
Ce 8 mai 2025, le prince héritier Moulay El Hassan fête son 22ᵉ anniversaire, une date hautement symbolique dans un contexte où l’état de santé du roi Mohammed VI continue d’alimenter les spéculations. Alors que le souverain marocain se fait de plus en plus discret sur la scène publique, la question de sa succession se pose désormais avec insistance. Et pour la première fois depuis le début de son règne en 1999, l’hypothèse d’un conflit de légitimité au sommet de l’État n’est plus totalement exclue. La jeunesse du prince héritier face à l’expérience de son oncle, le prince Moulay Rachid, alimente des tensions silencieuses, qui pourraient s’exacerber à mesure que le trône paraît de moins en moins stable.
Depuis plusieurs années, le roi Mohammed VI, dont les absences répétées sont souvent justifiées par des raisons médicales, s’efface progressivement de la vie publique. Dans ce vide partiel laissé par le monarque, son fils aîné Moulay El Hassan commence à s’imposer dans les représentations officielles.
Le 7 mai dernier, il a été vu à Salé, au côté de son père, lors du lancement d’un projet d’envergure pour la région de Rabat-Salé-Kénitra. Une apparition qui confirme la montée en puissance progressive du jeune prince, bien que toujours dans un cadre rigoureusement encadré.
Pour autant, si Moulay El Hassan est clairement désigné comme héritier du trône depuis sa naissance — son prénom rendant hommage au roi Hassan II — il n’en demeure pas moins qu’il ne bénéficie d’aucune expérience politique ou institutionnelle concrète. Sa jeunesse, bien que désormais adulte, et son absence de prises de parole officielles laissent planer une incertitude sur sa capacité à gouverner en cas de vacance du pouvoir.
Dans ce contexte, le rôle de Moulay Rachid, frère cadet de Mohammed VI, pourrait devenir central. Âgé de 54 ans, fin diplomate, discret mais influent, le prince Rachid bénéficie d’une stature institutionnelle plus affirmée. Il représente souvent le roi lors de sommets internationaux ou de cérémonies protocolaires, et jouit d’un capital de sympathie au sein des cercles du pouvoir et de l’élite marocaine. Certains observateurs estiment qu’il pourrait apparaître, en cas de crise ou de transition rapide, comme un recours rassurant face à un jeune héritier encore peu préparé aux arcanes du pouvoir.
Quel cadre constitutionnel ?
Le Maroc, monarchie constitutionnelle certes, reste marqué par la nature dynastique du régime. Et si la tradition favorise le passage de la couronne de père en fils, elle n’est pas rigide. Des précédents existent dans d’autres monarchies où des héritiers jugés trop jeunes ou trop inexpérimentés ont vu leur accession retardée, voire contournée. La question se pose alors : le royaume est-il prêt à voir Moulay El Hassan monter sur le trône dans les années à venir, ou un consensus pourrait-il émerger autour de Moulay Rachid comme régent temporaire ou prétendant légitime ?
Les tensions ne sont pas exprimées publiquement, mais les signaux faibles sont là. Dans les cercles diplomatiques, les chancelleries étrangères, la succession au Maroc est un sujet d’analyse sérieux. La maladie du roi, rarement détaillée officiellement, laisse entrevoir la possibilité d’un scénario de transition non linéaire, dans lequel les équilibres au sein de la famille royale pourraient être redéfinis.
Au-delà des dynamiques internes, la stabilité du royaume est en jeu. Mohammed VI a su moderniser le Maroc tout en consolidant le rôle central du trône dans l’appareil étatique. Mais la pauvreté n’a pas reculé alors que les grandes fortunes du royaume prospéraient. La transition vers une nouvelle génération devra s’effectuer sans heurt pour préserver cette stabilité, notamment dans un contexte régional compliqué Mais si un conflit larvé venait à opposer Moulay El Hassan à Moulay Rachid, il pourrait raviver des clivages familiaux, institutionnels, voire politiques, avec des conséquences imprévisibles.
Ainsi, l’anniversaire du prince héritier, ce 8 mai, marque l’entrée dans l’âge adulte d’un homme destiné à régner, mais dont l’ascension pourrait être disputée. Dans l’ombre du palais royal, la bataille pour le trône pourrait bien être plus proche qu’il n’y paraît.