
Deux mois après son arrestation, El Bachir Thiam reste détenu au secret, sans procès ni contact avec ses proches. Ce jeune militant pro-démocratie, membre du parti dissous Yelema, incarne désormais les dérives autoritaires du pouvoir malien. Son silence imposé illustre une stratégie plus large : museler toute voix dissidente, coûte que coûte.
Cela fait désormais deux mois qu’El Bachir Thiam, jeune militant du parti dissous Yelema, a disparu. Enlevé le 8 mai 2025 lors d’une vague de répression contre un mouvement pro-démocratie, il est depuis détenu au secret, sans aucun accès à un avocat ni contact avec ses proches. Alors que ses compagnons d’arrestation ont tous été libérés, son cas suscite une inquiétude croissante et interroge sur les méthodes actuelles du pouvoir malien.
Une détention prolongée dans l’ombre
Le sort réservé à El Bachir Thiam détonne. Militant engagé mais peu connu du grand public, il n’occupait pas un poste de haut rang au sein de l’opposition. Pourtant, il demeure le seul activiste encore détenu dans des conditions opaques, sans procédure judiciaire connue. Ses proches dénoncent une détention arbitraire et politisée. Certains avancent que sa loyauté indéfectible à ses convictions dérange, d’autres estiment que son appartenance à Yelema, parti fondé par l’ancien Premier ministre Moussa Mara, fait de lui une cible symbolique. À Kati, où il résidait, l’armée au pouvoir ne tolère aucun écart de pensée.
Les témoignages transmis à ses proches, malgré les risques encourus, dressent un tableau alarmant : absence de lumière, ventilation insuffisante, hygiène déplorable, rations alimentaires réduites… El Bachir Thiam serait maintenu dans des conditions qui mettent gravement en danger sa santé physique et mentale. Pour ses amis et sa famille, cette violence silencieuse vise à briser toute forme de résistance intérieure, à faire de lui un exemple pour dissuader toute contestation future.
Le silence comme arme politique
Dans un contexte où les libertés publiques se réduisent à peau de chagrin, le mutisme du pouvoir malien sur le cas d’El Bachir Thiam apparaît comme une stratégie de terreur. En se refusant à reconnaître officiellement sa détention ou à lui accorder des droits élémentaires, les autorités entérinent une pratique qui relève de la disparition forcée. Ce silence pèse lourd, tant au niveau national qu’international, où les réactions restent timides. À Bamako comme à l’étranger, rares sont ceux qui osent évoquer publiquement le cas de ce militant désormais invisible.
Quelques voix commencent à s’élever, timidement, pour réclamer des comptes. Des proches, des anciens camarades de Yelema, ainsi que des membres de la société civile tentent de faire connaître son sort. Mais dans un Mali verrouillé, où la peur règne, la mobilisation reste encore marginale. Le nom d’El Bachir Thiam pourrait pourtant devenir un symbole : celui d’une jeunesse malienne qui refuse de se taire malgré la menace. À condition que le monde ne détourne pas le regard.