Le pari d’Issa Tchiroma Bakary pour le Cameroun : mobilisation massive à Yaoundé


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Issa Tchiroma Bakary
Issa Tchiroma Bakary

Le 3 octobre 2025, le quartier de Tsinga à Yaoundé a vibré aux couleurs de l’espoir et du changement. Des milliers de Camerounais se sont rassemblés pour acclamer Issa Tchiroma Bakary, figure désignée de l’opposition et candidat à l’élection présidentielle du 12 octobre prochain. Ce rassemblement massif relance une campagne électorale qui pourrait être historique pour le Cameroun.

Un meeting aux allures de défi politique

Face à une foule évaluée à plusieurs centaines de personnes, Issa Tchiroma Bakary n’a pas mâché ses mots. Dans une déclaration qui résonne comme un ultimatum, il a lancé que les occupants actuels du palais présidentiel d’Etoudi peuvent commencer à préparer leur départ, affirmant que le pouvoir reviendra au peuple après le scrutin.

Cette prise de parole audacieuse intervient dans un contexte politique tendu où le président sortant Paul Biya, âgé de 92 ans et au pouvoir depuis 43 ans, brigue un nouveau mandat.

Pour Tchiroma Bakary le temps du changement est venu. Le candidat du Front national pour le salut du Cameroun a construit sa stratégie de campagne autour d’une promesse centrale : instaurer une gouvernance nouvelle, responsable et centrée sur les préoccupations concrètes des citoyens. Son discours rompt avec les pratiques politiques traditionnelles en misant sur la transparence, la proximité avec les populations et des réformes structurelles profondes.

La tournée électorale de Tchiroma Bakary a débuté dans son bastion politique de l’Adamaoua. Le 21 septembre, à Ngaoundéré, il a sollicité un vote de confiance auprès des électeurs de la région, leur affirmant que leur choix dans le secret des urnes pourrait amorcer une nouvelle ère pour le pays. Quelques jours plus tard, le 24 septembre, c’est à Bafoussam, dans la région de l’Ouest, qu’il a tenu un autre rassemblement d’envergure.

Un programme ambitieux en six piliers

Le projet politique d’Issa Tchiroma Bakary repose sur six axes majeurs : la réconciliation nationale, un audit complet de l’appareil étatique, une réforme constitutionnelle, la reconnaissance de la double nationalité, une plus grande implication de la jeunesse et des femmes dans la gouvernance, ainsi que l’accès universel à l’électricité et à Internet.

Ce programme transitionnel vise à répondre aux aspirations d’une population camerounaise fatiguée par des décennies de gouvernance contestée. L’ancien ministre aujourd’hui, âgé de 76 ans, promet un mandat unique de transition, destiné à poser les bases d’une nouvelle République.

La campagne de Tchiroma Bakary bénéficie du ralliement croissant d’acteurs de la société civile et de personnalités politiques favorables à l’alternance. Parmi les soutiens notables figurent plusieurs militants et cadres du Mouvement pour la renaissance du Cameroun qui ont choisi de soutenir sa candidature. Lors du meeting de Bafoussam, on a pu apercevoir à ses côtés Anicet Ekane, président du MANIDEM, ainsi que le professeur Jean Calvin Aba’a Oyono, conseiller politique du MRC. Ces ralliements témoignent d’une dynamique de convergence au sein d’une opposition longtemps fragmentée.

La mobilisation s’étend également à la diaspora camerounaise. La section française du FNSC a organisé une conférence de soutien le 4 octobre en France, dans le but d’élargir la base électorale du candidat parmi les Camerounais de l’étranger.

Le paradoxe d’un ancien ministre devenu opposant

La trajectoire politique d’Issa Tchiroma Bakary ne manque pas d’alimenter les débats. Ancien ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle sous Paul Biya, il a démissionné de son poste en juin dernier pour se lancer dans la course présidentielle. Ce passé gouvernemental est régulièrement soulevé par ses détracteurs qui y voient une contradiction avec sa posture actuelle d’opposant au système.

À deux semaines du scrutin, l’opposition camerounaise n’a pas réussi à présenter un front uni. Face à Paul Biya, Issa Tchiroma Bakary et Bello Bouba Maïgari s’avancent à la tête de coalitions concurrentes, tandis que d’autres candidats évoluent en solitaire.

À quelques jours du vote, l’atmosphère est électrique au Cameroun. Pour de nombreux observateurs, cette élection représente un moment charnière dans l’histoire politique du pays. Après plus de quatre décennies de règne de Paul Biya, l’aspiration au changement traverse toutes les couches de la société camerounaise.

Selon Frank Lontsi, un ingénieur en génie civil de 32 ans présent au meeting de Yaoundé, il ne fait aucun doute qu’Issa Tchiroma est aujourd’hui le leader de l’opposition au Cameroun. Ce sentiment traduit l’espoir d’une partie de la jeunesse camerounaise qui voit en lui l’incarnation possible d’une alternance démocratique. Le 12 octobre prochain, les Camerounais se rendront aux urnes pour un scrutin qui pourrait redessiner le paysage politique du pays.

Masque Africamaat
Spécialiste de l'actualité d'Afrique Centrale, mais pas uniquement ! Et ne dédaigne pas travailler sur la culture et l'histoire de temps en temps.
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