Les visas étudiants algériens en France : une chance méconnue face aux polémiques


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Etudiants algériens en France
Etudiants algériens en France

Alors que l’extrême droite française s’alarme de l’augmentation des visas étudiants algériens, les chiffres révèlent une tout autre réalité : ces étudiants et professionnels, notamment les 6 891 médecins algériens exerçant en France, constituent un atout majeur pour le système de santé et l’économie française. Décryptage d’une contribution méconnue mais essentielle.

Malgré les récentes polémiques suscitées par l’extrême droite française concernant l’augmentation des visas étudiants algériens – 8 351 visas accordés pour la rentrée 2025, soit 1 000 de plus qu’en 2024 – cette mobilité étudiante représente en réalité un atout considérable pour la France, tant sur le plan économique que pour son système de santé. Restreindre ces entrées auraient des conséquences à moyen terme négatives pour la France.

Les médecins algériens : piliers du système de santé français

Le cas des médecins algériens illustre parfaitement cette contribution positive. Au 1er janvier 2025, la France comptait 6 891 médecins diplômés en Algérie inscrits à l’ordre, représentant près de 40% de l’ensemble des praticiens formés hors Union européenne.

Ces professionnels de santé constituent la première nationalité étrangère parmi les médecins étrangers exerçant en France. Leur présence est particulièrement cruciale dans les spécialités en tension : médecine générale (19,8%), psychiatrie (8,8%), anesthésie-réanimation (7,8%), pédiatrie (6,6%) et gériatrie (5,9%).

Dans certains domaines, leur rôle est structurant : en gériatrie, un médecin sur trois est un ancien PADHUE, c’est à dire hors Union Européenne.

Ces médecins exercent principalement dans les zones sous-dotées médicalement : près de 38% en Île-de-France, 8,8% dans les Hauts-de-France et 8,6% en Auvergne-Rhône-Alpes, avec une préférence pour les espaces urbains, périurbains et ruraux défavorisés. Ils garantissent ainsi l’accès aux soins dans des territoires souvent délaissés par les jeunes diplômés français.

Un profil étudiant d’excellence

Par ailleurs, les étudiants algériens qui arrivent en France présentent des profils académiques solides. L’Algérie se positionne au deuxième rang des pays d’origine des étudiants internationaux en France avec 34 758 étudiants inscrits, derrière le Maroc (42 015) et devant la Chine (26 327). Cette position témoigne d’une tradition académique établie et d’une excellence reconnue.

Le taux d’acceptation de 87% des demandes de visa étudiant via la procédure Campus France reflète la qualité des dossiers présentés. Ces étudiants s’orientent majoritairement vers des formations exigeantes, notamment en sciences médicales, en ingénierie et en sciences exactes. C’est le résultat de la qualité de l’enseignement en Algérie, qui est le plus en pointe du Maghreb.

Le système éducatif algérien, avec 55 universités, 9 centres universitaires, 40 écoles nationales supérieures, et 13 écoles normales supérieures, a développé des filières d’excellence. Depuis 1962, l’université algérienne a formé plus de 65 000 étudiants étrangers issus de 62 pays témoignant de la qualité de son enseignement.

Les nouveaux pôles technologiques algériens, comme celui de Sidi Abdallah, forment des ingénieurs dans des domaines de pointe : intelligence artificielle, mathématiques, systèmes autonomes, nanotechnologie et cybersécurité, avec un enseignement intégralement en langue anglaise, un point qui montre que la France a largement perdu de son attrait.

Un investissement rentable pour la France

Contrairement aux idées reçues, 61% des Algériens disposent encore d’un titre de séjour en France huit ans après leur arrivée pour motif étudiant. Cette intégration durable signifie que ces diplômés contribuent durablement à l’économie française en occupant des postes qualifiés dans des secteurs en tension.

Cette mobilité étudiante représente pour la France un outil de soft power et traduit la force d’un lien académique qui résiste aux tensions politiques. Les diplômés algériens formés en France deviennent aussi des ambassadeurs de la culture et de l’expertise française dans leurs domaines respectifs. Un point essentiel alors qu’aujourd’hui l’anglais prend de plus en plus de place dans les différents pays du Maghreb.

Ainsi, face aux discours alarmistes de l’extrême droite, les chiffres révèlent une réalité différente : les étudiants et professionnels algériens représentent une richesse pour la France. Leur contribution est particulièrement visible dans le secteur médical, où ils assurent la continuité des soins dans les zones déficitaires. Plutôt que de voir cette mobilité comme une menace, il serait plus juste de la considérer comme une chance pour la France de maintenir ses services publics essentiels tout en enrichissant son tissu économique et scientifique de talents formés et motivés.

Zainab Musa
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Zainab Musa est une journaliste collaborant avec afrik.com, spécialisée dans l'actualité politique, économique et sociale du Maghreb et de l'Afrique de l'Ouest. À travers ses enquêtes approfondies et ses analyses percutantes, elle met en lumière des sujets sensibles tels que la corruption, les tensions géopolitiques, les enjeux environnementaux et les défis de la transition énergétique. Ses articles traitent également des évolutions sociétales et culturelles, notamment à travers des reportages sur les figures influentes du Maroc et de l’Algérie. Son approche rigoureuse et son regard critique font d’elle une voix incontournable du journalisme africain francophone.
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