Ouganda–États-Unis : un accord migratoire qui interroge


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Yoweri Museveni
Yoweri Museveni

Un nouvel accord migratoire entre l’Ouganda et les États-Unis suscite de vives interrogations. Kampala a accepté d’accueillir temporairement des migrants refoulés du territoire américain, dans le cadre d’une coopération présentée comme humanitaire. Washington y voit un outil pour accélérer sa politique d’expulsion, mais les ONG dénoncent une externalisation du droit d’asile. L’Ouganda, déjà premier pays d’accueil de réfugiés en Afrique, se retrouve face à un dilemme politique et éthique.

Le gouvernement ougandais a annoncé, jeudi 21 août, avoir conclu un accord avec les États-Unis pour accueillir temporairement certains migrants refoulés du territoire américain. Derrière cette coopération bilatérale se cachent à la fois des enjeux humanitaires, sécuritaires et politiques.

Un partenariat présenté comme « temporaire »

Selon Vincent Bagiire, secrétaire permanent du ministère ougandais des Affaires étrangères, l’accord vise à examiner les demandes de protection de « ressortissants de pays tiers qui pourraient ne pas obtenir l’asile aux États-Unis ». Les modalités concrètes n’ont pas encore été détaillées, mais Kampala insiste sur le caractère « temporaire » et conditionné de l’arrangement. Les personnes avec un casier judiciaire et les mineurs non accompagnés en seraient exclus.

Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump a multiplié les accords avec des pays tiers pour délocaliser le traitement des migrants. Le Soudan du Sud, l’Eswatini, le Rwanda et même le Salvador figurent déjà sur la liste des destinations imposées à des étrangers qui, souvent, n’avaient aucun lien avec ces pays. Washington assume cette stratégie, présentée comme un moyen de dissuasion face à l’immigration irrégulière, mais dénoncée par des ONG comme une externalisation brutale du droit d’asile.

L’Ouganda, refuge et paradoxe

Pays d’Afrique de l’Est dirigé depuis près de quarante ans par Yoweri Museveni, l’Ouganda est paradoxalement reconnu pour sa politique relativement ouverte en matière d’accueil. Avec environ 1,7 million de réfugiés, principalement originaires du Soudan du Sud et de la République démocratique du Congo, il abrite la plus importante population de réfugiés du continent africain. Mais cette générosité affichée contraste avec la répression politique intérieure, qui s’intensifie à l’approche de l’élection présidentielle prévue en janvier 2026.

Pour Kampala, l’accord avec Washington peut renforcer les liens bilatéraux et attirer de nouveaux soutiens diplomatiques. Mais il place aussi le pays face à un dilemme : continuer d’apparaître comme une terre d’asile ou donner l’image d’un partenaire qui sert de relais à la politique d’expulsion américaine. Reste à savoir si cet « arrangement temporaire » se limitera à quelques centaines de personnes ou s’inscrira dans une coopération plus vaste.

Maceo Ouitona
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Maceo Ouitona est journaliste et chargé de communication, passionné des enjeux politiques, économiques et culturels en Afrique. Il propose sur Afrik des analyses pointues et des articles approfondis mêlant rigueur journalistique et expertise digitale
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