
Le procès de l’ancien ministre congolais de la Justice, Constant Mutamba, s’est ouvert ce mercredi devant la Cour de cassation à Kinshasa, dans une atmosphère à la fois tendue et stratégique. L’affaire a été renvoyée au 23 juillet.
Accusé de détournement présumé de 19 millions de dollars américains dans le cadre d’un contrat de gré à gré avec une société fictive, Zion Construction, Constant Mutamba comparaît en homme libre, assisté d’une trentaine d’avocats. Mais l’audience n’a pas permis d’entamer le fond du dossier : à l’issue de débats de procédure, la Cour a renvoyé l’affaire au 23 juillet 2025.
Un démarrage mouvementé
L’audience a débuté sans la présence du principal prévenu, ce qui a immédiatement suscité une demande de renvoi de la part de ses avocats. Ces derniers ont invoqué la nécessité pour leur client d’être personnellement présent et d’avoir un accès effectif au dossier pour assurer un procès équitable. Rejetant partiellement cette demande, la Cour a estimé que la comparution personnelle n’était pas obligatoire en l’espèce, Constant Mutamba étant jugé en premier et dernier ressort, en tant qu’ancien membre du gouvernement.
Le ministère public a poursuivi la procédure en lisant l’acte d’accusation. C’est en pleine lecture que le prévenu a fait son entrée dans la salle d’audience, s’excusant de son retard, et a été autorisé à comparaître « à titre conservatoire ».
Contestation de la régularité de la citation
L’un des points clés soulevés par la défense porte sur la régularité de la citation à comparaître. Me Yves Kisombe, l’un des avocats du prévenu, a dénoncé une irrégularité fondamentale : selon lui, la citation aurait dû être émise par le procureur général, conformément au privilège de juridiction dont bénéficie Constant Mutamba, et non par le greffier en chef de la Cour de cassation.
Cette faille procédurale a nourri une requête de la défense demandant à la Cour de constater l’irrecevabilité de la saisine. Un débat juridique s’est alors engagé entre la défense, le ministère public et la Cour.
Une affaire politiquement sensible
Le dossier est d’autant plus sensible que Constant Mutamba a récemment démissionné de son poste de ministre de la Justice au cœur de cette affaire de détournement et sur fond de tensions au sein de la majorité présidentielle. L’affaire relance le débat sur la gouvernance et la transparence dans la gestion des fonds publics en RDC, notamment dans le secteur carcéral, où les infrastructures sont notoirement défaillantes.
Les accusations portent sur un contrat douteux de 19 millions de dollars signé avec Zion Construction, une société que le ministère public affirme être fictive et sans actifs financiers. L’ancien garde des Sceaux est soupçonné d’avoir orchestré ce montage pour détourner les fonds initialement alloués à la construction de la prison centrale de Kisangani.
Prochaines étapes
La phase d’instruction n’a pas encore débuté. Lors de la prochaine audience prévue le 23 juillet, la Cour de cassation devrait entrer dans le vif du sujet : interrogatoire du prévenu, audition des témoins et présentation des pièces à conviction.
Les avocats de la défense affirment être prêts à démontrer l’innocence de leur client, en insistant sur le respect des droits de la défense et sur les vices de procédure. De leur côté, les magistrats devront arbitrer entre les impératifs de justice et les accusations de manquements procéduraux soulevées dès cette première audience.