique franco-africain sera à l’image de la Fondation : à la fois pluriel, ouvert, franco-panafricain, lieu d’échanges, avec la capacité de soutenir des projets utiles.

Afrik.com : Concrètement, quelle forme va prendre l’action de la Fondation ?

Lionel Zinou :
D’abord ce ne sera pas une administration, ni un programme budgétaire, ni une entreprise à la conquête d’un marché spécifique. La « Fondation » doit être un catalyseur d’innovations à la fois dans les méthodes et dans les réalisations. Et nous allons immédiatement annoncer des chantiers très concrets : les premiers programmes de la « Fondation » concernent les ressources humaines. Le développement rapide du capital humain qui correspond au besoin que l’ensemble des acteurs ont d’emblée identifié comme le plus pressant. Nous allons accélérer les coopérations dans le domaine de la formation afin de dégager rapidement les forces de travail qualifiées, à tous les niveaux, dont les entreprises et les collectivités manquent aujourd’hui pour nourrir leur croissance. Pour cela, la Fondation coproduit trois (3) programmes, avec une enveloppe de financement de 3 M€ des ministères économiques et financiers français.

L’enjeu est énorme : il s’agit de renforcer concrètement la dynamique de croissance en Afrique et en France afin d’accélérer de part et d’autre le développement économique mais également social

Deuxième mode d’action de la « Fondation Africa France », la création de « clusters » sectoriels, pour organiser les concertations et les initiatives économiques par filières… Il en va ainsi pour la filière agricole, la finance, le sport, le numérique, la ville durable, l’entrepreneuriat socialement innovant, la filière des industries culturelles, extrêmement animée, coordonnée par l’engagement de la SACEM et de son président Jean-Noël TRONC, qui mobilise des personnalités emblématiques telles que Youssou Ndour, Manu Di Bango, Angelica Kidjo… et qui touche aux enjeux essentiels de la numérisation audiovisuelle du continent et des besoins éditoriaux nouveaux qu’elle entraîne. L’enjeu de la production africaine est désormais colossal, à la fois culturel, social, économique !

Afrik.com : En un an, comment jugez-vous le chemin parcouru ?

Lionel Zinsou :
Cette année a été une année-pilote. Pendant un an, nous avons construit initié des pilotes, nous avons fait remonter auprès des acteurs sur le terrain les besoins les plus clairs et urgents. Nous avons sondé les différents secteurs afin d’identifier les acteurs qui étaient prêts à se mobiliser dans une dynamique collective. Nous avons déjà impliqué des collectivités locales, comme c’est le cas à Bordeaux et à Nantes, nous avons commencé à faire germer les projets. La « Fondation » n’est ni un fonds d’investissement, ni une administration. Une bonne manière de la décrire serait de la comparer à une communauté, fonctionnant sur un mode de « réseau social ». Elle réussira si les courants d’information réciproque qu’elle suscitera fédèrent des entreprises françaises et africaines autour de projets de développement où toutes trouveront leur compte parce qu’elles s’y seront réellement impliquées, et qu’elles auront entraîné l’adhésion des bailleurs de fonds, des États, des investisseurs. Il est évident que c’est une approche nouvelle, une nouvelle voie ouverte vers la croissance, qui implique de nouvelles méthodes.

Evidemment, la dynamique empruntera des formes différentes selon les secteurs, dans le secteur bancaire par exemple qui connaît déjà une forte concurrence entre des acteurs nationaux et internationaux, à la fois français et africains, ou dans le secteur des marchés financiers, en plein essor, mais sur lequel les tensions concurrentielles entre acteurs sont moindres. Mais, dans tous les secteurs, nous quittons les paradigmes de l’administration pour inventer des process de collaboration, de nouvelles règles d’organisation et de mise en commun des priorités collectives afin de combler les manques qui sont aujourd’hui des freins au développement. C’est un défi méthodologique qui va se décliner en une multitude d’enjeux concrets au niveau des entreprises, des filières, des associations, des collectivités locales et nationales. L’enjeu est énorme : il s’agit de renforcer concrètement la dynamique de croissance en Afrique et en France afin d’accélérer de part et d’autre le développement économique mais également social. En particulier au bénéfice de la jeunesse et des femmes.

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