Mali : Pourquoi l’armée a quitté le camp stratégique de Boulkessi


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terrorisme Somalie

Face à la montée en puissance des jihadistes, l’armée malienne a quitté le camp stratégique de Boulkessi, au cœur du Mopti, après deux attaques meurtrières en une semaine. Un retrait qui soulève de lourdes questions sur la capacité des Forces armées maliennes à contenir la menace dans un contexte régional de plus en plus instable.

Le retrait soudain de l’armée malienne du camp militaire de Boulkessi, au centre du Mali, marque un tournant inquiétant dans la lutte contre les groupes jihadistes. Après deux attaques meurtrières en moins d’une semaine, les forces maliennes ont évacué ce site pourtant stratégique, laissant derrière elles un camp vidé de ses soldats, mais encore chargé de tensions. Que signifie ce départ ? S’agit-il d’un simple repli tactique ou d’un aveu de faiblesse face à une menace croissante ?

Un camp symbolique sous pression extrême

Le camp de Boulkessi n’est pas un poste ordinaire : vaste, bien équipé, il constitue depuis des années un verrou militaire dans la région du Mopti, régulièrement ciblée par les groupes armés. Cette semaine, il a été la cible de deux assauts d’une intensité inédite. Le premier, mené dimanche 1er juin, a fait au moins 30 morts dans les rangs de l’armée, un bilan probablement sous-estimé. Le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim), affilié à Al-Qaïda, a revendiqué l’attaque, affirmant avoir tué plus de 100 militaires et saisi un important arsenal.

Le jeudi suivant, une seconde attaque a frappé le même camp, cette fois avec l’utilisation de drones, une première d’une telle ampleur dans la région. Cette évolution tactique des jihadistes inquiète les observateurs : elle montre un saut technologique et logistique dans leur stratégie. Face à cette montée en puissance, les Forces armées maliennes (FAMA) ont opté pour ce qu’elles qualifient de « retrait stratégique ». Pourtant, sur place, les images de tentes abandonnées, de vivres encore présents, et de véhicules laissés en arrière donnent une impression de départ précipité.

Un signal alarmant pour la sécurité dans le centre du Mali

La décision de quitter Boulkessi intervient dans un contexte de recrudescence générale des violences dans le pays. Outre les attaques dans le centre, des incidents similaires ont été signalés dans le nord, à Tombouctou, et dans le sud du pays. La fête musulmane de la Tabaski, traditionnellement marquée par une accalmie, se déroule cette année sous couvre-feu dans plusieurs régions. Pour les habitants de Boulkessi, ce retrait militaire suscite une grande inquiétude.

Ce revers militaire met à rude épreuve la junte au pouvoir à Bamako, qui prône depuis plusieurs mois une politique de souveraineté sécuritaire à travers l’Alliance des États du Sahel (AES), regroupant le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Mais la réalité sur le terrain semble contredire cette stratégie : les groupes jihadistes gagnent du terrain, innovent, et mettent les armées nationales en difficulté. À Mahou, dans le sud du pays, une autre attaque ce jeudi a fait cinq morts supplémentaires. Le repli de Boulkessi montre que la lutte contre le terrorisme dans la région reste loin d’être maîtrisée.

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