
Figure respectée de la société civile de Ménaka et défenseur infatigable des déplacés internes, Sidi Barka a été enlevé le 19 mai en pleine rue par deux hommes armés. Ce rapt, non revendiqué, plonge une ville déjà meurtrie par l’insécurité dans l’angoisse, alors que les autorités hésitent entre piste djihadiste et acte criminel.
Le 19 mai 2025, un enlèvement choquant est venu raviver les tensions dans la ville de Ménaka, au nord-est du Mali. Sidi Barka, président de la société civile locale et figure incontournable de la défense des déplacés internes, a été enlevé en pleine rue par deux hommes armés. Alors que les autorités s’interrogent sur les motivations de cet acte (djihadisme ou banditisme), la population, elle, reste suspendue à un silence inquiétant.
Un enlèvement soigneusement orchestré
C’est entre 19h30 et 20h, à la sortie de la prière du soir, que Sidi Barka a été pris pour cible. Les témoins décrivent une scène brutale : deux individus à moto l’attendaient à proximité de son domicile. Ils ont tiré en l’air pour semer la panique et l’empêcher de fuir, avant de le forcer à monter avec eux. Sur les lieux, seuls son chapelet et ses chaussures, abandonnés à la hâte, témoignent de l’enlèvement. Aucune revendication n’a été formulée, ni demande de rançon, un mutisme qui intrigue et alarme.
Sidi Barka n’était pas un homme ordinaire. Engagé depuis des années auprès des victimes des violences dans la région, il était devenu le porte-voix de dizaines de milliers de déplacés ayant fui les exactions de l’État islamique au Sahel (EIS), mais aussi les exactions supposées de l’armée malienne et de ses partenaires du groupe Wagner. À Ménaka, sa disparition est vécue comme un coup de massue pour une société civile déjà fragilisée par les conflits, les déplacements de population et les tensions communautaires.
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Les pistes jihadiste et criminelle sur la table
La région de Ménaka est aujourd’hui sous forte influence de l’EIS, qui y exerce une autorité de fait et y détient déjà plusieurs otages capturés au Niger voisin. L’hypothèse d’un enlèvement à visée politique ou idéologique est donc sérieusement envisagée. Toutefois, les autorités n’écartent pas non plus la piste de simples bandits locaux, agissant pour des raisons crapuleuses. En l’absence de revendication, il est difficile de trancher. Les forces armées maliennes, appuyées par le Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), mènent actuellement des recherches intensives.