
L’ancien Premier ministre malien, Choguel Maïga, vient d’être écroué. Après avoir été auditionné à la Cour suprême ce jour même.
Choguel Kokalla Maïga, ancien Premier ministre de la transition, a été inculpé, ce mardi pour « atteinte aux biens publics, faux et usage de faux » par la Cour suprême de Bamako. À l’issue de son audition, il a été placé sous mandat de dépôt, marquant une chute brutale pour celui qui fut, durant plus de trois ans, une figure incontournable du régime de Bamako.
Une descente aux enfers après le limogeage
Nommé Premier ministre en 2021 par le colonel Assimi Goïta, Choguel Maïga avait été chargé d’incarner la transition après le double coup d’État de 2020 et 2021. Porte-voix virulent du régime militaire, il s’était illustré par un discours nationaliste intransigeant, multipliant les critiques contre la France et les partenaires occidentaux, et défendant avec ardeur le rapprochement stratégique avec la Russie.
Mais à partir de 2024, son étoile a commencé à pâlir. Limogé en novembre de la même année, il payait le prix de ses critiques contre les orientations du pouvoir, notamment sur le calendrier de la transition et la prolongation du règne militaire. Choguel Maïga avait publiquement dénoncé son exclusion des cercles décisionnels, tout en regrettant que les engagements initiaux de retour des civils au pouvoir en mars 2024 aient été bafoués.
Des accusations lourdes et des réactions contrastées
« Atteinte aux biens publics, faux et usage de faux » ! Les accusations portées contre l’ancien Premier ministre sont très pesantes et pourraient lui valoir une peine conséquemment lourde. Il est question de gestion de biens publics et de faits présumés de falsification de documents officiels. Mais, aucune précision n’a pour l’instant été donnée sur les affaires concrètes concernées.
L’arrestation et le placement en garde à vue de l’ancien chef du gouvernement avaient déjà suscité de vives réactions au Mali. Pour ses partisans, il s’agit d’une manœuvre politique visant à museler une voix devenue dérangeante pour la junte. Des membres du M5-RFP, mouvement politique qui avait porté Choguel Maïga à la primature, dénoncent une « instrumentalisation de la justice » et alertent sur une dérive autoritaire des militaires.
Du côté des autorités, le discours est tout autre. Des proches du pouvoir assurent que « nul n’est au-dessus de la loi » et que la lutte contre la corruption et les malversations financières doit concerner « toutes les personnalités, quel que soit leur rang passé ».
Un avenir politique incertain
Pour Choguel Maïga, figure politique connue depuis des décennies et plusieurs fois ministre sous différents régimes, cette inculpation constitue un sérieux coup porté à sa carrière politique. Si le procès venait à confirmer les accusations, il risquerait plusieurs années de prison, ce qui réduirait à néant ses ambitions politiques futures. Mais dans le contexte malien actuel, nombre d’analystes estiment que ce dossier dépasse largement la seule sphère judiciaire : il s’agit avant tout d’une bataille politique, où le sort de l’ex-Premier ministre se joue entre les mains de ses anciens alliés militaires désormais décidés à consolider leur pouvoir. Dans tous les cas, en osant des prises de positions publiques contre le régime qu’il a longtemps adoubé, Choguel Maïga savait sans doute qu’il risquait gros. Ce n’est que le début d’un feuilleton qui a encore quelques épisodes à dérouler.